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Robin Campillo, un cinéaste élégant hanté par les années sida

Le Français Robin Campillo, 54 ans, récompensé dimanche par le Grand prix du Festival de Cannes, est un cinéaste élégant aux films finement chorégraphiés, mettant sans cesse en relation le collectif et l'intime, et dont la vie est marquée par les années sida, qu'il raconte dans "120 battements par minute".

Cette fresque a bouleversé la critique et le jury d'Almodovar. Elle montre la lutte contre le sida à travers l'action d'Act Up à Paris et est inspiré du propre passé de militant de Campillo au sein de cette association au début des années 90, une période "très importante" pour lui.

Dans son troisième long métrage après "Les Revenants" et "Eastern boys"--, le cinéaste, jusqu'ici peu connu du grand public et pour la première fois en compétition à Cannes, suit à la fois un groupe et des parcours individuels, s'attachant comme dans son précédent long métrage à entremêler le couple, les corps, le sexe et la politique.

"Ce que j'essaie de faire, c'est de montrer comment la fiction, c'est quelque chose entre le collectif et l'intime", a expliqué à Cannes cet homme aux cheveux gris coupés courts et au visage juvénile.

Egalement monteur et scénariste, ce proche du réalisateur Laurent Cantet, avec qui il a notamment coécrit "Entre les murs", Palme d'or en 2008, apporte une grande attention à ses personnages, portés par des comédiens choisis au fil de castings parfois longs, comme Nahuel Pérez Biscayart et Arnaud Valois dans "120 battements par minutes".

Parfois à mi-chemin entre fiction et approche documentaire, sachant passer habilement de l'un à l'autre, il apporte aussi une grande attention à la structure, aux changements de rythme et à la musicalité de ses films, visuellement élégants et par moments lyriques ou oniriques -- avec une prédilection pour la musique électro d'Arnaud Rebotini, qui a signé les bandes son de "Eastern boys" et "120 battements par minute"--.

- Du montage à réalisation -

Né le 16 août 1962 au Maroc, Robin Campillo a été formé à l'école de cinéma parisienne Idhec au début des années 80, où il a rencontré Laurent Cantet.

Après avoir opté pour le montage, ce cinéphile renonce un temps au cinéma pour monter des reportages à la télévision.

C'est Laurent Cantet qui le fait revenir au grand écran, après lui avoir fait signer le montage de son téléfilm "Les Sanguinaires", en 1997, puis de son long métrage "Ressources humaines" en 1999.

Il coécrira et montera ses autres films, "L'Emploi du temps", "Vers le sud", "Entre les murs" ou encore "L'Atelier", présenté à Cannes cette année dans la section parallèle Un certain regard.

"Pour moi, il était évident que Robin était cinéaste et ferait des films avant moi. Mais c'était compter sans sa lenteur!", racontait récemment Laurent Cantet à l'hebdomadaire Télérama.

En 2004, Robin Campillo passe enfin à la réalisation avec "Les Revenants", le film qui a inspiré la série éponyme à succès de Canal+.

Dans cette oeuvre chorale fantastique, il décrit un monde où les morts, revenus en masse, errent dans les villes, où ils tentent de se réinsérer dans leurs familles et leurs vies d'avant.

Il met ensuite près de dix ans pour réaliser son deuxième film, "Eastern Boys", très bien accueilli, récompensé à la Mostra de Venise dans la sélection Orizzonti et plusieurs fois nommé aux César du cinéma français en 2015.

Il y raconte l'histoire d'un quinquagénaire célibataire, dont la vie se trouve transformée arpès sa rencontre avec un jeune prostitué sans-papiers d'origine ukrainienne. Après avoir été dévalisé par ce jeune homme et sa bande, il va peu à peu développer avec lui une relation intime.

Avec "120 battements par minute", il s'attaque à un sujet "crucial" dans sa vie, les années sida, sur lequel il a toujours voulu faire un film depuis les années 90.

"Je me suis dit qu'il était temps que je me jette à l'eau!", a-t-il expliqué.

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