Accueil Actu

"Je ne le referai plus", écrivait un homme à sa femme à Raquel après l'avoir battue: cinq semaines plus tard, il la tuait

Au total, 25 lettres, mails et SMS envoyés par des hommes battant leurs compagnes sont reproduits dans un ouvrage intitulé "Ne meurs pas pour moi", lancé sur internet par l'ONG Vida Mujer et l'agence Circus Grey. "Tu es l'amour de ma vie. PARDONNE-MOI", assurait encore le fiancé de Raquel.

Dans le livre "Ne meurs pas pour moi", les phrases du type "je ne le ferai plus" ou "je te jure que je ne suis pas comme ça" se répètent inlassablement. Tout comme ces agresseurs répètent ensuite leurs gestes violents.


Les femmes ne portent pas plainte

"Il a été difficile d'arriver jusqu'à ces femmes maltraitées, car elles ne portent pas plainte", explique à l'AFP la directrice de l'ONG, Nelly Cancion.

Préfacé par le prix Nobel de littérature péruvien Mario Vargas Llosa, le livre est divisé en deux parties : la première moitié est blanche, remplie de lettres d'amour et de pardon, mais la seconde moitié est noire et raconte ce qui s'est vraiment passé, une fois que la victime a reçu cette lettre.


De la maltraitance au meurtre

En général, la maltraitance reprenait. Dans certains cas, cela allait jusqu'au meurtre. En publiant ainsi les mots doux démentis par la réalité, l'ONG veut éveiller les consciences, l'ouvrage se terminant par la formule : "Si tu t'identifies à ces femmes, n'attends pas de terminer comme elles." 
Il a été publié en ligne (www.notemueraspormi.com) pour en assurer la diffusion la plus large possible. "Les femmes que nous recevons vivent presque toutes un conflit entre quitter ou non leur compagnon, bien qu'elles vivent une situation de violence extrême. C'est ce qu'illustre le livre. Après la lettre, vient la partie sombre qu'elles doivent vivre", dit Nelly Cancion.


"Cela ne se passera plus jamais"

Au Pérou, ces six dernières années, 680 cas de violences conjugales ayant conduit à la mort ont été enregistrés selon le ministère de la Femme et des Populations vulnérables.

Sur la période 2013-2014, le Pérou a été le deuxième pays d'Amérique latine, après la Colombie, en nombre de femmes tuées sous les coups de leur compagnon, selon la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (Cepal).

"Tu sais que je t'aime, même si je me suis trompé, cela ne se passera plus jamais", assurait Giankarlo - "celui qui t'aime le plus au monde" - à son épouse Andrea. Quelque temps plus tard, il lui fracassait le crâne avec une caisse à outils. "Je vais changer parce que je t'aime et je n'aime pas te voir ainsi. J'ai seulement besoin de ton aide et de ta compréhension dans certains cas", écrivait le mari de Valeria. Elle se cache aujourd'hui dans une auberge avec ses filles et reçoit un traitement psychologique.


"Je suis devenu fou"

"Ce que je voulais, c'est que tu te rendes compte que tu es ma femme. Je suis devenu fou à l'idée que tu pourrais partir avec un autre. Je suis devenu fou et j'ai perdu le contrôle, mais je sais que ça n'arrivera plus", promettait Victor à Carla.

Un an plus tard, elle est tombée enceinte et il l'a frappée tellement fort qu'elle a avorté. Elle ne peut plus avoir d'enfants. "A un moment donné, ces "je t'aime, j'ai besoin de toi, je fais de mon mieux" plaisent à la femme qui est en souffrance. Ce sont de petites lueurs de bonheur et de plaisir, mais la conduite de l'être humain reste la même avec le temps", note Nelly Cancion. Et ce sont justement ces mots doux qui font que, dans de nombreux cas, les victimes ne portent pas plainte.

L'ONG Vida Mujer travaille à un deuxième ouvrage, qui détaillera les cadeaux accompagnant souvent ces lettres. Un ours en peluche, un collier ou même une bague de fiançailles, en plus de la promesse de suivre une thérapie.

À la une

Sélectionné pour vous