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Tableaux et virement: des ennuis et des questions pour Claude Guéant

Quand les enquêteurs ont trouvé trace d'un virement en 2008 de 500.000 euros sur son compte, Claude Guéant l'a expliqué par la cession de deux huiles d'un peintre flamand à un avocat malaisien.

Ces explications n'ont pas convaincu les juges qui ont mis en examen l'ancien homme de confiance de Nicolas Sarkozy début mars pour blanchiment de fraude fiscale en bande organisée, faux et usage de faux. Mais l'affaire garde de nombreuses zones d'ombre.

. Que valent ces tableaux ?

. Selon une source proche du dossier, un marchand d'art répond en août 2013 aux juges que son agence d'Amsterdam les a vendus à une société genevoise en 1990 pour environ 48.000 euros. Or, selon l'enseigne, ce marché a peu évolué et chacune de ces œuvres est évaluée entre 20 et 30.000 euros: leur taille est modeste, elles ne sont pas signées, il ne s'agit pas de scènes de batailles navales. Un expert donne une fourchette de 40 à 50.000 euros pour les deux.

"Nous avons versé une expertise montrant que le prix de 500.000 euros pour une vente de gré à gré en 2008 n'est pas du tout aberrant", répond l'avocat de Claude Guéant, Me Philippe Bouchez el-Ghozi.

. Un mystérieux avocat malaisien.

. Le virement de 500.000 euros arrive sur le compte de Claude Guéant le 3 mars 2008, détaille la source proche du dossier. Deux semaines plus tard, il verse 760.000 euros pour acheter son appartement parisien.

Un ordre de transfert avait été signé en sa faveur le 29 février dans une banque de Kuala Lumpur par un avocat malaisien, Rajendram Sivajeth, représentant légal d'une cinquantaine de sociétés. Pour justifier ce virement dans son pays, Rajendram a produit une facture. Mais Claude Guéant ne se souvient pas d'un tel document, qui comporte des anomalies, selon la source proche du dossier. Celle-ci ajoute que Claude Guéant a communiqué un mail envoyé en juillet 2013 par Rajendram avec en pièce jointe des photos des œuvres. Les enquêteurs n'ont jamais pu interroger directement le Malaisien. Début 2014, une assistante de l'avocat leur a raccroché au nez.

. De l'argent saoudien ?

. A la demande des Français, les autorités malaisiennes ont étudié le compte de Rajendram: deux jours avant l'ordre de virement à Claude Guéant, il a été crédité de près de 500.000 euros, versés depuis une banque de Jeddah. Le donneur d'ordre est Khalid Bugshan, homme d'affaires dont le nom est apparu dans une autre affaire politico-financière, le dossier Karachi. Interpellé à son domicile parisien le 5 mars, mis en examen, Khalid Bugshan a invoqué un investissement immobilier en Malaisie. Claude Guéant a assuré aux juges ne pas le connaître.

. L'argent jordanien

Des virements réguliers de 25.000 euros venant de Jordanie ont été relevés. Claude Guéant a expliqué qu'il s'agissait de virements trimestriels reçus en tant que dirigeant du conseil d'orientation d'un fonds d'investissement, la Jordan Dubai Capital, après la défaite de la droite en 2012.

. Un train de vie passé au crible

Les enquêteurs ont relevé que Claude Guéant réglait de nombreuses factures en liquide et retirait peu d'argent de son compte principal, quelques centaines d'euros entre 2003 et 2013. Rien de choquant pour son avocat: "comme des milliers de fonctionnaires du ministère de l'Intérieur, il a reçu des compléments de rémunération sous forme d'enveloppes de liquide au titre des frais d'enquête et de surveillance". Une autre enquête est ouverte sur ces primes perçues par Claude Guéant quand il dirigeait le cabinet de Nicolas Sarkozy place Beauvau entre 2002 et 2004.

Autre interrogation: un coffre loué du 21 mars au 31 juillet 2007 dans une banque, place de l'Opéra à Paris. Selon la source proche du dossier, l'ancien secrétaire général de l'Elysée s'y est présenté sept fois durant cette période de présidentielle. "C'était pour entreposer ses archives personnelles, des notes et des argumentaires pour la campagne et les discours de Nicolas Sarkozy", répond son avocat.

. Quel rapport avec les accusations de financement libyen de Sarkozy?

. Aucun en l'état. Lancée sur ces accusations, l'enquête a conduit aux tableaux. Mais si les 500.000 euros ne sont pas un paiement de ces oeuvres, quelle est leur justification réelle?

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