Accueil Actu

La Colombie doit concrétiser l'accord de paix conclu avec les Farc

Les Colombiens, qui ont salué, certains avec scepticisme, la paix enfin conclue avec la guérilla des Farc pour mettre fin à plus d'un demi-siècle de conflit armé, vont devoir se prononcer sur cet accord historique lors d'un référendum le 2 octobre.

"Aujourd'hui, la guerre se termine", a lancé le président Juan Manuel Santos qui jeudi doit transmettre au parlement le texte de cet accord en six points, scellé la veille au terme de près de quatre ans de pourparlers avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes).

Un peu partout dans le pays, de nombreux Colombiens sont sortis dans les rues jusque tard mercredi soir, brandissant le drapeau national bleu, rouge et jaune, ou des ballons ornés du simple mot "Oui" pour manifester leur soutien à la paix.

"Difficile de croire que l'on peut vivre assez pour voir de telles choses, historiques pour le pays", s'est émue Marcela Cardenas, une employée de 24 ans. Elle n'a connu son pays qu'en guerre et ne cache pas ses doutes quant à la "transformation" à venir, craignant "quelque chose de plus difficile que ce que nous avons déjà vécu".

"La négociation terminée et l'accord conclu, il vous revient, à tous les Colombiens, de décider par votre vote si vous appuyez cet accord historique qui met fin à ce long conflit entre enfants d'une même nation", a averti le chef de l'Etat.

Pour que l'accord soit entériné par les électeurs, il suffira que 13% votent "oui", soit 4,4 millions, et que le "non" recueille un score plus faible. La question exacte qui sera posée n'est pas encore connue.

En cas d'échec, "je ne crois pas qu'il y ait un espace pour renégocier, pour ouvrir de (nouveaux) pourparlers, après une expérience de quatre ans ici avec les Farc, c'est le moment de décider", a estimé jeudi à La Havane le chef de la délégation gouvernementale aux négociations, Humberto de la Calle.

Selon lui, l'accord définitif devra être signé par le président colombien et le chef suprême des Farc Timoleon Jimenez, dit "Timochenko", avant ce référendum qui doit permettre sa mise en application.

-De nombreux défis à relever-

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a félicité les négociateurs pour leur persévérance, soulignant toutefois qu'"un effort tout aussi déterminé et exemplaire va être nécessaire pour appliquer les accords", selon un communiqué daté de New York.

"Grâce à la force et à la volonté du peuple colombien, la Colombie d'aujourd'hui avance vers un futur d'optimisme et d'espoir", a salué à Washington le président américain Barack Obama.

"De nombreux défis restent à relever pour l'application de l'accord, qui devra aplanir le chemin pour une paix durable dans le pays, basée sur la justice et une authentique réconciliation nationale", a averti de son côté la Haute représentante de l'Union européenne Federica Mogherini, dans un communiqué depuis Bruxelles.

Tous les Colombiens ne voient pas d'un bon oeil ce qui a été négocié avec la principale guérilla du pays, issue en 1964 d'une insurrection paysanne. Notamment une partie de l'opinion emmenée par l'ex-président Alvaro Uribe (2002-2010) qui estime que l'accord ouvre la voie à l'impunité de crimes atroces commis par les guérilleros.

Mais pour l'analyste Jorge Restrepo, du Centre de ressources pour l'analyse des conflits (Cerac), cet accord offre "une grande opportunité pour que la Colombie puisse enfin s'occuper des problèmes de politique publique qui ont été occultés par le grave problème du conflit armé", dans ce pays miné aussi par le trafic de drogue, les inégalités sociales et la corruption.

Le processus de paix, après trois échecs en 1984, 1991 et 1999, prévoit des mesures agraires, un programme de substitution des cultures illicites, sources de financement des groupes armés, et la participation des guérilleros démobilisés à la vie politique. Il établit aussi des mécanismes de réparation pour les victimes du conflit qui a fait au moins 260.000 morts, 45.000 disparus et 6,9 millions de déplacés, ainsi qu'une juridiction de paix apte à condamner les crimes les plus graves.

Mais avant tout, les quelque 7.500 guérilleros devront se rassembler dans 31 zones déterminées de Colombie pour rendre les armes, sous la supervision de l'ONU, un processus prévu sur six mois.

À la une

Sélectionné pour vous