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Plusieurs avocats des meurtriers de Jarfi plaident l'homicide involontaire: "Il a frappé pour faire comme les autres"

La défense d'Eric Parmentier a plaidé vendredi matin devant la cour d'assises de Liège l'homicide involontaire en faveur de son client. La défense conteste l'intention de tuer, la préméditation des faits et le caractère homophobe de l'agression d'Ihsane Jarfi. Les avocats de Jonathan Lekeu ont également affirmé que leur client n'avait pas l'intention de tuer Ihsane Jarfi.

Après avoir dénoncé l'influence du monde institutionnel et politique sur l'enquête, la défense d'Eric Parmentier a contesté la qualification des faits qui sont reprochés à son client. Me Luc Balaes et Me Delphine Rossi ont affirmé qu'Eric Parmentier n'avait pas l'intention de tuer Ihsane Jarfi lorsqu'il l'a frappé. Ils estiment qu'il doit être déclaré coupable de coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner.

Acte non prémédité

Selon Me Luc Balaes, Eric Parmentier et les autres accusés ne se sont pas rendus dans le centre de Liège pour agresser un homosexuel. Leur démarche initiale n'était pas homophobe et leur comportement n'était pas prémédité. Lorsqu'Ihsane Jarfi, entré dans la voiture d'Eric Parmentier, a formulé des propositions homosexuelles, Eric Parmentier aurait été emporté par un sentiment violent. La première scène de coups aurait donc été initiée sous l'effet de la colère. Cette colère aurait persisté tout au long de la nuit, sans s'atténuer et permettre aux accusés de prendre du recul. La préméditation de l'acte n'aurait donc pu s'installer, soutient la défense."La colère engendre une violence inacceptable. Mais les faits n'ont pas été prémédités. Eric Parmentier n'avait pas non plus l'intention de tuer Ihsane Jarfi. Après les faits, il était persuadé qu' Ihsane Jarfi allait rejoindre les maisons qui se situent à proximité du lieu où il a été découvert et qu'il allait rentrer chez lui", a plaidé l'avocat.

Contestation de l'homophobie

Pour la défense d'Eric Parmentier, le mobile discriminatoire doit être écarté. Les avocats contestent la circonstance aggravante d'homophobie. "Rien ne démontre qu'ils sont partis pour s'en prendre à une personne d'une certaine catégorie. Il n'y a pas de discrimination au départ. Ce sont les propos d'Ihsane Jarfi qui ont déclenché la colère d'Eric Parmentier. La motivation d'Eric Parmentier ne vise pas l'homosexualité d'Ihsane Jarfi mais les propos prononcés", a estimé Me Balaes.Selon la défense, une société plurielle se base aussi sur des valeurs différentes.

Ils ne réalisaient pas que Jarfi risquait de mourir

"Si l'on veut une société tolérante, il faut aussi accepter que tout le monde n'a pas les même valeurs. C'est l'esprit de cette loi', a souligné l'avocat.Me Delphine Rossi est revenue sur les circonstances de la mort d'Ihsane Jarfi. Selon elle, les accusés n'ont pas réalisé qu'Ihsane Jarfi risquait de mourir lorsqu'il a été abandonné dans une prairie. Lorsqu'ils ont quitté les lieux, Ihsane Jarfi respirait encore. L'avocate a également contesté les faits de tortures reprochés à Eric Parmentier.La défense de Jonathan Lekeu plaidera ce vendredi après-midi.

La défense de Jonathan Lekeu conteste aussi l'intention de tuer

Les avocats de Jonathan Lekeu ont affirmé vendredi après-midi devant la cour d'assises de Liège que leur client n'avait pas l'intention de tuer Ihsane Jarfi lorsqu'il lui a porté des coups violents. Selon cette thèse, cet accusé ne devrait donc être condamné que pour un homicide involontaire.


Me Jordan Lecuyer et Me Alexandrù Lazar désirent que le jury apprécie la culpabilité de leur client sans tenir compte d'une appréciation générale. Les avocats ont soutenu que la culpabilité des différents accusés doit être individualisée. Ils ont également affirmé que Jonathan Lekeu n'avait pas l'intention de tuer lorsqu'il a porté des coups violents à Ihsane Jarfi. "Dans son esprit, il n'a pas donné les coups qui ont causé la mort d'Ihsane Jarfi", a indiqué Me Lecuyer.

Un suiveur?

Jonathan Lekeu a été décrit comme un suiveur. C'est par mimétisme, peut-être même avec la volonté d'aider ses modèles, qu'il a adopté le même comportement que les autres accusés. "Il ne représente pas le portrait d'un tueur froid. Il n'a pas la personnalité de quelqu'un qui veut tuer. Mais il est assez stupide pour se mettre dans le sillage de deux meneurs. Eric Parmentier et Jérémy Wintgens étaient ses modèles de virilité. Soumis, collant et entraîné par les autres, il a porté des coups irréfléchis. Il a frappé parce que les autres ont frappé, pour faire comme eux. Mais il ne l'a pas fait pour tuer", a plaidé Me Lecuyer.

La défense conteste

La défense a contesté la préméditation en soulignant que c'est Eric Parmentier qui a été le déclencheur des violences, considérant avoir reçu de "sales propositions homosexuelles". Les avocats de Jonathan Lekeu décrivent leur client comme un gamin qui joue à la Playstation. "Il est un type qui se considère comme nul et incapable. Il se situerait à l'opposé de la notion de préméditation."

L'avocat dénonce la médiatisation du procès

Me Lazar a dénoncé la médiatisation de l'enquête et du procès. Pour cet avocat, rien dans le dossier ne démontre que Jonathan Lekeu était animé d'un sentiment homophobe la nuit des faits. Il a dénoncé un acharnement face au désir d'établir dans son chef une culpabilité sur cette circonstance aggravante.Pour la défense, Jonathan Lekeu a collaboré rapidement à l'enquête et s'est montré fiable aux yeux des enquêteurs. Il avait toujours affirmé qu'il n'avait pas frappé Ihsane Jarfi parce qu'il était gay.

Me Lazar a également soutenu que les coups portés par Jonathan Lekeu ne peuvent être assimilés à des tortures. Selon cet avocat, rien ne permet d'établir que Jonathan Lekeu a eu l'intention et la volonté de torturer Ihsane Jarfi. Il ne serait pas démontré non plus que Jonathan Lekeu a commis des faits de traitements dégradants et inhumains.

Uniquement complice?

La défense de Jonathan Lekeu a enfin estimé que leur client ne doit pas être déclaré coupable en qualité d'auteur d'un vol avec violence sur Suger Depret, un handicapé mental sexagénaire qu'il avait agressé en octobre 2011. Selon Me Lazar, Jonathan Lekeu doit être déclaré uniquement complice de ces faits. Les débats ont été suspendus pour le week-end. En raison de la grève générale prévue le 15 décembre, il n'y aura pas d'audience lundi. Le procès reprendra mardi à 09h00 par les plaidoiries de la défense de Jérémy Wintgens et de Mutlu Kizilaslan.

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