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Entre Donald Trump et Justin Trudeau, l'alliance improbable

Si Donald Trump exprime son indifférence, voire sa colère, à l'égard de certains dirigeants étrangers, le Premier ministre progressiste canadien Justin Trudeau a contre toute attente noué une alliance plutôt improbable avec le président républicain.

Qualifié d'"anti Trump" par les journaux allemands lors de sa visite en février à Berlin, Justin Trudeau a fini par convaincre, y compris la frange la plus à gauche des Canadiens, de son engagement à poursuivre la collaboration avec le voisin américain afin de protéger les intérêts économiques et sécuritaires du Canada.

Justin Trudeau arrive par petites touches à se démarquer de propos polémiques du président américain tout en tissant des liens avec la nouvelle administration américaine et sans aucun dommage pour sa cote de popularité.

"C'est une relation fascinante", explique Ian Capstick, ancien conseiller politique à la tête de Media Style, une société spécialisée dans la stratégie.

"Je ne sais pas si j'appellerais ça une relation privilégiée mais je dirais plutôt que c'est le début d'une relation fructueuse."

Donald Trump avait encensé Justin Trudeau lors de leur première rencontre à Washington et, par deux fois, il a fait l'éloge du Canada à l'occasion de son discours sur l'état de l'Union au Congrès.

"Les États-Unis sont particulièrement chanceux d'avoir un voisin comme le Canada", avait-il lancé aux côtés de Justin Trudeau à la Maison Blanche.

Avec des économies fortement intégrées, le Canada et les États-Unis partagent la plus longue frontière terrestre au monde, une histoire et une culture communes.

Pour garantir ces liens, Justin Trudeau a dépêché ses ministres les plus importants à Washington.

En coulisses, l'ancien Premier ministre conservateur Brian Mulroney a joué les intermédiaires grâce à son amitié avec Donald Trump. Mi-février, en voisin, M. Mulroney a poussé la chansonnette dans la luxueuse résidence de Trump de Mar-a-Lago.

"Tous les Libéraux ne doivent pas apprécier Mulroney mais ils admettent qu'il semble être compétent pour tisser des liens avec les hommes politiques américains", confie à l'AFP l'ancien stratège du Parti libéral Tim Powers.

- Un flirt risqué -

Certes, certains "aimeraient que Justin Trudeau dénonce le comportement et les déclarations de Donald Trump" comme par exemple, dit-il, sur les femmes ou les musulmans.

Le Premier ministre a fait preuve de "sagesse en se retenant de critiquer" le candidat Donald Trump pendant la campagne "comme d'autres dirigeants ont pu le faire".

"Habilement, (Trudeau) ne laisse pas les points d'achoppement idéologiques" interférer avec sa relation avec Donald Trump, reconnait Ryan Hurl, professeur de sciences politiques à l'université de Toronto.

Justin Trudeau a pris la mesure des différences de points de vue avec Donald Trump. "Nous ne seront pas toujours d'accord sur tout", avait-il prévenu à Washington.

Mais, "la dernière chose que veulent les Canadiens, c'est que je donne des leçons sur la manière dont les autres pays se gouvernent", avait-il ajouté, Justin Trudeau préférant plutôt "être un exemple positif dans le monde".

La popularité de Justin Trudeau reste, après 16 mois au pouvoir, à des niveaux rarement observés au Canada, selon les sondages d'opinion.

Faire la cour à Donald Trump demeure toutefois un exercice risqué.

"Difficile de prédire ce qui peut offenser Donald Trump", estime Robert Bothwell, professeur à la Munk School de Toronto.

"Ça peut arriver à n'importe qui et Justin Trudeau n'a pas de baguette magique pour se prémunir contre ce genre de situation."

Côté américain, Donald Trump "semble croire que Justin Trudeau jouit d'un capital politique qui peut lui être utile", selon Tim Powers.

"Justin Trudeau a bonne presse dans différentes parties de la planète et, pour certains partenaires occidentaux, sa bonne entente avec Trump" peut servir ce dernier, dit-il.

A l'inverse, selon Ian Capstick, "si le président Trump devenait trop agressif à l'encontre du Canada, Justin Trudeau pourrait bénéficier du soutien de l'ensemble du monde progressiste et créer ainsi des problèmes majeurs au président américain".

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