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Colombie: dans le berceau des Farc pour leur dernier anniversaire

Dans ces montagnes de Colombie où sont nées les Farc il y a 53 ans, Miguel Angel Pascuas, l'un de leurs fondateurs, est revenu célébrer le dernier anniversaire en armes de cette guérilla désormais sur le chemin de la paix.

Le légendaire "sergent Pascuas", aujourd'hui âgé de 76 ans, a pour la première fois depuis plus de 30 ans remis le pied à Marquetalia, là où, à l'issue d'une insurrection paysanne, ont été fondées le 27 mai 1964 les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes).

Dans cette localité de la commune de Planadas, au coeur de la Colombie, près d'une centaine d'universitaires, paysans et guérilleros ont fêté l'anniversaire de la plus ancienne guérilla des Amériques, qui en novembre dernier a signé un accord de paix historique avec le gouvernement du président Juan Manuel Santos pour mettre fin à plus d'un demi-siècle de confrontation armée.

"Les choses ont déjà commencé à changer. La paix nous arrive. Nous nous sommes dit, bon, c'est mieux la paix", a déclaré à l'AFP cet homme aux cheveux blancs et au ton posé, qui a été l'un des représentants des Farc aux pourparlers menés pendant quatre ans à Cuba.

Encore chaussé de godillots, mais vêtu en civil, d'un pantalon bleu et d'un T-shirt blanc orné du portrait de Manuel Marulanda alias "Tirofijo", fondateur et chef des Farc jusqu'à sa mort présumé naturelle en 2008, le vieux guérillero a raconté aux participants de l'événement l'histoire de la rébellion.

Miguel Angel Pascuas avait à peine plus de 20 ans lorsqu’au sein d'un groupe de 48 hommes et quatre femmes, il a affronté une offensive de l'armée, ordonnée par le président conservateur de l'époque, Guillermo Leon Valencia, contre ce qui était alors qualifiée de "république indépendante" d'influence communiste.

- 'Il vaut mieux parler' -

"Les avions sont arrivés, mitraillant et bombardant", a rappelé le vieux sergent des Farc, qui avait rejoint les insurgés à la demande de Marulanda lui-même, alors poursuivi par les militaires pour avoir tenté d'organiser les paysans qui réclamaient des terres.

De ces combats, il ne reste que des souvenirs et la carcasse d'un hélicoptère, marquée d'impacts de balles, que les guérilleros affirment avoir abattu et qui symbolise selon eux "la première" incursion des Etats-Unis dans la complexe guerre interne colombienne.

"C'est significatif de nous retrouver avec cette histoire, juste ici où ce conflit a commencé, au bout du monde pourraient dire les gens qui viennent d'ailleurs", a estimé la commandante guérillera Victoria Sandino.

A l'issue de plusieurs jours de combat, les paysans avaient fui vers le département du Cauca (ouest). Cette marche épique de 12 jours verra naître la plus puissante guérilla du pays, qui a compté plus de 20.000 combattants et est considérée comme responsable de milliers de morts, d'enlèvements et de déplacements, mais désormais engagée dans un processus de reconversion en mouvement politique légal.

"Le processus me paraît bien, mais pas facile pour autant", a estimé le sergent Pascuas, qui a été à la fin des années 1970 commandant du Sixième front des Farc, qui opérait dans le Cauca, l'une des régions les plus marquées par un conflit qui, au fil des décennies, a impliqué une trentaine de guérillas, des paramilitaires et les forces armées, faisant au moins 260.000 morts, plus de 60.000 disparus et quelque sept millions de déplacés.

Comme nombre des près de 7.000 guérilleros actuels des Farc, regroupés dans 26 zones du pays pour y déposer leurs armes sous supervision de l'ONU avant le 1er juin - échéance qui pourrait cependant être retardée - le mythique sergent Pascuas craint que le gouvernement ne tienne pas ses engagements.

"Il vaut mieux parler et qu'il n'y ait pas de violence", a néanmoins assuré ce guérillero, sûrement le plus vieux de Colombie et qui, après 53 ans de rébellion, se déplace aujourd'hui sans armes.

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