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Littérature: la romancière américaine Alice McDermott exploratrice des vies minuscules

La romancière américaine Alice McDermott, dont l'oeuvre est unanimement saluée par la critique aux Etats-Unis, continue son exploration des vies minuscules avec son nouveau livre, "Someone", le sixième traduit en français.

Mary, la narratrice de ce roman qui sera publié le 27 août, n'a rien d'une héroïne hors du commun. C'est une femme ordinaire, vivant une vie banale dans le Brooklyn des immigrés irlandais des années 30.

Alice McDermott, connue notamment en France pour "Charming Billy" (lauréat du National Book Award, un des plus prestigieux prix littéraires américains, en 1998) et "Ce qui demeure" ("After This" 2007), revendique cette apparente banalité. "C'est mon anticonformisme", dit-elle avec un sourire.

"Choisir une femme ordinaire est un choix délibéré", affirme la romancière rencontrée récemment à Paris. "Je ne suis pas très intéressée par les intrigues et je suis toujours un peu sceptique devant des histoires trop soignées ou trop familières", dit-elle.

"Someone", publié par Quai Voltaire, est "un roman écrit uniquement d'un point de vue féminin" celui de Mary "qui ne s'intéresse ni à l'Histoire ou à la politique mais aux gens qu'elle côtoie", explique la romancière, plusieurs fois finaliste du Prix Pulitzer.

Mary que l'on découvre myope, puis quasi aveugle, se révèle être une observatrice hors pair. Le lecteur la croise aux différents âges de sa vie, de la petite enfance au crépuscule de l'existence, dans un récit qui refuse de s'enfermer dans une stricte chronologie.

Alice McDermott, 62 ans, parfois comparée à la prix Nobel canadienne Alice Munro, enchaîne avec un remarquable sens de l'ellipse ces petits riens qui font une vie et livre au bout du compte un récit captivant et lumineux avec des personnages qui continueront longtemps de hanter le lecteur.

"C'est le silence qui résonne à la fin de l'histoire. Quand le silence parle encore après les mots vous savez que vous avez entendu une bonne histoire" explique l'écrivain.

"Pour raconter une histoire vous n'avez pas besoin d'entretenir un suspens pour atteindre un paroxysme", ajoute-t-elle en souriant.

- Le refus des étiquettes -

Une jeune voisine meurt brusquement, une mariée est abandonnée le soir de ses noces, la mère d'une amie meurt en couches, un médecin fait une intervention hasardeuse sur un oeil qui n'est pas malade, des enfants naissent, le frère de Mary renonce sans explication à la prêtrise... Tout se déroule, y compris le pire, sans qu'Alice McDermott cède aux facilités du mélodrame ou du cliché.

"Ce que je raconte, c'est rien de moins que la vie", explique la romancière qui ne cache pas sa profonde empathie pour tous ses personnages y compris ceux qui semblent les plus odieux. Qualifiée souvent "d'écrivain catholique", elle refuse de se laisser enfermer par une étiquette, quelle qu'elle soit.

"On pourrait tout aussi bien dire que je suis un écrivain féministe", dit-elle. Tout au plus reconnaît-elle avoir de la "compassion" pour ses personnages.

"J'ai une grande tendresse pour les menteurs dans mon histoire", dit-elle ainsi en évoquant notamment Walter, un personnage particulièrement antipathique et menteur. "Avec de bons conseils, ces menteurs auraient pu devenir romanciers", ajoute-t-elle en souriant.

D'origine irlandaise, comme sa narratrice Mary, elle se défend de réduire "Someone" à une histoire de sa propre famille.

"Tous les personnages et les situations appartiennent à l'histoire elle-même", insiste-t-elle.

Née à Brooklyn, Alice McDermott n'y a en fait jamais vécu. Après avoir enseigné notamment en Californie, elle est professeur de sciences humaines à l'université John Hopkins, au nord de Washington.

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