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Trump ou la déconstruction du bilan d'Obama

Brique par brique, l'entreprise de démolition est engagée: depuis son arrivée au pouvoir il y moins d'un an, Donald Trump s'est lancé à l'assaut du bilan de Barack Obama.

Climat, libre-échange, santé, immigration, diplomatie, le 45e président des Etats-Unis s'attache à défaire ce que le 44e a fait.

Bien sûr, en prenant possession du Bureau ovale, tous les nouveaux locataires des lieux marquent une rupture avec leur prédécesseur, surtout s'il est issu de la famille politique adverse.

Mais ici, c'est le côté systématique qui frappe. Et, plutôt que la mise en place de nouvelles politiques ou le lancement de nouveaux chantiers, une volonté de détricoter, démanteler, effacer.

Elément singulier: les mots utilisés par Donald Trump au moment de mettre à terre les réformes de celui qui, avant lui, était assis derrière le "Resolute desk", empruntent plus au registre du candidat qu'à celui du président.

- 'Accords ridicules' -

Le traité de libre-échange transpacifique (TPP)? Quelques jours après son arrivée au pouvoir, Donald Trump signe l'acte de retrait de cet accord conclu dans la douleur entre 12 pays d'Asie-Pacifique, du Chili au Canada en passant par le Japon.

"Nous allons mettre fin à ces accords commerciaux ridicules", lance-t-il.

Paradoxe: en signant la fin d'une entente qui fut l'une des priorités de son prédécesseur, il s'aligne avec la gauche du parti démocrate et s'aliène une partie des républicains.

L'accord de Paris sur le climat, avancée sans équivalent dans la lutte contre le réchauffement?

Donald Trump se retire de ce texte signé par 195 pays, qui, selon lui, "punit les Etats-Unis". "J'ai été élu pour représenter les habitants de Pittsburgh, pas de Paris".

Obamacare, loi phare du premier mandat Obama sur la couverture maladie? Après avoir tenté, en vain, de supprimer le texte par la voie législative, Trump essaye désormais de précipiter sa chute par la voie règlementaire.

L'accord nucléaire iranien, qui vise à empêcher Téhéran de se doter de l'arme nucléaire est, plus que tout autre, le produit de l'approche de Barack Obama au monde.

"Mon nom sera inscrit sur cet accord", expliquait le président démocrate peu avant la signature de ce document, fruit d'années de patients travaux diplomatiques. "Personne n'a plus intérêt que moi à s'assurer qu'il tienne ses promesses".

Certes, Donald Trump n'a pas, comme il avait promis lors sur les estrades de campagne, jeté le document aux orties. Mais en menaçant vendredi d'y mettre fin "à tout moment", il a ouvert une période d'immense incertitude.

- Rupture à tout prix -

Comment expliquer cette volonté de rupture à tout prix?

La locataire de la Maison Blanche met en avant sa détermination à tenir ses promesses et donner corps à un slogan simple: "L'Amérique d'abord".

Et son équipe rappelle à juste titre que, face aux blocages du Congrès, Barack Obama a beaucoup agi par décret. Et que ce qui été décidé d'une signature peut aussi être effacé d'un trait de plume.

Mais l'historien Jeffrey Engel ne voit pas d'équivalent au cours des dernières décennies d'une application aussi systématique d'un principe simpliste qu'il résume ainsi: "Si l'autre type l'aimait, c'est pas bon".

Pour lui, cela s'explique d'abord par le fait que la base électorale de Trump "n'a jamais complètement accepté Barack Obama comme président".

"Durant sa présidence, il y avait une volonté de le délégitimer et, aujourd'hui, il faut donc se débarrasser de tout ce qu'il a fait", ajoute le directeur du Centre sur l'histoire présidentielle de la Southern Methodist University (Dallas).

Fait marquant: Barack Obama est jusqu'ici resté largement silencieux face à cette entreprise de démolition.

La tradition américaine veut qu'un président se tienne à l'écart de la mêlée après son départ. Mais, l'ancien président démocrate a aussi conscience que sa place dans l'histoire sera façonnée par ce qui viendra après.

"Barack Obama sait que, in fine, son bilan dépendra de la façon dont l'Amérique réagira face à Trump sur le long terme, et sur les choix de ses successeurs", souligne Jeffrey Engel.

Le 7 novembre 2016, à la veille de l'élection pour désigner son successeur, il mettait en garde, depuis Ann Arbor (Michigan), contre l'élection du magnat de l'immobilier et le risque que les "progrès" de ses deux mandats soient "tous jetés par la fenêtre".

Ce qui était probablement des propos de campagne un peu forcés pour galvaniser l'électorat démocrate avaient - peut-être - une dimension prémonitoire.

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