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Il leur pousse un pénis à l’âge de 12 ans: les "Guevedoces" de République Dominicaine

Dans un village de République Dominicaine, certains garçons n’ont pas de pénis avant l'âge de 12 ans. La carence d'une certaine enzyme retarde la poussée de testostérone.

La puberté est souvent un passage difficile. Mais il l'est encore plus pour certains enfants de République Dominicaine, qui changent sexe à l’adolescence. A Salinas, un petit village au sud-ouest du pays, environ 1 garçon sur 90 se voit pousser un pénis à l’âge de 12 ans. On les appelle les "Guevedoces", c’est-à-dire littéralement "pénis à douze ans". La BBC a diffusé lundi 21 septembre un documentaire d’une heure à ce sujet.


Et Felicita est devenue Johnny

Les journalistes de la chaîne britannique ont notamment rencontré Johnny, autrefois Felicita. Comme les autres Guevedoces, Johnny a été élevé comme une petite fille car son appareil génital semblait être un vagin, ses testicules et son pénis n’étant pas visibles. Ce n’est qu’à la puberté que son pénis a poussé et ses testicules sont descendus.

Johnny se souvient qu’il allait à l’école dans une petite robe rouge qui ne lui plaisait pas trop. "Je n’aimais pas m’habiller comme une fille et quand on m’achetait des jouets de filles, je ne jouais pas avec. Quand je voyais un groupe de garçons, je m’arrêtais pour jouer au ballon avec eux." Lorsqu’il est devenu un garçon, il était l’objet de railleries à l’école, à laquelle il répondait avec les poings. "Ils me traitaient de ‘diable’, disaient des choses méchantes et je n’avais pas d’autres choix que de me battre parce qu’ils dépassaient les bornes."

Depuis qu’il est devenu un homme, Johnny est sorti avec plusieurs filles. Mais il est toujours à la recherche de l’amour. "J’aimerais me marier et avoir des enfants, une partenaire qui serait toujours à mes côtés."

Des chromosomes XY, mais une apparence de fille

Le docteur Julianne Imperato, endocrinologue de l’Université Conrel aux Etats-Unis, a été un des premiers à étudier ce phénomène. Ayant eu écho de rumeurs étranges au sujet de filles qui se transforment en garçons, elle s’est rendue dans cette partie reculée de République Dominicaine dans les années 70. En démêlant ce mystère, elle a fait une découverte médicale importante.

A la conception, nous héritons tous d’un ensemble de gènes de nos parents qui, avec le temps, donneront l’instruction à nos corps de nous faire homme ou femme. Mais les premières semaines de notre vie, l’embryon n’est ni l’un ni l’autre. Nous avons simplement une protubérance appelée "tubercule génital". Si vous êtes génétiquement un homme, le chromosome Y induit le développement de gonades masculines (testicules) tandis que son absence entraîne la formation de gonades féminines (ovaires).

A huit semaines, les bébés de sexe masculin commencent à produire de la dihydrotestostérone en grande quantité, ce qui transforme le tubercule génital en pénis. Pour les femmes, le "tubercule génital" devient clitoris. Jusqu’à 12 semaines de grossesse, ce tubercule ne permet pas de déterminer le sexe du fœtus.

Les enfants Guavadoces présentent une carence de l’enzyme 5-alpha-réductase, qui convertit la testostérone en dihydro-testostérone. Une carence due à des facteurs génétiques, assez courante dans cette partie de la République Dominicaine, mais très rare partout ailleurs. Ces garçons, malgré leurs chromosomes XY, ont donc une apparence de fille à la naissance. Ce n’est qu’à l’adolescence qu’une deuxième poussée de testostérone entraîne le développement d’organes génitaux masculins.

Les recherches du docteur Imperato ont été reprises par le géant pharmaceutique américain Merck. Ils ont utilisé sa découverte pour mettre au point un médicament appelé finastéride, qui bloque l’action de l’enzyme 5-alpha-réductase. Des médicaments aujourd’hui largement utilisés pour traiter l'hypertrophie de la prostate.


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