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Pologne: les fidèles de Kaczynski, inébranlables contre les "juges communistes"

Drapeaux polonais en main, icône de la Sainte Vierge sur la poitrine, une poignée de militants sont là pour soutenir la réforme de la justice menée par les conservateurs en dépit des manifestations de rue et des mises en garde de l'UE.

Devant le siège du parlement, ils sont beaucoup moins nombreux que les manifestants d'opposition qui crient à la "journée noire pour la démocratie", au "coup d'Etat" et à la "fin de l'indépendance de la justice", subordonnée à l'exécutif.

Mais ils se sentent forts, représentants de la vague de fond qui a porté au pouvoir le parti Droit et Justice (PiS) de Jaroslaw Kaczynski en octobre 2015, et qui reste toujours solide, avec le soutien de 37% des électeurs, très loin devant les partis d'opposition.

"Ca fait 28 ans que j'attends que tombe enfin ce dernier bastion du régime communiste, que soient limogés les juges antipolonais, tous ces juges communistes", explique l'ancien mineur Zygmunt Poziomka, 59 ans, à propos de la loi sur la Cour suprême déjà votéee à la Diète et discutée au Sénat.

Il n'a aucun doute. "La loi passera. Ils peuvent manifester tant qu'ils veulent, nuit et jour. Nous avons bien la démocratie", dit-il à l'adresse de ses adversaires qui brandissent des drapeaux européens, et qui sont pour lui "des ordures antipolonaises".

- 'Caste' -

"C'est une chance qui ne se répètera peut-être jamais et j'espère que rien ne détournera le PiS de ce chemin, même pas le président Andrzej Duda qui s'est laissé dérouter", dit cet ancien mineur de la célèbre mine Wujek où en 1981 des mineurs avaient été tués par les unités anti-émeutes communistes.

"On veut enfin des tribunaux normaux, il faut en finir avec cette caste", dit-il, reprenant un terme favori des hommes au pouvoir.

Vingt-huit ans après la chute du communisme il semble difficile de comprendre ces accusations. Un juge a en moyenne entre 30 à 40 ans. De plus, dans les rangs du PiS on trouve d'anciens membres du PC et même un ex-procureur à l'époque de l'état d'urgence, Stanislaw Piotrowicz. Ironie de l'histoire, c'est lui qui a été le rapporteur de la loi controversée.

Cela ne change rien pour les fidèles du PiS. "Oui, il y a des jeunes juges, mais ils sont pour la plupart issus de la caste des juges communistes, génétiquement infectés par une mentalité antipolonaise", assène Izabella Galicka, historienne de l'art. "Jaroslaw Kaczynski est le seul homme capable de libérer la Pologne des restes du communisme. Alors qu'on lui colle l'étiquette de fasciste et de dictateur. C'est un vrai démocrate. Il doit aujourd'hui recourir à des méthodes semi-démocratiques pour mener le pays vers une vraie démocratie".

Elle est prête à lui pardonner ces méthodes hors normes - la loi sur la Cour suprême a été adoptée en procédure express, sans débat ni consultations. Pour elle, Kaczynski est l'homme qui n'a qu'un seul but "le bien de la Pologne".

La réforme controversée a fait descendre dans la rue des dizaines de milliers de Polonais, à l'appel des partis d'opposition.

Mais pour le professeur d'informatique à l'Académie des Sciences, Marian Srebrny, la vraie raison profonde de cette mobilisation ce n'est pas les réformes de la justice. "Il s'agit surtout de faire mal au PiS, alors que l'opposition n'a aucune solution de rechange" à proposer.

Selon une étude réalisée mardi et mercredi par l'institut Ibris pour le journal Rzeczpospolita, le PiS a gagné 3 points de pourcentage par rapport à juin, et bénéficie d'un soutien de 37% de Polonais prêts à voter pour lui.

Les manifestants anti-PiS en sont conscients. "Je n'ai pas beaucoup d'espoir concernant le veto du président mais on doit être unis", affirme Agnieszka Wolfram, la cinquantaine, qui avec des milliers de Polonais demande à M. Duda - pour le moment en vacances à la mer - de s'opposer à la réforme.

Les chances de l'obtenir sont faibles. Proche du PiS, le président a obtenu une légère modification de la loi, ce qu'il avait posé comme condition pour la signer.

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