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Report de la gratuité des visas entre Mayotte et les Comores

Le gouvernement a décidé jeudi de "différer" la mise en place de la gratuité des visas entre Mayotte et les Comores, l'annonce de ce dispositif ayant suscité la colère de la population et des élus mahorais, opposés à cette gratuité synonyme selon eux d'immigration massive de Comoriens.

"La mise en œuvre de la feuille de route", instaurant notamment la gratuité de ces visas, "a été différée dans un souci d'apaisement, tout en maintenant le dialogue avec les autorités comoriennes", compte tenu "des incompréhensions et des fausses informations que ce document a suscitées à Mayotte", a indiqué jeudi Dominique Sorain, directeur de cabinet de la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, à l'issue d'une rencontre entre des élus mahorais et des représentants des ministères de l'Intérieur, des Affaires étrangères et des Outre-mer.

Elle est différée jusqu'à la conclusion des assises des Outre-mer, promesse de campagne d'Emmanuel Macron, qui vont démarrer le 4 octobre avec une large phase de consultations pour aboutir à un livre bleu d’ici la fin du mois d’avril.

Dans cette feuille de route, signée le 12 septembre entre Paris et les autorités comoriennes lors d'un Haut conseil paritaire, il était notamment prévu que la France délivre, à compter du 1er octobre, des visas gratuits aux ressortissants des Comores afin, selon le Quai d'Orsay, de "lutter contre le trafic d'êtres humains, favoriser les mouvements légaux, tarir les passages illégaux et sécuriser les liaisons, aériennes comme maritimes".

Mais l'annonce de cet accord auquel les élus mahorais n'avaient pas été associés a provoqué colère et indignation à Mamoudzou (chef-lieu de Mayotte). Attisée par l'absence d'informations et la diffusion de faux documents sur les réseaux sociaux, la tension était montée ces derniers jours dans l'île, marquée par une forte immigration irrégulière venant principalement des Comores, distantes de seulement 70 kilomètres.

Plusieurs manifestations ont eu lieu pour s'opposer à cet "assouplissement" du visa dit "visa Balladur", instauré en 1995 et obligatoire pour les ressortissants comoriens souhaitant aller à Mayotte. Ce visa coûte actuellement 9 euros, a-t-on précisé de source proche du dossier.

Depuis mardi, des manifestants empêchaient les demandeurs de titres de séjour d'accéder au service immigration de la préfecture, poussant cette dernière à fermer le service pour raisons de sécurité.

- "Une victoire sur toute la ligne" -

En contrepartie de la gratuité du visa, les Comoriens s'étaient engagés à engager des poursuites contre les passeurs comoriens et à renforcer la lutte contre l'immigration illégale. Les relations diplomatiques entre la France et les Comores sont compliquées, du fait notamment de la revendication territoriale des Comores sur Mayotte.

Les députés mahorais Mansour Kamardine (LR) et Ramlati Ali (LREM), les sénateurs Hassani Abdallah (DVG) et Thani Mohamed Soilihi (LREM), ainsi que le président du conseil départemental de Mayotte Soibahadine Ibrahim Ramadani, avaient réclamé une rencontre avec le gouvernement.

A l'issue de plus de trois heures de discussions jeudi, ils se sont dit satisfaits. "L'essentiel a été acté, à savoir le retrait de cette feuille de route", a déclaré au nom des élus Thani Mohamed Soilihi, soulignant que les assises "seront l'occasion pour nous de faire valoir nos positions".

"Une victoire sur toute la ligne", a souligné le député Kamardine dans un communiqué.

Les élus de Mayotte seront désormais "associés aux prochaines réunions du Haut conseil paritaire, mais aussi consultés en amont du Comité technique de suivi qui sera prochainement mis en place", a précisé Dominique Sorain.

"Tout le monde est d'accord pour dire qu'il faut que les choses bougent dans les relations entre Mayotte et les Comores, notamment la situation de l'immigration (...) Nous allons revenir discuter avec les Comoriens, mais pas à n'importe quelles conditions", a insisté Thani Mohamed Soilihi.

Parmi les autres revendications qu'ils entendent porter dans les futures discussions, ils souhaitent que soient rapatriés à la préfecture de Mayotte les services de l’état civil, actuellement gérés par la préfecture de la Réunion, faute de personnels suffisants à Mayotte, et que les dossiers de demandes de visa et de titre de séjour soient au contraire instruits au sein des services consulaires français aux Comores.

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