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Thierry Wolton détricote la pelote rouge

"Tout n'a pas été dit sur le communisme", soutient Thierry Wolton qui publie une monumentale "Histoire mondiale du communisme", plus d'un quart de siècle après la chute du Mur de Berlin et le début de la dislocation de l'empire soviétique.

Deux tomes de plus de 1.100 pages chacun, intitulés respectivement "Les bourreaux" et "Les victimes", publiés chez Grasset, paraissent mercredi en librairie.

Un troisième volume, tout aussi imposant, sur "L'héritage" du communisme est attendu en octobre 2017, "pour le centième anniversaire de la révolution d'Octobre", dit en souriant l'ancien journaliste rencontré à Paris. Au total, dix ans de travail ont été nécessaires pour une rédaction en solitaire des trois ouvrages.

"+Le Livre noir du communisme+ (ouvrage collectif publié en 1997, ndlr) ne s'intéressait qu'au côté répressif du système", affirme l'essayiste. Cette fois l'auteur a voulu s'atteler à une histoire globale de l'idéologie qui s'est appliquée sur un tiers de l'humanité au XXe siècle et n'a épargné aucun continent.

"Mon livre est le premier récit complet de l'histoire du communisme. C'est un livre novateur", insiste-t-il.

Certes, admet-il, les PC sont aujourd'hui "marginaux" et les derniers Etats communistes de la planète sont "en voie de déliquescence et finiront par s'écrouler" mais, ajoute-t-il, "on ne peut penser le monde d'aujourd'hui sans connaître l'histoire du communisme". "Nous vivons toujours dans l'après-communisme", dit-il.

Le style est enlevé malgré une documentation imposante et ces volumes énormes se lisent comme un roman. Ce spécialiste des service de renseignement n'est pas historien mais veut "raconter l'histoire". "Je veux que les gens soient emportés par le récit", dit-il.

- Mise en cause du marxisme -

L'idée de regrouper des thèmes s'avère plutôt judicieuse et permet d'avoir une vue globale sur un événement. Ainsi, dans le tome 2, le chapitre "les affamés" dresse une synthèse atroce des grandes famines en Union soviétique, en Chine mais aussi au Cambodge sous les Khmers rouges, en Corée du Nord ou dans des pays africains dotés de régimes marxistes-léninistes dans les années 1970. Le chapitre (comme la plupart des autres) regorge de témoignages souvent poignants, d'extraits de livres.

Concernant la famine, "on s'aperçoit que ça fonctionnait exactement de la même façon partout", fait remarquer Thierry Wolton.

Il rappelle quelques faits historiques, longtemps tabou, en estimant ainsi que la révolution d'octobre s'apparente davantage à un coup d'Etat qu'à une révolution populaire. Après Soljenitsyne, il confirme que le Goulag n'est pas une invention de Staline mais de Lénine.

A aucun moment le lecteur ne trouvera trace de la moindre compréhension à l'égard de cette idéologie qui, si elle fut meurtrière, a représenté également l'espoir d'un monde meilleur pour des millions de personnes. "Je ne crois pas à l'égalité. Nous ne sommes pas égaux, ce qui fait notre richesse c'est la diversité", tranche Thierry Wolton.

Le ver était dans le fruit dit-il en substance quand il s'en prend non seulement à l'idéologie communiste mais au marxisme.

"Ni Marx, ni Engels ne sauraient être tenus pour responsables de l'usage qui a été fait de leur théorie après leur mort. Peut-on pour autant les exonérer de ce qui advint par la suite en leur nom? Apparemment non", écrit-il dans le tome 1.

"La phrase la plus criminelle de l'histoire est celle inventée par Karl Marx disant: +la lutte des classes est le moteur de l'histoire+", reprend Thierry Wolton au cours de l'entretien. "Au nom de la lutte des classes, des dizaines de millions de personnes sont mortes. Les pays communistes n'ont fonctionné qu'en terme de lutte des classes", déplore-t-il.

Pour expliquer sa façon de penser, Thierry Wolton rappelle que, jeune journaliste (à Libération, puis au Point), il a pu aller "derrière le rideau de fer". "A 25 ans, j'ai pu rencontrer (les dissidents) Vaclav Havel, Adam Michnik, Andreï Sakharov. C'était extraordinaire. Vous rencontrez des gens qui ont compris le système, vous le raconte et vous donne les clés pour le comprendre". "Cela a été ma grande chance".

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