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Venezuela: le président Maduro, accusé de "coup d'Etat"

Une pluie de critiques internationales s'est abattue jeudi sur le président Nicolas Maduro, accusé de "coup d'Etat" au Venezuela après la décision de la Cour suprême, réputée proche du pouvoir, de faire main basse sur la prérogative du Parlement d'édicter des lois.

Cette décision traduit une escalade supplémentaire dans la crise politique qui agite ce pays pétrolier depuis la large victoire de l'opposition antichaviste (du nom de l'ancien président Hugo Chavez, 1999-2013) aux élections législatives fin 2015, pour la première fois en 17 ans.

Depuis janvier 2016, le Tribunal suprême de justice (TSJ) ou Cour suprême a déclaré nuls tous les votes de l'Assemblée nationale, en réaction à l'investiture de trois députés antichavistes dont l'élection était entachée de soupçons. Elle n'a cessé depuis de rogner le pouvoir des législateurs.

"Tant que l'Assemblée nationale sera hors-la-loi, les compétences parlementaires seront exercées directement par" la Cour suprême, selon la décision publiée par la plus haute juridiction du pays dans la nuit de mercredi à jeudi.

Exécutif, armée, justice et législatif: le régime présidentiel vénézuélien concentre à présent tous les pouvoirs.

De l'Union européenne au secrétaire général de l'Organisation des Etats américains (OEA), Luis Almagro, en passant par les Etats-Unis, le Brésil, la Colombie, le Chili ou le Mexique, tous ont condamné la "rupture de l'ordre constitutionnel" ou le "coup d'Etat" au Venezuela. Le Pérou, qui a critiqué cet "auto-coup", a rappelé son ambassadeur à Caracas.

Un porte-parole du département d'Etat a dénoncé un "grave recul" pour la démocratie au Venezuela.

"Nicolas Maduro vient de commettre un coup d'Etat", a également lancé le président du Parlement vénézuélien Julio Borges en appelant l'armée à sortir du "silence" face à la rupture de l'ordre constitutionnel.

"Nicolas Maduro ne peut pas être au-dessus de la Constitution", a-t-il lancé, estimant que le président avait "retiré le pouvoir au peuple".

"Une dictature règne" au Venezuela. Le moment est venu de crier à l'aide de la communauté internationale", a lancé depuis la Colombie Henrique Capriles, l'un des principaux opposants vénézuéliens.

- 'Nous avons été élus' -

De son côté, le député d'opposition Henry Ramos Allup, également ancien président du Parlement unicaméral de ce pays, a appelé les parlementaires à "continuer à exercer (leurs) fonctions, quels que soient les risques, car nous n'avons pas été désignés députés mais nous avons été élus".

Avant cette décision du TSJ, la même instance avait déjà privé mardi les députés de leur immunité, les exposant à de possibles procès pour haute trahison devant des instances militaires.

La mesure de mardi apparaissait déjà comme une sanction contre le pouvoir législatif. Elle renforçait encore plus les prérogatives du chef de l'Etat, habilité à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la "stabilité démocratique".

Le 21 mars, les députés vénézuéliens avait adopté une motion appelant l'Organisation des Etats américains (OEA) à convoquer son conseil permanent pour examiner d'éventuelles sanctions contre ce pays.

Cette réunion qui se tenait mardi à Washington a débouché sur une déclaration commune où la majorité des pays de l'institution ont exprimé leur "inquiétude devant la difficile situation politique, économique, sociale et humanitaire" du Venezuela.

L'opposition veut pousser le chef de l'Etat vers la sortie et exige une élection présidentielle anticipée avant celle prévue en décembre 2018. A l'inverse, le président Nicolas Maduro accuse l'OEA d'encourager une "intervention internationale".

"La Cour suprême, l'institution qui est censée être la garante de la loi, des droits et de la Constitution, vient tout simplement de violer la Constitution. Ce n'est pas n'importe quel organisme. Qui avait déjà entendu parler d'un coup d'Etat d'une Cour suprême?", s'est demandé Christopher Sabatini, expert de l'Amérique latine à l'université de Columbia de New York.

"Cette décision est majeure car elle illustre la fuite en avant du gouvernement de Maduro qui se repose du plus en plus sur l'armée pour survivre, malgré la débâcle économique du pays", a déclaré à l'AFP Gaspard Estrada, directeur exécutif de l'Observatoire politique de l'Amérique latine et des Caraïbes (Opalc).

Outre le choc des pouvoirs au Venezuela, ce pays parmi les plus violents au monde est frappé par une pénurie qui concerne 68% des produits de base et l'inflation y est devenue incontrôlable (1.660% fin 2017, prédit le FMI).

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