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Attentats: le dénuement des proches ou comment leur venir en aide

D'abord des textos "étranges", puis le chauffeur de taxi: "Madame, vous n'êtes pas informée? Il y a eu une fusillade à Charlie Hebdo!" Ce 7 janvier au matin, la "panique" s'empare de Maryse Wolinski, la femme du dessinateur, tué dans l'attentat contre le journal satirique.

Emmitouflée dans un épais manteau noir, le regard parfois dans le vague, elle raconte son histoire à l'Hôtel de Ville de Paris, devant des dizaines de personnes, à l'occasion des 20 ans de la Fédération nationale des victimes d'attentats et d'accidents collectifs (Fenvac), pour témoigner de l'importance des associations dans ces drames.

"J'ai rencontré des personnes qui peut-être m'ont aidée, déjà, au bout de ces trois terribles semaines, à évacuer le chaos qui s'est installé en moi", assure-t-elle.

Le 7 janvier, jour de la mort de son mari avec 11 autres personnes, de nombreux amis -"qui n'avaient pas appelé depuis longtemps"- lui ont envoyé des SMS pour savoir "comment allait Georges".

Mais 23 jours plus tard, c'est à la Fenvac et à deux inconnus qu'elle pense: un psychiatre "venu en urgence" chez elle "le jour-même", puis une psychologue, qui la poussera à aller voir la dépouille de son mari, ce qu'elle hésitait à faire.

"Tout au long de ce parcours, je n'ai rencontré que des gens fraternels", assure-t-elle. "Si nous continuons à être fraternels, peut-être que nous pourrons lutter contre ces terroristes."

A ses côtés se tient Sandrine Tricot, présidente de l'association AH-5017-Ensemble, qui regroupe les proches des victimes du crash d'Air Algérie en juillet au Mali.

L'avion a quitté les radars depuis déjà 13 heures quand elle découvre la catastrophe, au travail, "en passant de manière fortuite devant un poste de télévision".

- 'Les bras ballants' -

Le soir-même, elle explique à sa fille de 11 ans, "toute seule", que "l'avion de son père a disparu" et qu'elle ne sait pas "s'il est vivant ou mort".

"Quelle prise en charge nous a été apportée? Aucune pendant 48 heures", regrette-t-elle, jusqu'à ce que la Fenvac et le procureur de la République se manifestent.

Jean-Pierre Verdon dresse le même constat. Il est le père de Philippe Verdon, enlevé en 2011 au Mali, avec Serge Lazarevic -libéré depuis- par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et assassiné deux ans plus tard.

Il dit être resté "les bras ballants", "dans l'ignorance totale" de ce qu'il pouvait faire. "Il faut être capable de tirer de sa propre substance les moyens de faire face", témoigne-t-il, insistant sur le rôle "extrêmement efficace" des associations qui sont ensuite venues l'épauler.

"Ce sont des psychologues sans le savoir", estime le vieil homme.

L'Etat devrait selon lui "dire aux victimes qu'il existe des associations". Il demande aussi à la Fenvac de réaliser "un vadémécum" pour les familles: "ce que vous devez savoir et ce que nous pouvons faire pour vous aider".

Le procureur de la République de Paris, François Molins, écoute attentivement ces témoignages. Il rappelle l'existence de magistrats référents pour les victimes et se félicite de la création prochaine à Paris et à Marseille de pôles judiciaires spécialisés dans les accidents collectifs -"une excellente chose".

Il jette aussi un regard critique sur la manière dont les familles ont été prises en charge ces trois dernières semaines, concédant des "problèmes d'articulation" et "des susceptibilités institutionnelles".

Son idée, en cas d'attentat ou de catastrophe: la désignation d'un policier "déchargé des tâches d'enquête". Sa "seule mission" serait "d'aller à la pêche aux renseignements" pour "établir une liste des victimes" et de leurs proches.

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