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Une journée avec les migrants qui doivent quitter Calais: "Je pense qu'ailleurs, ce sera mieux que la jungle"

Quelque 2.318 migrants ont été "mis à l'abri" au premier jour de l'opération d'évacuation de la "Jungle" de Calais, a annoncé lundi le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve.

Sur un total de 2.318 migrants évacués de la jungle de Calais, "1.918 ont quitté la zone à bord de 45 bus pour rejoindre 80 centres d'accueil et d'orientation (CAO) situés dans onze régions de France", a affirmé le ministre dans une déclaration à la presse. Quatre cents mineurs ont pour leur part été "orientés au centre d'accueil provisoire", situé sur le campement, dans l'attente de l'instruction de leur dossier.

L'évacuation totale de la "Jungle" de Calais a démarré dans le calme et sur un rythme soutenu, avec le départ d'une quarantaine de cars lundi en milieu d'après-midi, mais le flux s'est nettement ralenti ensuite, alors que le plus grand bidonville de France, peuplé de 6.000 à 8.000 migrants, doit être vidé d'ici la fin de semaine.


A 16h00, 1.631 avait déjà quitté les lieux

A 16H00, 39 cars transportant 1.631 personnes étaient partis du camp, a indiqué à l'AFP la préfecture du Pas-de-Calais. La préfète, Fabienne Buccio, assurait même: "On fera les 60 bus prévus aujourd'hui", soit 2.000 personnes environ. Selon le porte-parole du ministère de l'Intérieur Pierre-Henry Brandet, ce nombre ne devrait pas être atteint, mais la population évacuée sur cette seule première journée sera "supérieure" à 2.000 personnes. Peu avant 16H00, le flux s'est en effet brutalement amenuisé et plus aucune queue à l'extérieur du centre de transit n'était visible. Des candidats au départ auraient reporté de 24 ou 48 heures leur embarquement. "On leur a répété que des départs s'effectueraient demain (mardi) et mercredi"..., expliquait la préfecture. La densité de la foule présente à la mi-journée aurait aussi dissuadé des migrants de s'attarder plus longtemps.


Les Oromos ont brandi les couleurs de leur ethnie

Ce temps mort n'en a rendu que plus visible la marche entreprise par une petite centaine d'Éthiopiens de l'ethnie oromo, très politisée, pour célébrer son départ de la "Jungle". Aux cris de "oromo, free Oromia" les manifestants ont quitté la Jungle à pied pour rejoindre le hangar ou les attendaient des bus, en agitant des drapeaux aux couleurs de leur ethnie, les poings croisés au dessus de la tête.

Ces quelque 80 Oromos, qui vivaient dans la zone nord du bidonville près du centre Jules Ferry, se sont ensuite séparés en 2 groupes pour le départ.


D'autres ont crié "Bye Bye Jungle!"

Bien avant le lever du jour, une centaine de migrants, essentiellement des Soudanais, attendait déjà patiemment devant l'entrée. Une heure plus tard, à la sortie de la "Jungle", un groupe de migrants quittait les lieux avec sacs et valises en criant "Bye, bye, Jungle!" Puis la foule a rapidement grossi et, vers 11H00, la file d'attente atteignait 200 m de long. Un premier autocar transportant 50 Soudanais a pris la route de la Bourgogne vers 08H45. Soit trois quarts d'heure seulement après l'ouverture, devant quelque 500 migrants, du centre de transit installé à 300 m du camp.

45 autocars sont programmés mardi et 40 mercredi, à destination des Centres d'accueil et d'orientation (CAO), au nombre de 451.

"C'est un moment historique, parce que je crois qu'enfin (les migrants) vont pouvoir construire leur avenir d'une meilleure façon", a déclaré la préfète du Pas-de-Calais Fabienne Buccio, chef d'orchestre de l'opération.


Une évacuation calme

Malgré des bousculades et querelles entre migrants en fin de matinée, l'évacuation se déroule "pour l'instant dans le calme et la maîtrise", a commenté le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve. "L'objectif est de procéder à la mise à l'abri de ceux qui relèvent du statut de réfugié en France et qui n'ont pas vocation à être dans la précarité, dans la vulnérabilité à Calais", a-t-il rappelé.

Quelque 1.250 policiers et gendarmes sont mobilisés à Calais pour veiller à la sécurité de ce méga-transfert: éviter les mouvements de foule, mais aussi empêcher de nuire les militants ultragauche de No Border, partisans de l'abolition des frontières.


Quatre files, puis, la désignation d'un lieu

Les candidats au départ sont répartis en quatre files: adultes seuls, familles, personnes vulnérables et mineurs. Ils doivent décliner nom, prénom, date de naissance et nationalité, mais il n'y a aucun examen de la situation administrative de chacun. A l'entrée du Centre d'accueil provisoire (CAP) jouxtant la "jungle", plusieurs centaines de mineurs attendaient le départ des migrants majeurs pour obtenir une place. Ils ne sont pas concernés par l'évacuation et vont être hébergés au CAP, constitué de conteneurs, et au centre Jules-Ferry.

Ce n'est pas la voie qu'empruntera Mohammed, un Yéménite de 17 ans, orphelin de père et dont la mère vit en Erythrée. Il explique vouloir passer en Grande-Bretagne: "J'ai une soeur là-bas. Je ne l'ai pas vue depuis huit ans. Je l'appelle pour les fêtes, le ramadan... Je veux partir. Je suis passé par Paris, ici c'est mieux même si la vie reste difficile".


La maire de Calais est sceptique

La maire de Calais, Natacha Bouchart (Les Républicains), s'est dite "perplexe" sur le démantèlement. "Nous n'avons aucune garantie, aucun dispositif pour nous confirmer qu'il n'y aura plus ces difficultés par lesquelles nous passons depuis maintenant trois ans", a-t-elle soutenu.

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