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L'Ouganda abrite désormais un million de réfugiés sud-soudanais

Le nombre de Sud-soudanais ayant trouvé refuge en Ouganda voisin pour fuir la guerre civile dans leur pays a dépassé le million, a annoncé jeudi le Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR), pour qui cette crise ne semble pas près de prendre fin.

La guerre civile déclenchée en décembre 2013 a poussé en moyenne 1.800 Sud-soudanais par jour à traverser la frontière vers l'Ouganda depuis un an, pour la plupart des femmes et enfants fuyant des "violences barbares", selon le HCR.

Un million supplémentaire a trouvé refuge ailleurs dans la région. Mais c'est l'Ouganda - l'un des pays les plus pauvres au monde - qui est le plus directement touché.

"Nous avons encore de nouveaux arrivants et nous ne voyons pas vraiment quand cela va prendre fin", constate Bik Lum, chef du HCR à Arua, dans le nord de l'Ouganda, qui abrite Bidibidi, le plus grand camp de réfugiés au monde, avec ses 270.000 habitants.

Le nombre de réfugiés en Ouganda est comparable à celui des personnes - pour la plupart syriennes - qui ont fui vers l'Europe au plus fort de la crise des migrants en 2015.

Deux ans et demi après son indépendance, le Soudan du Sud a plongé en décembre 2013 dans une guerre civile alimentée par la rivalité entre le président Salva Kiir et son ancien vice-président Riek Machar.

Le conflit a fait des dizaines de milliers de morts, poussé 4 millions de personnes à fuir leur foyer, et rendu près de la moitié des 12 millions d'habitants dépendants de l'aide alimentaire.

- "La plus grande misère possible" -

"Le nombre de Sud-soudanais déplacés et ayant faim est faramineux", indique Peter Maurer, le président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

"L'échelle sidérante des souffrances est la preuve des effets cumulés de trois années et demie d'un genre de conflit qui apparaît destiné à causer la plus grande misère possible", estime-t-il. "La guerre ne devrait pas avoir un impact aussi direct sur les vies d'autant de civils."

Outre le million de Sud-soudanais ayant fui en Ouganda, au moins un autre million a trouvé refuge au Soudan, en Ethiopie, au Kenya, en République démocratique du Congo et en Centrafrique, selon des données de l'ONU.

Deux autres millions de personnes ont été déplacées à l'intérieur du pays, sans l'avoir quitté.

"Les nouveaux arrivants continuent de parler de violences barbares, avec des groupes armés qui brûlent des maisons avec des civils à l'intérieur, des gens tués devant des membres de leur famille, des agressions sexuelles sur les femmes et les filles, et des enrôlements forcés de garçons", décrit le HCR dans un communiqué.

Le HCR estime à 674 millions de dollars (576 millions d'euros) pour cette année seulement ses besoins pour aider les réfugiés d'Ouganda, mais n'a pour l'instant reçu qu'un cinquième de cette somme.

En juin, le Programme alimentaire mondial (PAM) a dû réduire les rations pour les réfugiés du pays. Les docteurs, infirmières et médicaments manquent aussi. La scolarisation est aussi très affectée.

- Des questions sur les chiffres -

"Une classe normale comprend au moins 53 ou 55 étudiants. Mais en moyenne, une classe a 110 élèves pour un enseignant, sous le même toit", témoigne Simon Abukua, le directeur de la Ocea Primary School dans le nord de l'Ouganda.

Même si la gravité de la situation ne peut être remise en cause, certains doutes ont été soulevés sur l'exactitude des chiffres.

L'enregistrement des nouveaux arrivants est effectué par les services gouvernementaux ougandais. Mais depuis des mois, les travailleurs humanitaires se sont, en privé, inquiétés de la possibilité que le nombre de réfugiés soit volontairement gonflé.

Pour Elizabeth Pfifer, la représentante en Ouganda de l'ONG américaine Catholic Relief Services (CRS), seul l'enregistrement biométrique des réfugiés, qui est prévu, pourra "effacer certaines incohérences et questions qui entourent les nombres réels", citant l'exemple de familles de réfugiés qui se sont enregistrées dans plusieurs endroits.

L'Ouganda a longtemps été considéré comme l'un des pays au monde offrant l'environnement le plus favorable aux réfugiés. Il leur garantit la liberté de mouvement, le droit de travailler et un terrain sur lequel s'installer.

Mais l'ampleur de la crise a eu un impact sur l'hospitalité des populations locales, qui ont commencé à durement ressentir la présence des réfugiés. Or ceux-ci semblent décidés à rester, aucune issue à la guerre ne se profilant à l'horizon.

"Avec ce qu'ils m'ont fait (...), je ne me sens pas de rentrer", confie une réfugiée, Jasmine Ramadan, que seule l'émergence de nouveaux dirigeants pourrait convaincre de retourner dans son pays.

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