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Mieux insérer les étrangers, le défi du "Contrat d'intégration"

Formation civique plus concrète, exigence plus forte sur la langue: le nouveau "contrat d'intégration républicaine", entré en vigueur le 1er juillet, compte mieux aider les étrangers à s'insérer, avec des moyens renforcés mais que certains jugent encore insuffisants.

"Aujourd'hui on va parler de la France. Qu'est-ce qui la caractérise?" Ce mercredi matin, une trentaine de personnes sont rassemblées dans une salle du XIXe arrondissement de Paris pour deux jours de formation. Il y a là une Tunisienne arrivée il y a quatre mois, un réfugié syrien... mais aussi un Egyptien vivant ici depuis 15 ans ou une Chinoise totalisant dix ans de présence.

Tous ont signé un "Contrat d'intégration républicaine", conçu pour les étrangers admis légalement à séjourner en France et souhaitant s'y installer -- pas les étudiants donc, ni les visiteurs pour courts séjours.

Face à son public silencieux, Samia, la formatrice, répond elle même à sa question: "La France est une et indivisible. Ca veut dire que sur l'ensemble du territoire les mêmes lois s'appliquent à tous!". On est ici dans le volet "formation civique", qui doit familiariser les étrangers avec les valeurs de la République, l'Histoire de France, et les démarches concrètes d'installation.

Pour Yamin, Syrien arrivé il y a un an, "c'est surtout l'aspect pratique qui m'intéresse: où aller, qui fait quoi... Et puis apprendre le français."

Des demandes récurrentes chez les primo-arrivants, et que les pouvoirs publics ont voulu intégrer au CIR, qui remplace un précédent "Contrat d'accueil et d'intégration" (CAI) jugé trop standardisé.

"On a une approche beaucoup plus forte sur la question de la langue, nécessaire parce que c'est le préalable à l'accès à l'emploi", explique Didier Leschi, le directeur général de Ofii (Office français de l'immigration et de l'intégration) qui teste le niveau linguistique des étrangers lors de la signature du contrat.

"Tous n'auront pas besoin de cours", ajoute-t-il, une partie des arrivants étant déjà francophones (l'an dernier, sur les 110.000 signataires d'un CAI, 35% venaient de pays de Maghreb). Les autres se verront proposer des cours de français, dans la limite de 200 heures.

Le but est d'arriver à un niveau "de découverte" (classifié A1 par le Cadre européen de référence pour les langues) pour obtenir un titre de séjour de deux ou quatre ans, puis "de communication simple" (A2) pour la carte de résident de dix ans.

Car un lien étroit unit ce contrat au droit au séjour: "La délivrance des titres pluriannuels sera subordonnée au respect du CIR", explique Muriel Nguyen, la directrice de l'accueil à la Direction générale des étrangers en France.

- 'Importance de la langue' -

La formation proposée suffira-t-elle à atteindre l'ambitieux objectif d'insertion affiché? "C'est une amélioration, mais le CIR ne suffira pas", estime Jean-François Ploquin, directeur général de l'association Forum réfugiés-Cosi, qui regrette qu'avec 200 heures de langue, le dispositif "ne permette pas de trouver du travail".

A titre de comparaison, l'Allemagne dispense 600 heures de formation linguistique, rappelle l'OCDE dans un rapport sur l'intégration des réfugiés.

"Ces 200 heures sont un premier pas", l'idée étant "de donner les bases minimales pour faciliter la poursuite de l'apprentissage", souligne Didier Leschi, qui rappelle que jusqu'à présent le niveau exigé était encore inférieur au A1.

"On est en phase d'évolution philosophico-administrative sur ce point et plus le temps passe, plus on comprend l'importance de la langue", ajoute-t-il.

Cet effort a un coût: 21 millions d'euros en année pleine, souligne Mme Nguyen. Un budget qu'il faudra peut-être doper en 2017, avec la hausse prévisible du nombre de réfugiés (ils étaient 15.000 a signer un CAI l'an dernier).

Mais pour M. Ploquin, le jeu en vaut la chandelle, même s'il peut sembler onéreux au début. Sans formation suffisante "les gens se retrouvent au RSA, ça coûte très cher au bout du compte. Mais s'ils ont un emploi ils consomment, paient des impôts...". "Il faut investir pendant quelques années", martèle-t-il.

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