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Syrie: l'opposition sous pression à Ryad, des compromis attendus

L'opposition syrienne se réunit mercredi en Arabie saoudite pour choisir ses représentants en vue des prochaines négociations de paix, mais pour des experts, l'initiative vise à façonner une délégation plus conciliante sur certaines questions controversées, notamment le sort du président Bachar al-Assad.

La conférence intervient alors que la Turquie, l'Iran et la Russie se retrouvent en sommet dans la station balnéaire russe de Sotchi pour discuter d'une issue au conflit qui ravage la Syrie depuis 2011 et qui a fait plus de 330.000 morts.

A ce jour, toutes les initiatives qui ont tenté de mettre fin à la guerre en Syrie ont échoué, avec comme principale pierre d'achoppement le sort réservé au président Assad, dont le départ immédiat est réclamé par les opposants.

Mais à l'heure où le régime multiplie les victoires militaires, renforçant sa stature sur la scène internationale face à des rebelles affaiblis, l'opposition, minée par les divisions internes, tente d'unifier ses rangs.

A l'invitation du ministère des Affaires étrangères saoudien, quelque 140 dissidents syriens, issus de l'ensemble du spectre de l'opposition, participeront à une conférence organisée sur trois jours à Ryad.

L'objectif: mettre sur pied une délégation unifiée pour les représenter aux prochaines négociations qui s'ouvrent le 28 novembre à Genève, sous l'égide de l'ONU.

Il y a bien sûr la Coalition nationale, principale composante de l'opposition en exil, mais aussi les groupes de dissidents installés à Moscou ou au Caire, considérés comme plus conciliants vis-à-vis du régime.

Les participants "vont former une seule délégation pour les négociations", a confirmé à l'AFP Hadi al-Bahra, un responsable de la Coalition nationale.

- Responsables écartés -

Mais pour des membres de l'opposition et des experts, le remaniement pourrait donner naissance à une délégation qui accepterait de revoir à la baisse ses exigences, notamment le départ immédiat d'Assad.

Signe de possibles tensions, plusieurs figures du Haut comité des négociations (HCN), qui représentait jusqu'alors l'opposition à Genève, ont rendu publique leur démission, deux jours seulement avant la conférence.

C'est le cas notamment du coordinateur du HCN, Riad Hijab, qui, sans expliquer son geste, a indiqué qu'il avait toujours résisté aux "tentatives cherchant à abaisser le plafond de la révolution et à prolonger le régime".

"Plusieurs personnalités qui refusent catégoriquement de voir Assad dans le futur de la Syrie ont été écartées", assure, sous le couvert de l'anonymat, un haut responsable du HCN, qui n'a pas été invité à Ryad.

Ces éloignements traduisent selon lui "les pressions exercées sur l'Arabie saoudite par la Russie", allié indéfectible du régime et engagé militairement au côté d'Assad.

"Même si l'Arabie saoudite soutient la révolution syrienne, elle a aujourd'hui ses propres intérêts avec la Russie et les Etats-Unis (...) et veut une solution rapide au dossier syrien", poursuit le responsable.

Les démissions ont d'ailleurs été favorablement accueillies par Moscou. Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a estimé qu'elles allaient "aider l'opposition installée en Syrie et à l'étranger à s'unir de manière constructive".

- 'Légitimer Assad' -

Yehia al-Aridi, figure de l'opposition, reconnaît que plusieurs formations invitées à Ryad, notamment le groupe de Moscou, se montrent plus flexibles sur le sort d'Assad.

"Toute formation qui, sous la pression, accepte Assad, ne représente pas les choix de la révolution ou du peuple syrien", a-t-il toutefois mis en garde.

Par ailleurs, des dizaines de responsables de l'opposition ont signé une lettre ouverte aux participants de Ryad, leur rappelant certains "principes de base", notamment "le départ d'Assad et de son gang".

Parmi eux, George Sabra, un membre du HCN qui se montre intraitable sur la question et qui a annoncé lundi qu'il ne se rendrait pas en Arabie saoudite.

Pour Randa Slim, experte au Middle East Institute, la conférence de Ryad va surtout permettre d'unifier les points de vue concernant certaines questions, notamment la constitution et les élections législatives.

"L'enjeu actuel est de trouver une opposition convenable, qui acceptera l'accord négocié", affirme la chercheuse, estimant qu'il "n'y aura plus aucune discussion sur la transition politique ou Assad".

Mais des responsables de l'opposition se veulent rassurants.

"La Coalition nationale est la principale formation invitée à Ryad, et ses positions vis-à-vis d'Assad n'ont pas changées", assure Hicham Marwa, un membre du groupe.

"Ceux qui parient sur la conférence de Ryad pour légitimer la présence d'Assad se font des illusions".

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