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Pierre a 60 ans et déjà 42 années d'activité professionnelle chez Techspace Aero en région liégeoise. À 5 ans de la fin de sa carrière, il redoute son passage à la pension et le budget "serré" dont il disposera. Parallèlement à cela, il dénonce certains "excès du monde politique" et juge le déséquilibre "exagéré".
Pierre est employé chez Techspace Aero, une société renommée de l'agglomération liégeoise qui développe et produit des équipements et des bancs d’essais pour les moteurs aéronautiques et spatiaux. Engagé après un stage concluant dès la fin de ses études techniques, Pierre en est désormais à 41 années d'activité professionnelle chez son premier et sans doute dernier employeur. Un phénomène assez rare de nos jours. "Au début je suis arrivé là en tant qu'ouvrier. Après une dizaine d'années, je suis devenu employé en infrastrucure et je m'occupais de tout ce qui était détection du gaz et des conduites. Et maintenant, je suis toujours dans le même service, mais je gère l'approvisionnement du magasin", nous a-t-il confié via notre bouton orange
Aujourd'hui âgé de 60 ans, Pierre approche petit à petit de sa fin de carrière. Dans cinq ans, il atteindra la "ligne d'arrivée" et pourra profiter de son temps libre. Mais, contrairement à ce que l'on pourrait imaginer, cette perspective ne le réjouit pas. Lui-même se dit d'ailleurs effrayé par l'idée de gérer une enveloppe bien moins fournie. "Là je sais qu'après 45 ans de carrière, j'aurai une pension de 1.400 euros par mois. Cela fait très peur", s'inquiète-t-il.
D'autant plus qu'à la maison, Pierre s'occupe énormément de sa compagne, victime d'un grave accident de la route il y a quelques années. "Elle a perdu ses deux jambes et un oeil", confie Pierre avec émotion. Une situation qui n'améliore pas ses craintes de voir approcher l'âge légal de la retraite.
"Il y a des dérives. On va droit dans le mur"
Mais parallèlement à cela, il y a quelque chose qu'il a du mal à accepter. "A côté de ça, les ministres n'ont aucune idée du prix d'un litre de Diesel ou d'un pain. Et ça, je trouve que c'est exagéré, en décalage total avec la population. Il y a des dérives. On va droit dans le mur. Je dirais même que, d'une certaine façon, ce mur on l'a déjà dépassé", s'énerve-t-il.
Et si Pierre réagit maintenant, c'est suite aux événements qui ont frappé le monde politique la semaine passée, avec la démission de Joëlle Milquet en région wallonne suivie de la démission de Jacqueline Galant au niveau fédéral. "Si je prends les termes qui ont été utilisés par le monde politique, on dit que ce sera une opération blanche. Donc ça ne va rien coûter aux contribuables. Mais ce n'est jamais vrai, parce que les ministres après ils touchent une pension de ministre, et il faut payer tout cela. Alors quand je vois ce que je vais gagner après 45 ans de carrière, et d'autre part comment les finances publiques sont gérées, cela me met de mauvaise humeur".
Et sa future pension de 1.400 euros par mois, Pierre a beaucoup de mal à l'accepter, lui qui n'a déjà plus été en mesure de prendre des vacances depuis 6 ans. Au vu de la situation actuelle, cotiser via les deuxième et troisième piliers de pension, soit les pensions complémentaires et les assurances pension, aurait pu être une solution pour avoir une retraite plus confortable, mais, à l'époque, il n'en avait pas perçu l'intérêt. "Je n'ai jamais cotisé pour ces deux autres piliers de pension, parce qu'à l'époque je n'en voyais pas l'intérêt. Si je devais revenir en arrière, je le ferais. Mais maintenant ça ne sert plus à rien", regrette-t-il.
"Là j'aimerais bien gagner au Lotto"
Heureux à son travail, ravi de son employeur à qui il n'a "rien du tout à reprocher" et pour qui "il est content de travailler", notre témoin se sent donc pris en otage par une société qui va bientôt l'obliger à quitter ses fonctions. Et, bien entendu, revoir drastiquement ses dépenses. "Je vous avoue que je suis inquiet, et comme beaucoup de monde, là j'aimerais bien gagner au Lotto", avoue-t-il.
Et s'il ose pousser un coup de gueule, cet employé insiste sur le fait qu'il n'a rien à voir avec un anarchiste. "Je ne suis pas contre les ministres. Il en faut. Mais en Belgique, je pense déjà qu'il y en a trop quand on voit que chaque région a sa nichée de ministres. Et en plus, il y a au-dessus un gouvernement fédéral. Alors en plus, quand il y en a qui sont incompétents, qui démissionnent, et qui sont remplacés par d'autres, là c'est exagéré parce que même s'ils perdent leur fonction, ils toucheront une grosse pension", dénonce cet homme pour qui le déséquilibre entre travailleurs et dirigeants est trop important que pour être "logique".