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Traumatisé par un braquage à Gosselies, un ouvrier est RÉVOLTÉ par ce qu'il a appris

Les faits n'ont duré que quelques dizaines de minutes, mais ils laissent des traces durables chez ceux qui les ont subis. Trois mois après, une des deux victimes témoigne. Toujours en arrêt, elle continue à se sentir physiquement mal quand elle retourne sur son lieu de travail, là où elle a été menacée d'une arme et retenue. Un souvenir d'autant plus pénible que s'y rajoute le fait de savoir qu'un des suspects est un gangster notoire qui a obtenu une libération conditionnelle l'an passé.

Dimanche 23 avril vers 02 heures du matin, dans un dépôt du zoning de Gosselies, deux travailleurs de la société Newrest Servair chargent leur camion de trolleys de marchandises "duty free" destinées à être vendues dans les avions. Parfums, cigarettes et tabac doivent être transportés à l'aéroport de Charleroi situé à un kilomètre à peine. Mais les deux ouvriers ne feront pas leur livraison. En effet, trois braqueurs vont bouleverser le cours normal de leur nuit. Menacés d'une arme, ils sont attachés les mains dans le dos et gardés dans un local, sous la surveillance d'un homme équipé d'une arme lourde. Une demi-heure plus tard, la bande de malfrats s'en va avec un butin estimé à 170.000 euros. Un vol s'était déjà produit au même endroit, exactement un mois plus tôt, le 23 mars, mais par chance il n'y avait alors aucun membre du personnel présent.


Un avis de recherche qui mène à l'interpellation des suspects lors d'une vaste opération de police

Au mois de mai, un avis de recherche, basé sur des images de caméra de surveillance qui montrent deux hommes cagoulés ainsi qu'une camionnette, a été diffusé et relayé dans les médias, notamment le RTL info 19 heures (voir le reportage du 26 mai). Interrogé par notre journaliste, le commissaire Lemmens de la police judiciaire fédérale de Charleroi soulignait alors le caractère traumatisant du braquage pour les deux chauffeurs-livreurs: "Les employés sont encore tout à fait choqués par rapport à ce qui leur est arrivé. Vous êtes en train de faire votre travail et des gens armés viennent à votre rencontre, ce n'est pas évident à subir", disait-il. Ce vendredi, l'un d'eux nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous. Il avait appris dans la presse qu'aujourd'hui plusieurs suspects passaient en chambre du conseil de Charleroi pour être fixés sur leur sort (maintien ou pas de la détention).


Détention maintenue

Cinq individus ont en effet été interpellés grâce à l'avis de recherche. Les trois auteurs présumés l'ont été le 15 juin lors d'une vaste opération policière impliquant dix perquisitions menées par 70 policiers à Charleroi et dans la périphérie de Bruxelles. Celles-ci ont également permis de récupérer une partie du butin et saisir des armes. Deux autres complices ont été arrêtés pas plus tard que mardi dernier dans la région de Mons. Et ce vendredi matin, la chambre du conseil de Charleroi a décidé que tous resteraient en prison.


Son lieu de travail devenu lieu de traumatisme

À côté du travail fructueux des policiers et des magistrats, la victime qui nous a contacté tente elle aussi d'avancer. Mais reprendre une vie normale constitue une tâche difficile et l'homme bientôt âgé de 50 ans n'a toujours pas pu reprendre le travail. C'est plus fort que lui, lorsqu'il retourne à la rue des cerisiers, l'émotion le submerge. "Quand je vais avec la psychologue sur mon lieu de travail, là où ça s'est vraiment passé, j'ai des palpitations, mon coeur bat à du 100 à l'heure, j'ai des sueurs. Les souvenirs sont toujours là. La psychologue me dit: "Vous serez toujours choqué, les souvenirs resteront mais il faut vivre avec et atténuer les souvenirs", nous dit-il. "Mais c'est pas facile", ajoute-t-il.

Nous lui demandons ce qui l'a le plus marqué. Il cite deux moments. "Celui de la rencontre face à face avec le voyou qui nous menace avec son arme". Et puis l'angoissante attente dans le local. Lui et son collègue y sont restés enfermés sous la garde d'un braqueur avec une arme semblable à une Kalachnikov: "30 minutes sans savoir ce qui va suivre, commence-t-il, vous avez le temps de réfléchir: qu'est-ce qui va se passer? Est-ce que je vais rentrer chez moi? Ma femme, mes enfants? Vous songez à tout..."


Sentiment de révolte

Mais s'il nous a contactés vendredi matin, ce n'était pas dans le but de raconter son traumatisme mais d'abord pour exprimer un sentiment de révolte. Bien que les autorités judiciaires ne l'aient jamais confirmé, invoquant la présomption d'innocence, de nombreux médias affirment que parmi les quatre suspects interpellés à la mi-juin figurent trois frères de la famille Toto et en particulier Rachid Toto, gangster au lourd passé judiciaire où se mêlent braquages et prises d'otage. Spécialisé dans les Tiger-kidnappings, il avait été condamné à 18 ans de prison par la cour d'assises de Mons en 2007. Évadé de la prison de Namur en 2009, il avait été repris un an plus tard et avait écopé d'une peine supplémentaire de cinq ans. En juin 2016, Rachid Toto avait obtenu une libération conditionnelle moyennant le port d'un bracelet électronique dans un premier temps.

"Je lis que c'est une bande connue. Les braqueurs ont déjà été arrêtés pour de graves faits et ce qui me révolte est qu'ils sont toujours en liberté, qu'ils ont toujours des armes et qu'ils ne font pas leur peine. S'il n'était pas sorti de prison, il n'y aurait pas eu ce braquage. Je suis encore sous le choc en vous parlant parce que franchement savoir que des gens comme ça sont encore en liberté...", juge la victime qui, lors des faits, n'a pas pu voir qui était ses agresseurs, cagoulés.

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