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Cinéma: "Clash", huis clos sur la chute de l'ex-président égyptien Morsi

Une heure trente-sept à l'étroit dans un fourgon de police, bringuebalé dans les rues du Caire en proie aux violences: "Clash" de l'Égyptien Mohamed Diab, en salles mercredi, est une chronique de son pays après la chute du président islamiste Mohamed Morsi.

Ne pas se faire confisquer l'unique téléphone portable qui les relie à l'extérieur, partager l'eau dans la fournaise, ou tout simplement rester vivant sous les balles et les jets de pierre: les personnages sont condamnés à s'entendre pour s'en tirer.

Remarqué en 2012 pour "Les filles du bus 678", qui s'attaquait au tabou du harcèlement sexuel dans les rues du Caire, Mohamed Diab revient avec un film qui mêle habilement comédie, drame et thriller.

Sans s'interdire des emprunts au film de guerre voire à la science-fiction, lorsque la caméra capte les centaines de rayons lasers brandis par les manifestants.

"J'ai fait de mon mieux pour ne pas donner de réponses faciles (...) Personne n'est bon, personne n'est mauvais, nous sommes tous des nuances de gris", a expliqué à l'AFP le réalisateur, engagé dès le début en 2011 de la Révolution qui aboutira à la chute du régime d'Hosni Moubarak, du côté des jeunes activistes.

L'action se déroule deux ans après. Le président élu, Mohamed Morsi, un islamiste, vient d'être démis par l'armée, manifestations et émeutes violemment réprimées se succèdent. Le pays se divise.

- Humour et désespoir -

Dans le film, que Mohamed Diab a écrit avec son frère, même les policiers du régime, seuls à faire l'unanimité (contre eux) parmi les occupants du fourgon, se révèlent peu à peu dans leurs contradictions et leur humanité.

"Je n'aime pas l'idéologie des Frères Musulmans, mais si quelqu'un condamne la violence et est pacifique, je n'ai pas de problème avec lui", a précisé Mohamed Diab à l'AFP au dernier Festival de Cannes, où "Clash" était présenté dans la section parallèle Un certain regard.

"Dans le film aussi, certains sont pacifiques, certains deviennent violents parce que des choses mauvaises leur arrivent, d'autres quittent la confrérie. C'est exactement ce qui arrive maintenant", en Egypte, pointait-il alors.

Le tournage de "Clash", alors même que les rues du Caire étaient la proie à de violentes manifestations, n'a pas été de tout repos: certains figurants se sont mis à se battre pour de vrai, des passants ont cru à de vraies scènes de violence et ont rebroussé chemin...

Le film a été tourné en 26 jours, avec tous les acteurs présents dans un espace de huit mètres carrés.

"Ces trois dernières années", depuis le début du tournage, "il y a eu des changements mineurs, mais globalement ce qu'il se passe en Egypte reste la même chose. Le film décrit exactement ce qui arrive en Egypte aujourd'hui" sous la présidence de Abdel Fattah al-Sissi, affirmait le réalisateur de 38 ans à Cannes.

L'humour teinté de désespoir face à l'autoritarisme et à l'islamisme n'est pas sans rappeler "Mustang" (2015) de la Franco-Turque Deniz Gamze Ergüven, ode à la liberté de cinq sœurs en Anatolie, ou "Wadjda", premier long métrage jamais tourné par une cinéaste saoudienne, Haifaa Al-Mansour (2012).

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