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Loi Macron: déminage à l'Assemblée avec le retrait du secret des affaires

La création d'un "secret des affaires", contestée par journalistes et ONG, va être retirée de la loi Macron, illustrant la stratégie de la majorité d'enlever un maximum d'obstacles sur le long parcours de ce texte à l'Assemblée, toujours critiqué à gauche et à droite.

"Nous gardons la conviction que ce texte n'était attentatoire ni à la liberté de la presse, ni à celle des lanceurs d'alerte mais, vu l'émoi suscité, le groupe socialiste a jugé sage de retirer le texte", a expliqué vendredi à l'AFP le rapporteur général du projet de loi Macron, Richard Ferrand (PS).

L'instauration, via un amendement parlementaire en commission, d'un "secret des affaires", assorti de lourdes peines de prison et d'amende en cas de violation, au motif de protéger les entreprises de l'espionnage économique, avait suscité de fortes protestations.

Les principaux médias avaient demandé le "retrait pur et simple" d'une "censure inédite en France" alors que l'association Transparency international s'était inquiétée du sort des "lanceurs d'alerte", ces particuliers qui mettent au jour, sur la base de documents confidentiels, des scandales privés ou publics.

Si M. Ferrand assure que ces décisions ont été prises par le groupe socialiste, un autre parlementaire PS disait en privé "que ça s'est terminé à l'Elysée".

Ce retrait illustre en tout cas la volonté de l'exécutif de continuer à déminer le parcours du projet de loi du ministre de l'Economie, entamé lundi et dont les députés n'avaient étudié vendredi midi qu'environ 15% des 3.000 amendements.

Depuis le début, comme il l'avait fait en commission, Emmanuel Macron prend le soin de répondre longuement à chaque interpellation dans l’hémicycle et ne cesse de répéter que "le texte peut être amélioré".

- Lobbying effréné des notaires -

Mais cette démarche, appréciée sur tous les bancs, ne rencontre pas toujours le succès escompté.

Vendredi le gouvernement et les députés PS ont ainsi déposé des amendements pour faire adopter une réforme du permis de conduire plus ambitieuse que prévu pour en réduire les très longs délais de passage.

Les centristes de l'UDI ont fait de ce point un "emblème" pour leur vote final sur lequel compte le gouvernement. Mais le chemin retenu, qui n'est pas celui de la privatisation du passage du permis comme ils le réclament, a provoqué leur colère au point que Jean-Christophe Fromantin a dit "ne plus être en état de voter" la loi Macron.

Autre groupe encore à convaincre: les écologistes, qui ont contesté vivement la libéralisation du transport par autocar adoptée en début de semaine et demandent encore des changements substantiels en faveur de l'environnement pour passer d'un vote contre annoncé à l'abstention.

Les socialistes frondeurs devraient eux se faire entendre davantage en fin de semaine prochaine lorsque sera abordé le volet sur l'ouverture des commerces le dimanche, situé en toute fin de texte.

Alors que les radicaux de gauche sont "partagés" sur le projet de loi, le gouvernement n'a aucun espoir en revanche du côté du Front de gauche qui défend une "opposition idéologique" sur tous les points d'un texte "ultralibéral".

Quant au groupe UMP, initialement embarrassé par certaines mesures qu'il aurait pu proposer, il a finalement choisi dans son immense majorité de suivre l'opposition frontale préconisée par Nicolas Sarkozy en s'abritant derrière "l'absence de réformes en profondeur" comme "la fin des 35 heures ou le contrat de travail unique".

"Vous pratiquez le bovarysme parlementaire" en parlant toujours "de ce qui n'est pas dans le texte plutôt que de ce qui y est", leur a lancé M. Macron.

Les députés UMP devraient en tout cas se mobiliser pour la défense des professions réglementées, comme les notaires, dont la réforme, une des grandes ambitions du texte, sera abordée vendredi soir.

Celle-ci prévoit la mise en place d'une liberté d'installation encadrée, la baisse des tarifs fixes des petits actes et un mécanisme permettant de fixer les tarifs des actes importants entre un prix plafond et un prix plancher afin de faire jouer une mini-concurrence.

Toujours dans cette stratégie de "déminage", les rapporteurs du texte ont proposé de supprimer ce dernier point contesté. Reste à voir si la majorité, passablement énervée par le "chantage aux licenciements" et les "menaces choquantes" de la part des notaires qui se sont livrés à un lobbying effréné, les suivra jusque-là.

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