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Le tribunal dans les méandres des comptes à l'étranger de Serge Dassault

Des Iles Vierges britanniques au Liechstenstein, le tribunal correctionnel de Paris s'est plongé mercredi dans les méandres des comptes à l'étranger de Serge Dassault, qui lui valent d'être jugé pour blanchiment de fraude fiscale.

Le parquet national financier (PNF) reproche au PDG du groupe Dassault, fondé par son père Marcel, d'avoir détenu des comptes à l'étranger pour dissimuler le produit direct de sa propre fraude fiscale.

En cause, les comptes de quatre fondations et sociétés, basées aux Iles Vierges britanniques, au Luxembourg et au Liechtenstein, qui ont abrité jusqu'à 31 millions d'euros en 2006, près de 12 millions en 2014.

"On ne sait pas ce qu'est devenu ce petit delta de 19 millions d'euros", a souligné Olivier Géron, le président du tribunal, qui a abordé le fond du dossier mercredi après avoir examiné de multiples points de procédure soulevés par la défense.

Serge Dassault, 91 ans, qui ne s'est pas présenté devant le tribunal, n'a pas été entendu pendant l'enquête. Si deux auditions avaient été prévues, il ne les a pas honorées en invoquant ce que le PNF a qualifié de "moyens dilatoires".

Les seuls éléments apportés par Serge Dassault sont des courriers, dans lesquels il explique qu'il a hérité de ces fonds, qui appartenaient à son père, mort en 1986, puis à sa mère, décédée en 1992, avant de revenir à son frère Claude, mort en 2011 et à lui.

Quant à l'origine des fonds, le tribunal ne dispose pas d'éléments précis, si ce n'est que selon la "rumeur" au sein de la famille, ils auraient été placés dans les années 1950 par Marcel Dassault, qui avait "peur de revivre la guerre" et voulait "protéger sa famille".

- "Doute sérieux" -

Serge Dassault, sénateur Les Républicains de l'Essonne depuis 2004, est également jugé pour avoir omis de déclarer 11 millions d'euros en 2014 et 16 millions d'euros en 2011 à l'ancêtre de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), la Commission pour la transparence financière de la vie publique, chargée de vérifier les situations patrimoniales des élus.

La HATVP avait émis un "doute sérieux" sur "l'exhaustivité, l'exactitude et la sincérité" de ses déclarations, le soupçonnant d'avoir omis de déclarer des avoirs détenus à l'étranger.

Son patrimoine déclaré était en 1995 de 2,4 milliards de francs, en 2001 de 615 millions d'euros, en 2004 de 1,125 milliards d'euros, en 2008 de 409 millions, en 2011 de 573 millions et en 2014 de 722 millions, a énuméré le président.

M. Dassault a depuis régularisé sa situation, tant auprès de l'administration fiscale que de la HATVP.

Le procès se poursuit jeudi après-midi, avec le réquisitoire du PNF puis les plaidoiries de la défense. Un calendrier qui pourrait être revu si M. Dassault "se décidait à venir nous donner quelques précisions", a glissé le président Géron.

L'existence de "cagnottes" au Luxembourg et au Liechtenstein avait déjà été évoquée dans le cadre de l'enquête sur un système présumé d'achats de voix lors des campagnes municipales de Corbeil-Essonnes (Essonne) en 2009 et 2010. Une enquête dans laquelle Serge Dassault est mis en examen avec sept autres personnes, dont l'actuel maire, Jean-Pierre Bechter (LR), qui lui a succédé à la tête de la ville, après l'annulation du scrutin de 2008 en raison de "dons d'argent".

Dans l'enquête menée par les juges d'instruction, plusieurs témoignages accréditent un système d'achat de voix.

L'industriel est mis en examen pour achat de votes, complicité de financement illicite de campagne et financement en dépassement du plafond autorisé. Il ne nie pas les dons d'argent, mais conteste toute corruption et tout lien avec les élections.

L'affaire est toujours en cours d'instruction.

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