Accueil Actu

Irak: un franc-tireur américain dans la guerre contre les jihadistes

Après avoir épousé la cause des rebelles libyens et syriens, l'Américain Matthew VanDyke a troqué le treillis pour le costume trois-pièce de businessman et Tripoli pour l'Irak, où sa société veut former des chrétiens au combat contre les jihadistes.

Cet homme aux multiples casquettes -réalisateur, analyste, guérillero...- s'est fait connaître en combattant avec les forces anti-régime en Libye en 2011.

Le film "Point and Shoot", qui retrace son périple de trois ans à moto à travers l'Afrique du nord et le Moyen-Orient, sa lutte armée aux côtés des anti-Kadhafi et ses cinq mois comme "prisonnier de guerre" dans les geôles libyennes, a été sacré meilleur documentaire au festival de Tribeca (New York) l'an dernier.

Peu enclin à la modestie, rarement timide devant une caméra, l'Américain décrit son film comme "un apprentissage accéléré vers l'âge adulte".

Aujourd'hui âgé de 35 ans, VanDyke est réapparu au Kurdistan irakien, où sa société privée de services militaires -"Sons of Liberty International"- vient tout juste de finir d'entraîner les volontaires chrétiens qui veulent en découdre avec le groupe Etat islamique (EI).

L'an dernier, l'EI a déferlé sur la plaine de Ninive, dans le nord de l'Irak, considérée comme le berceau des Assyriens, l'une des plus anciennes communautés chrétiennes du monde. Ses membres ont été contraints à l'exode pour échapper aux persécutions.

Mais quelques dizaines d'hommes sont désormais engagés dans l'Unité de protection de la Plaine de Ninive (NPU), une milice -mot que la NPU n'aime guère- financée par des groupes chrétiens étrangers, principalement américains.

La société de VanDyke les a formés pendant un temps: "C'est l'extension de mon travail de révolutionnaire", explique l'Américain en sirotant un cappuccino dans un café d'Erbil, la capitale du Kurdistan irakien. "Comment peut-on rester les bras croisés et ne rien faire ?"

VanDyke est l'un de ces Occidentaux -combattants, membres d'associations ou donateurs- qui sont de plus en plus nombreux à s'impliquer en Irak dans une sorte de guerre privée parallèle, au nom du christianisme, contre les jihadistes.

- De L.A. à Erbil -

Si l'Américain assure que sa sa société est bien "légalement enregistrée" aux Etats-Unis, il ne cache pas qu'elle opère "peut-être dans une zone grise" en Irak.

Selon un porte-parole du Département d'Etat interrogé par l'AFP, un permis doit être délivré pour qu'une société fournisse des prestations de défense, notamment de l'entraînement militaire.

Un détail qui n'émeut pas spécialement VanDyke. "L'attitude des Etats-Unis est généralement de regarder de l'autre côté du moment que vous tirez dans le bon sens", explique-t-il.

Basée en Californie et fondée par des Assyriens-Américains, l'Organisation américaine mésopotamienne (AMO) finance la milice en gestation à travers son projet "Restore Niniveh Now".

Ils ont recueilli 250.000 dollars depuis décembre pour la NPU, dont 80% en provenance des Etats-Unis, assure le président de l'AMO, David Lazar, interrogé au téléphone par l'AFP.

Mais Restore Niniveh Now a affirmé dans un communiqué que la mission de formation de VanDyke était terminée, l'accusant d'avoir essayé de s'en servir à des fins d'auto-promotion.

La majeure partie des fonds proviennent de membres de la communauté assyrienne-américaine, comme Joseph Baba, un vendeur de voiture iranien installé en Californie depuis quinze ans et qui a versé un peu moins de 10.000 dollars.

"Je crois fermement que le Moyen-Orient doit garder sa population indigène", explique-t-il, joint par l'AFP au téléphone, en référence aux chrétiens d'Irak.

S'il s'est posé des questions sur la légalité de financer une milice privée, M. Baba dit avoir été rassuré par l'AMO.

En Syrie aussi, où l'EI a profité de la guerre civile qui ravage le pays depuis près de 4 ans pour saisir de vastes pans de territoire, les jihadistes s'en prennent aux Assyriens. Ils ont enlevé depuis lundi plus de 220 membres de cette communauté dans le nord-est.

En représailles, la coalition anti-jihadiste, aussi active en Irak, a mené dans cette région plusieurs raids contre les positions de l'EI.

À la une

Sélectionné pour vous