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Hong Kong, une ville divisée, 20 ans après la rétrocession

C'est une ville divisée et inquiète pour son avenir que Xi Jinping visitera cette semaine, pour la première fois en tant que président chinois, à l'occasion des cérémonies du vingtième anniversaire de la rétrocession de Hong Kong.

Voilà 20 ans que l'Union Jack a été abaissé sous les yeux du Prince Charles sur ce territoire, qui était une colonie britannique depuis la fin de la première guerre de l'opium en 1842.

En vertu du principe "Un pays, deux systèmes", Hong Kong bénéficie en théorie jusque 2047 de libertés inconnues en Chine continentale. Mais de nombreux Hongkongais ont le sentiment que Pékin est en train de renforcer son emprise politique sur cette "région administrative spéciale", et que ses libertés sont menacées.

La visite trois jours de M. Xi, qui débutera jeudi au milieu d'un très important dispositif de sécurité, sera l'occasion pour les adversaires de Pékin de manifester ces inquiétudes. Elle culminera par l'investiture samedi de la nouvelle chef de l'exécutif local, Carrie Lam.

Pour Joshua Wong, figure des manifestations pro-démocratie massives qui avaient paralysé Hong Kong pendant des semaines en 2014, le territoire d'un millier de kilomètres carrés est à un tournant.

"Le caractère unique de Hong Kong et le statut politique de ma ville sont menacés", dénonce à l'AFP l'étudiant de 20 ans, en exigeant qu'un référendum soit organisé sur la souveraineté du territoire en 2047, quand expirera l'accord sino-britannique régissant la transition.

Les appels à l'autodétermination, voire à l'indépendance, se sont multipliés dans la foulée de l'échec du "Mouvement des parapluies" de 2014.

-'Disparitions' de libraires-

"Ce que nous voulons, c'est que tout le monde ait le droit de décider par référendum de l'avenir de la ville", poursuit le secrétaire général du parti Demosisto.

Avant 1997, ni Londres ni Pékin n'avaient sondé les Hongkongais sur la rétrocession.

La ville du Delta de la rivière des perles jouit sur le papier depuis 20 ans de privilèges uniques par rapport à la Chine continentale, comme la liberté d'expression, un système judiciaire indépendant ou encore une dose de suffrage universel dans la désignation de son organe législatif.

Mais plusieurs incidents sont venus renforcer les craintes de certains quant à l'attitude de la Chine, et notamment la "disparition" en 2015 de cinq libraires, connus pour publier des titres salaces sur les dirigeants chinois. Ils avaient ensuite refait surface sur le continent.

Il y a également eu la disqualification de députés indépendantistes à l'automne.

L'ancienne ministre de la Sécurité Regina Ip, figure du camp pro-Pékin haïe par les démocrates, estime de son côté que le système semi-autonome "tient bon".

Felix Chung, chef du Parti libéral (pro-Pékin), estime aussi que la croissance économique de Hong Kong est plus forte aujourd'hui que ce qu'elle aurait été si la ville était demeurée une possession de la Couronne.

"Le gouvernement central nous donne beaucoup de libertés", assure-t-il.

-'Inacceptable' sans Pékin-

Mme Ip pense également qu'il y a beaucoup à faire pour rapprocher les différents camps politiques hongkongais. Mais les compromis, en face, sont aussi nécessaires, indique-t-elle.

"Si la démocratie qu'ils demandent implique une rupture avec Pékin, c'est un point de départ inacceptable", a-t-elle dit.

Carrie Lam a promis d'oeuvrer à réconcilier la société hongkongaise. Mais avant même son investiture, elle passe pour une frange de la population comme le laquais de Pékin.

Elle a été désignée comme ses prédécesseurs par un comité électoral acquis à Pékin.

La Chine avait bien proposé de réformer ce système décrié en introduisant le suffrage universel, mais les candidats auraient d'abord été adoubés par elle. Un verrouillage inacceptable aux yeux des démocrates.

Cette réforme avait déclenché le "Mouvement des parapluies". Conspué dans la rue, ce projet de "faux suffrage universel", comme le décrivaient les manifestants, avait finalement été rejeté par les élus démocrates.

Le plus jeune élu du Conseil législatif (LegCo), Nathan Law, qui fut aussi une figure des manifestations de 2014, reconnaît que leur pouvoir au "Parlement" est très limité. Mais il entend tout faire pour promouvoir une plus grande représentativité.

La politique n'est pas le seul ferment de division à Hong Kong où les écarts de richesse sont de plus en plus élevés et où l'immobilier atteint des sommets d'indécence, en raison notamment des investissements de Chine continentale.

"Les Hongkongais ont perdu espoir", explique M. Law à l'AFP. "C'est un problème énorme."

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