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Trois migrants y sont morts: Adrien revient du camp de Moria sur l'île de Lesbos en Grèce (photos)

Des tentes recouvertes de neige, des campeurs frigorifiés, des gilets de sauvetages abandonnés sur la plage: telles sont les images qu'Adrien, un Bruxellois de 33 ans, a ramené de son voyage sur l’île grecque de Lesbos. Le jeune homme, qui a réalisé des photographies à 360°, a voulu montrer la misère dans laquelle les migrants sont plongés. Sur place, il a été confronté à la dure réalité des conditions dans lesquelles ceux qu’il a rencontrés doivent vivre. "Le camp de Moria est dans une situation désastreuse, nous raconte-t-il après nous avoir joints via le bouton orange Alertez-nous. Les migrants sont encore sous tente, il pleut sans arrêt et il y a eu de la neige il y a une semaine".


"Plus de 2.500 personnes sans eau chaude, ni chauffage"

Des milliers de personnes vulnérables ont temporairement élu domicile dans ce camp. "Plus de 2.500 personnes vivent sous la tente, sans eau chaude ni chauffage, y compris des enfants, des femmes et des personnes handicapées", observait début janvier un responsable de l’ONG Médecins sans Frontières. Depuis, plusieurs centaines d’entre eux ont été relogés dans un bateau amarré au port de Mytilène, la plus grande ville de l'île. Mais ce n’est pas suffisant.

  
Un jeune Egyptien de 20 ans est décédé: est-il mort de froid?

Mardi, Adrien a reçu une mauvaise nouvelle. Ahmed Ali Algamelle, l’un des habitants du camp, y est décédé. Le jeune Bruxellois craint que la mort du jeune migrant soit due aux conditions de vie sur place : "Je ne sais pas encore de quoi il est mort, mais à première vue, ce serait les conditions désastreuses. Ils n’ont pas accès aux médecins dans le camp". Plusieurs articles ont été publiés sur des sites d’information grecs mais aucun ne révèle la cause de son décès.

 
Toilettes bouchées et nourriture non cuite: "On dirait une prison insalubre"

Depuis le début de l’année, de nombreux médias grecs et internationaux dénoncent, comme Adrien, le quotidien précaire des migrants du camp de Moria. La plupart dressent le même tableau que celui du photographe bruxellois: "Ils ont les toilettes bouchées, ils font toujours une demi-heure, une heure de file pour avoir à manger, décrit-il. Quand je les ai rencontrés, ils se plaignaient tous de la nourriture qui n’était pas du tout cuite. Ils sont tous dans des tentes igloo avec une bâche du UNCHR dessus (l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés, ndlr), dans la boue, dans l’eau... Il n’arrête pas de pleuvoir pour le moment".

  
Encerclé par des grillages, le campement a des allures de prison à ciel ouvert. "C’est vraiment une prison insalubre, mais ils arrivent quand même à sortir parce qu’il y a des trous dans le grillage", rapporte le jeune réalisateur. Sans compter le fait que cet endroit est surpeuplé.

La Grèce n’est censée être qu’une étape sur le chemin des migrants. Depuis le début de l'exode, l’écrasante majorité d’entre eux cherche à atteindre à pied d’autres pays plus au nord, comme l’Allemagne, pour y introduire une demande d’asile. Mais le 20 mars 2016, tout a changé. Suite à un accord signé entre l’Union européenne et la Turquie, la "route des Balkans" que les migrants empruntaient pour poursuivre leur route a été fermée. Résultat: de nombreux migrants se retrouvent coincés en Grèce où ils doivent attendre longtemps une réponse à leur demande d’asile. 

 
Les camps où les conditions de vie sont plus décentes sont réservés aux familles

Un autre camp de migrants se trouve sur l’île, celui de Kara Tepe. Il offre, lui, des conditions de vie plus décentes. "Tout n’est pas à critiquer à Lesbos car le nouveau camp de Kara Tepe est un camp qui a été remis à neuf et pris en main par la municipalité, il est bien organisé, poursuit Adrien. Ils viennent de mettre des conteneurs dans lesquels les familles de migrants vivent et sont donc plus protégées du froid". Malheureusement, ce camp, déjà surpeuplé, est principalement destiné aux femmes et familles avec enfants. Les hommes seuls doivent donc rester au camp de Moria.

Les migrants moins médiatisés, pourtant la situation reste critique Suite à la mort du jeune Ahmed, les migrants de Moria veulent faire bouger les choses. "Ils essaient de répandre la nouvelle de la mort du jeune migrant, aujourd’hui ils comptent manifester dans le camp" , précise Adrien. Fin novembre dernier, ils avaient déjà tenté d’attirer l’attention des médias après la mort d’une femme et d’un enfant du camp dans l'incendie de leur tente. Des mobilisations qui ne semblent pas porter leurs fruits: la cause des migrants est moins médiatisée que durant l'année 2015.

Quelques jours après nous avoir livré son témoignage, ce lundi 30 janvier à la veille de la publication de notre article, Adrien nous rapportait deux nouveaux décès. "Nous sommes aujourd'hui à 3 morts en moins de 5 jours dans le camp de Moria, Lesbos, Grèce (NDLR: une information confirmée par l'agence de presse Reuters). La situation ne s'améliore pas. Les migrants deviennent de plus en plus nerveux sur place. Certain journaliste commence à arriver sur place. Il est temps de réagir", nous écrivait-il.

Pourtant il en arrive encore tous les jours, dans des proportions moindre que l'an passé, par la mer à l’aide d’embarcations de fortune. Au total, ils sont toujours plus de 15.000 sur les îles grecques de la mer Égée, dont la majeure partie est concentrée sur l’île de Lesbos.

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