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Législatives: l'ombre de Collomb sur la bataille de Villeurbanne

L'affiche a tout du règlement de comptes : à Villeurbanne, En Marche! a investi l'entrepreneur Bruno Bonnell face à l'ex-ministre de l’Éducation Najat Vallaud-Belkacem, dans une région lyonnaise où Gérard Collomb n'a jamais digéré l'ascension de son ancienne protégée.

Le maire socialiste de cette ville de 150.000 habitants, qui forme la 6e circonscription du Rhône, a donné le ton en comparant, dans la presse, le ministre de l'Intérieur à Don Corleone.

"Il règle ses comptes à la manière d'un parrain", a lâché Jean-Paul Bret dans une interview à Lyon Capitale. Najat Vallaud-Belkacem "ne s'est pas soumise" et il n'a "pas supporté sa montée en notoriété depuis cinq ans" ; "avec les vents qui poussent Macron, Gérard Collomb a pensé que c'était le moment de la dégommer".

Contrairement à d'anciens collègues du gouvernement candidats aux législatives, Najat Vallaud-Belkacem, partisane d'une "gauche forte" à l'Assemblée, n'a pas été épargnée avec l'investiture de Bruno Bonnell, un serial-entrepreneur à succès dans les jeux vidéo puis la robotique, proche de Gérard Collomb et référent local d'En Marche!.

Dans ce faux "10e arrondissement" de Lyon dont les élus jouent les frondeurs à la métropole, l'issue du match est incertaine bien que le PS tienne la circonscription depuis trente ans, exception faite d'une parenthèse RPR entre 1993 et 1997, années de la vague bleue.

Au premier tour de la présidentielle, Benoît Hamon a recueilli 9% des suffrages à Villeurbanne, loin derrière Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon, devancé aussi par François Fillon et Marine Le Pen. Un sondage donne Bruno Bonnell gagnant dans la circonscription, où la gauche part en ordre très dispersé parmi les 19 candidats.

En y labourant le terrain depuis son implantation en 2014, "NVB" pensait sans doute que la partie serait plus facile que dans la 4e circonscription, ancrée à droite, où elle avait été battue en 2007 par Dominique Perben puis renoncé à se présenter en 2012 après son entrée au gouvernement.

- 'L'envoyé de Lyon' -

C'était sans compter sur "l'envoyé de Lyon", comme elle décrit son rival. Sans en rajouter : "il n'y a pas de complot". "Je n'ai aucunement contribué à rendre difficiles nos relations" avec Gérard Collomb, "un grand élu local, un bâtisseur" auquel elle "souhaite de réussir" au gouvernement.

"On est en politique, pas dans un roman-photo !" s'agace celle qui fut présentée au maire de Lyon par son épouse Caroline, rencontrée à Sciences-Po au début des années 2000. Elle grandit politiquement avec lui avant de s'émanciper, une source de frustration, parmi d'autres, pour le baron lyonnais. Et une raison de se venger aujourd'hui ?

"Collomb, c'est quelqu'un qui a un échiquier face à lui et bouge ses pions comme ça l'arrange, commente un ancien socialiste local. On l'a vu aussi avec Thierry Braillard, un autre ancien protégé qu'il a fait élire député en 2012 et qu'il vient de débrancher au profit de Thomas Rudigoz", investi par En Marche! dans la 1ère circonscription aux dépens de l'ex-ministre, qui a jeté l'éponge.

Mais Bruno Bonnell dément tout "règlement de comptes" : "ici ce n'est pas Clochemerle, c'est un affrontement entre l'ancien et le nouveau monde politique". "Je ne suis pas un parachuté. C'est moi qui ai demandé de venir. Collomb ne m'a pas manipulé", assure ce natif d'Alger en 1958, "façonné" ensuite par Villeurbanne.

Arrivé à huit ans, il y a fait ses études et y a fondé "toutes ses entreprises", a-t-il rappelé mardi à la centaine de personnes qui assistaient à un débat organisé par le quotidien Le Progrès.

Au jeu du qui sera le plus villeurbannais, la candidate LR Emmanuelle Haziza, 32 ans, battue en 2012 dans la circonscription, renvoie ses rivaux dos à dos : "je n'ai pas attendu (pour me lancer) d'être virée de Lyon, ni d'avoir un président élu".

Najat Vallaud-Belkacem, née au Maroc et passée par la Picardie, revendique, pour Villeurbanne, un choix plutôt que "le hasard d'une naissance". Surtout, celle que Bernard Cazeneuve vient soutenir lundi estime incarner "le vote utile" car "élire un député En marche! de plus, c'est envoyer à l'Assemblée un robot, avec des votes préprogrammés".

Son adversaire, chantre de la "Robolution", appréciera.

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