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Époque coloniale: Evariste, comme tant d'autres métis ayant perdu leur père blanc, arraché à sa mère et envoyé en Belgique

Une audition à propos des enfants métis issus de la colonisation belge en Afrique, va se tenir au Sénat ce mardi après-midi.

Pendant la colonisation belge en Afrique, environ 13.000 enfants sont nés d’une union entre un homme blanc et une femme africaine. Leur père était fonctionnaire, agronome, ingénieur ou encore militaire, et leur mère vivait au Congo, Rwanda ou au Burundi. Entre 300 et 700 d’entre eux, dont Evariste, ont été envoyés en Belgique entre 1959 et 1962, sans identité, sans nationalité, arrachés à leur mère.


Une famille séparée à cause de ses origines

Ceux dont les pères partaient ou qui n'étaient pas reconnus étaient directement envoyés dans des institutions religieuses, pour "suivre une éducation", mais surtout pour les cacher. "On vivait bien tranquille, mes frères et ma sœur, mon père avait une plantation d’ananas et on était très bien comme dans une famille", raconte Evariste lors d’un témoignage, avec un air nostalgique. Mais son père, qui était blanc, part un jour en vacances ou tombe malade, Evariste ne le saura jamais vraiment, et les enfants sont confiés à une institution religieuse, puis ballotés d’un foyer à l’autre pendant leur adolescence. "Ma petite soeur avait à peine trois ans, on a passé notre temps à pleurer après notre maman".


"Je n’ai qu’une soif légitime de justice que ma souffrance soit enfin reconnue"

Pour envoyer les enfants métis en Belgique, l'état colonial se substituait aux mères en leur faisant signer une décharge souvent avec leur doigt, pour, soi-disant, que leurs enfants fassent des études. Un jour, c'est ce qui arrive à Evariste. On dit à sa mère qu’il va faire des études, mais il ne la reverra jamais.

A l’âge de 24 ans, Evariste est pris en charge par un homme qui le fera travailler dans un restaurant puis dans des bureaux. Le jeune devient ouvrier dans le chemin de fer puis dans le bâtiment. Il se marie et trouve une vie stable. "Ni haine ni rancune", conclut Evariste, "je n’ai qu’une soif légitime de justice que ma souffrance soit enfin reconnue". 


"Nous n’avons pas vraiment été considérés comme des Belges à part entière, alors que nous le sommes"

Pour l'AMB, l’association Métis de Belgique créée en août 2015, les instances fédérales, notamment la chambre des représentants, le sénat et le gouvernement, doivent reconnaître les enlèvements forcés et la discrimination ciblée dont ont été victimes les enfants métis, et adopter une résolution. "On aimerait qu’on ait accès aux archives qui nous permettent de retrouver notre identité, de connaître le vrai nom de notre maman, de notre père. Attention, nous ne sommes plus si nombreux, et on vieillit, donc il est temps qu’on le fasse. Nous n’avons pas vraiment été considérés comme des Belges à part entière, alors que nous le sommes, donc on commence par ça et nous espérons que, au cas par cas, des personnes, grâce à cette résolution, pourront obtenir plus de choses", a expliqué François Milliex, président d’AMB et enfant métis envoyé en Belgique, au micro de Guillaume Cordeaux pour Bel RTL.

Des excuses publiques ont déjà été formulées en novembre 2015 par le parlement flamand, associé à l'église catholique. Le parlement francophone bruxellois, lui, a reconnu la ségrégation en octobre 2016.

 

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