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Traité transatlantique: voici l’idée de la France pour empêcher les multinationales d’attaquer les Etats européens en justice à la légère…

La France envoie ce mardi à la Commission européenne ses propositions pour refondre les mécanismes de règlement des différends entre Etats et investisseurs dans le cadre des futurs accords de libre-échange, a indiqué le secrétariat d'Etat chargé du Commerce extérieur.

La démarche vise à réformer les mécanismes d'arbitrages privés (ISDS). Ces procédures inquiètent nombre de pays européens, qui y voient la porte ouverte à une remise en cause par des multinationales de leurs politiques publiques. Le document, qui affiche notamment l'ambition de "préserver le droit (des Etats) à réguler" et de "créer un nouveau cadre institutionnel", est présenté alors que le Parlement européen se prononcera dans son ensemble le 10 juin sur l'accord entre l'Union européenne et les Etats-Unis (TTIP) en cours de négociation.


Attaquer un Etat pour un changement de loi qui ferait diminuer les profits d’une entreprise devrait être impossible

"La position des Etats a connu une érosion lente mais certaine ces dernières années au profit des droits des investisseurs", constate le gouvernement dans un résumé remis à la presse. "Un investisseur ne peut s'attendre à ce qu'un simple changement de loi qui fait varier, même fortement, ses profits soit un motif suffisant pour attaquer un Etat", stipule le document d'une quinzaine de pages remis à Bruxelles.

Quant à la notion d'expropriation invoquée dans des procédures d'arbitrage, elle doit être "clairement délimitée" et "l'entreprise doit être seule à subir un préjudice spécial et anormal". Les Etats doivent "garder la main sur l'interprétation des traités" et être seuls à lever les ambiguïtés, selon les propositions de Paris.


Si le motif de la plainte d’une société est trop léger, elle devrait payer à l’Etat le double des dommages qu’elle lui réclame...

Contre les plaintes abusives, des sanctions financières allant jusqu'à la moitié des dommages demandés par les investisseurs "pourraient être prévues". "Une entreprise réfléchira à deux fois avant de demander des milliards puisque si cette plainte est jugée abusive, potentiellement cela peut vouloir dire la fin de l'entreprise", a déclaré à la presse le secrétaire d'Etat Matthias Fekl.

Paris propose aussi la création d'une cour permanente publique destinée à intervenir pour tous les traités futurs de l'UE et à préfigurer une cour permanente multilatérale. Celle-ci "réexaminera les sentences proposées par les tribunaux arbitraux, quels qu'ils soient, pour tous les traités futurs de l'UE", indique le résumé du texte. En matière d'éthique, "nous proposons d'encadrer les activités de jugement par une double période ‘de quarantaine’ (5 ans avant, 5 ans après) pour empêcher tout conflit d'intérêt entre ces fonctions et celle d'avocat", a précisé M. Fekl.


Ces cours d’arbitrage où une société peut attaquer un Etat sont le point le moins négociable avec les USA

L'épineuse question des arbitrages, entre autres, pourrait selon lui remettre en cause la conclusion du TTIP, qui serait le plus grand accord commercial du monde, touchant environ 60% de la production économique du globe et un marché colossal de 850 millions de consommateurs. "Je n'imagine pas un traité être soumis au Parlement ou entrer en vigueur sans que les sujets que nous soulevons aient trouvé une réponse", a-t-il déclaré.


"Pas parce qu’une négociation est engagée qu’elle aboutit forcément": le TTIP devra être adopté à l’unanimité par les 28 pays de l’UE!

"Le fond passe avant le calendrier. Je ne suis pas le défenseur ou l'avocat du Traité transatlantique mais des intérêts de la France, qui sont très clairs pour notre industrie, notre agriculture, nos services, nos choix de souveraineté", a-t-il ajouté. "Ce n'est pas parce qu'une négociation est engagée qu'elle aboutit forcément". Une fois que le traité sera rédigé après de longues négociations qui pourraient durer plusieurs années, il devra, pour entrer en vigueur, être adopté à l'unanimité par les 28 gouvernements européens puis ratifié par l'ensemble des parlements.


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