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Triple meurtre de Bozel: 20 ans de réclusion pour Jordan Lenisa

Argent, folie ? Les motivations qui ont poussé Jordan Lenisa à tuer son père et ses deux frères restent floues à l'issue de son procès devant la cour d'assises de la Savoie, qui l'a condamné à 20 ans de réclusion criminelle.

Le jeune homme a également été reconnu coupable de tentative d'assassinat de sa mère. La cour a assorti la peine d'une période de sûreté de 13 ans.

"J'ai la conviction, Jordan Lenisa, que vous auriez tué toute votre famille si les circonstances s'y étaient prêtées", a lancé l'avocat général Jacques Dallest durant ses réquisitions, en décrivant un "dossier qui nous confond d'horreur et d'incompréhension".

Le magistrat avait requis 30 ans de réclusion criminelle, et une peine de sûreté de 20 ans, après avoir hésité à requérir la réclusion criminelle à perpétuité. Il y avait renoncé compte tenu du jeune âge (27 ans) et des "troubles psychiques" de l'accusé.

Le 26 juillet 2012 à Bozel (Savoie), alors âgé de 23 ans, Jordan Lenisa a tué son frère Benjamin, 17 ans, d'une balle dans la tête, et son petit frère Victor, qui allait fêter ses huit ans le lendemain. Il a ensuite attendu le retour de son père, Florent, 49 ans, pour le tuer lui aussi.

Après ces trois premiers meurtres, le jeune homme s'en était pris à sa mère, tentant de l'étrangler, de l'étouffer avec des coussins et de l'assommer à coups de bûche, avant qu'elle ne parvienne à s'échapper.

L'accusé ne nie pas les faits, si ce n'est qu'il assure ne pas avoir voulu tuer sa mère, mais seulement la faire fuir. Les motifs de ses actes restent cependant un mystère au terme de quatre jours d'audience: les déclarations de Jordan Lenisa, menteur invétéré, n'ont pas permis d'y voir plus clair.

A l'audience, il a ainsi affirmé avoir tué son père par "haine" parce qu'il le "rabaissait tout le temps" puis avoir "entendu une voix" qui lui disait de tuer aussi ses deux frères.

- "J'ai pas tué pour l'héritage" -

Pour sa mère et sa sœur, il n'y pas de doute: Jordan a agi "pour l'argent" car "il en voulait toujours plus". La famille, très aisée, possédait deux Ferrari, et Jordan, garçon flambeur et oisif, avait à de nombreuses reprises montré son intérêt pour l'héritage familial.

S'il conteste avoir voulu tuer sa mère, c'est pour pouvoir toucher l'héritage, a même assuré Me Christophe Cossonnet, avocat de la famille. "S'il est condamné pour tentative d'assassinat sur sa mère, il sera frappé d'indignité successorale, il ne pourra pas toucher les millions: c'est pour cela qu'il conteste", a-t-il lancé.

"J'ai pas tué pour l'héritage", s'est défendu Jordan, tout en reconnaissant s'être renseigné sur le sujet sur internet.

"Le rapport à l'argent est sans doute ce qu'il y a de plus trouble dans ce dossier", a reconnu l'avocat général. Mais pour lui, "les raisons profondes de l'acte" sont "psychologiques évidemment", a-t-il estimé, citant un "sentiment d'abandon" ou "la rivalité avec les frères".

"Si ce garçon était capable de verbaliser ce qu'il s'est passé, croyez-vous qu'il aurait commis ces crimes?", s'est interrogée Me Florence Vincent, avocate de l'accusé, face aux demandes d'explications des parties civiles.

"Ce serait nier ses troubles de la personnalité", a-t-elle ajouté, rappelant que le jeune homme était "à la crête de la schizophrénie", les experts ayant décrit une "personnalité schizoïde".

"Il n'est pas fou, il est atteint de troubles psychiques qui ont altéré son discernement", a d'ailleurs souligné M. Dallest. La cour a d'ailleurs pris en compte cette altération du discernement dans son verdict.

Pendant tout son procès, le jeune homme est apparu le regard noir, le teint blafard et la posture figée, s'enferrant souvent dans ses contradictions. Sa froideur face à son ex-petite amie en larmes, qui l'accusait de viol et d'agression, a particulièrement marqué les débats.

Jeudi soir, avant que la cour ne se retire, il a "demandé pardon" à sa mère et sa sœur "pour le mal" qu'il leur a fait.

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