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Trans: le Sénat durcit le changement d'état civil, les associations LGBT dénoncent une "énorme reculade"

Le Sénat a durci les conditions de changement d'état civil pour les personnes trans par rapport à la version adoptée en juillet à l'Assemblée nationale, s'attirant mercredi les critiques des associations LGBT, qui dénoncent une "énorme reculade".

"C'est un vrai retour en arrière", a déploré Catherine Michaud, la présidente de Gaylib, également secrétaire nationale de l'UDI pour les droits LGBT, pour qui le nouveau texte n'est "pas acceptable en l'état".

"Pourtant, la commission des lois du Sénat avait travaillé, elle avait auditionné un certain nombre de personnes, dont des associations trans", a-t-elle remarqué, interrogée par l'AFP.

Le texte de l'Assemblée facilitait le changement d'état civil pour les personnes transsexuelles. Il stipulait que toute personne majeure ou mineure émancipée "qui démontre par une réunion suffisante de faits que la mention relative à son sexe à l'état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue peut en obtenir la modification" devant un tribunal de grande instance.

"Le fait de ne pas avoir subi des traitements médicaux, une opération chirurgicale ou une stérilisation ne peut motiver le refus de faire droit à la demande", précisait-il.

Mais cet amendement, présenté à l'occasion de l'examen en nouvelle lecture du projet de loi Justice du XXIème siècle, a été fortement retoqué par la commission des lois du Sénat, qui souhaite "une procédure mieux encadrée", a justifié le rapporteur Yves Détraigne (UDI-UC).

Faisant valoir que "le changement d’état civil comporte de multiples implications pour le droit des personnes" et "doit être entouré de garanties suffisantes", il a proposé que le juge se prononce "en fonction de critères objectifs, y compris de nature médicale, sans exiger une intervention chirurgicale irréversible, et pas uniquement au vu de la volonté exprimée par la personne".

"L'argument de Détraigne et de (Philippe) Bas (le président de la commission des lois, LR), c'est de dire : +on veut mettre du médical pour votre bien. Mais c'est paternaliste !", a tempêté Sun Hee Yoon, présidente de l'Association commune trans et homos pour l'égalité (Acthé).

Le nouvel amendement, "rétrograde, représente une "énorme reculade" par rapport au texte voté à l'Assemblée nationale, a-t-elle estimé.

"On attendait que le Sénat abandonne ses positions partisanes pour se placer sur le champ de la défense des droits humains. Il n'en est rien", a regretté Clémence Zamora-Cruz, la porte-parole de l'Inter-LGBT, qui s'est dite "en colère".

Le texte tel qu'il est écrit fait revenir les trans à une jurisprudence de 1992, a-t-elle observé. "Quand on a lu l'amendement, on s'est dit : +ils n'ont rien compris !+"

Le texte doit à présent repartir pour une ultime lecture devant les députés qui auront le dernier mot et qui devraient rétablir leur version.

En France, on estime à entre 10.000 et 15.000 le nombre de personnes ayant engagé ou achevé un parcours de transition sexuelle, affirment les défenseurs de la mesure.

Alors que leur droit à modifier la mention de leur sexe à l'état civil est garanti par la CEDH depuis près de 25 ans, rien n'est prévu dans la loi et la Cour de cassation a adopté une jurisprudence contraire aux recommandations de la Halde, de la CNCDH, et du Conseil de l’Europe.

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