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Sur les ruines des terroristes en Irak (4/4): "Puisque je n’ai pas tué mes voisins, je suis maintenant une cible"

Un V sur une maison indique que celle-ci est déminée et qu’un retour est possible. Notre équipe assiste à celui d’Eeman. Il rentre dans ce village chrétien qui l’a vu naître. Avant l’arrivée des djihadistes, Telescof comptait 11.000 habitants, maintenant à peine 500. Le village est libéré, mais pas rassuré.

"Je ne demande pas de l’aide, juste une protection. Je préférerais me suicider plutôt que de revivre ce cauchemar", confie Imad, l’épicier, qui n’a pas pu retenir ses larmes. La question de son avenir réveille de profondes angoisses. La peur de se retrouver, encore une fois, face aux islamistes. Pour l’instant, seuls les hommes sont revenus en éclaireur au village.

Notre équipe se trouvait dans ce village situé à 20km seulement du cœur de la bataille. Dans ce village, les habitants sont rentrés il y a moins de deux mois maintenant. La vie reprend, les habitants se rassemblent pour jouer aux cartes.

Mounir est professeur d’anglais, lui aussi est inquiet. Il a tout perdu et a montré à notre équipe les photos de la maison qu’il a mis 28 ans à construire et que les djihadistes ont incendiée. "C’est toute notre mémoire qu’ils ont supprimé. Les souvenirs, les photographies de notre mariage, de nos enfants".

S’accrocher à sa foi et à sa terre ou partir : c’est la question qui hante toutes les pensées. Cette région est le berceau de tant d’histoire et de religions. Notre équipe s’est rendue dans un village de la minorité yézidie, reconnaissable à son lieu de culte particulier. En compagnie du chef du village, elle a visité le temple, puis il a accueilli nos journalistes pour leur raconter les malheurs de son peuple. "Après tout ce que Daech a fait, tué, enlevé, violé nos femmes et nos filles, on n’a plus confiance dans nos voisins musulmans. Si les autorités ne nous protègent pas, cela recommencera". 

A deux kilomètres de là, le village arabe de Farat: il s’est illustré pour sa résistance contre Daech. Raed Ali Najim était architecte à Mossoul, il a tout abandonné pour protéger sa tribu et ses voisins chrétiens et Yézidis. "Nous sommes tous meurtris. Comme je suis un musulman modéré, Daech me considère comme un traître, un mécréant. Puisque je n’ai pas tué mes voisins, je suis maintenant une cible".

Un sourire, un espoir, peut-être, pour retisser le fil d’une longue histoire que l’organisation terroriste a voulu anéantir.

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