Accueil Actu

Brûlée dans un accident à 2 ans, Soukhaina en a aujourd'hui 17 et remercie l'asbl Pinocchio: "C'est comme ma 2e famille"

Nous sommes partis à la rencontre de Claude Parmentier et Soukhaina Aatif. D'un côté, une femme qui donne sa vie aux enfants et familles de brûlés. Elle nous explique son parcours, ses émotions, ses engagements. D'un autre côté, il y a Soukhaina, une adolescente brûlé au troisième degré à l'âge de 2 ans.

Les brûlures sont des marques extérieures qui peuvent freiner la bonne croissance de l’enfant sur le plan physique et psychologique. Depuis près de 20 ans, l’ASBL Pinocchio tend la main aux enfants brûlés et à leurs familles pour leur apporter un soutien physique, psychologique et financier. Nous avons rencontré sa présidente, Claude Parmentier, une femme qui donne sa vie pour accompagner ces enfants, et l’un d’entre eux, Soukhaina, désormais devenue grande (17 ans) mais qui continue à se rendre chaque année au camp d’été organisé par l’association.


Claude Parmentier, pourquoi avez-vous pris les rênes d’une association qui aide les enfants brûlés et leur famille ?

"Je suis infirmière, je travaille au centre des brûlés de l’hôpital militaire depuis plus de 30 ans. J’ai commencé à être bénévole il y a quelques années. L’association a été créée par Martin Margodt en 1997. J’ai repris le flambeau il y a trois ans. J’ai voulu être présidente car j’avais énormément de contact avec les enfants, les familles. Je visualisais bien l’aide dont ils avaient besoin. En parallèle de ma profession d’infirmière, j’ai voulu aller jusqu’au bout et aider l’enfant à l’école, accompagner les familles dans leurs problèmes financiers. C’est une vie consacrée à les aider, jour après jour."


Dans quelles circonstances l’association a-t-elle été créée ?

"L’association a été créée au centre des brulés de l’hôpital militaire de Bruxelles. Mais il y avait peu de choses pour les enfants. Quelques personnes ont organisé un tournoi de foot pour récolter de l’argent afin d’aider les enfants. Par la suite, l’association a pris de l’ampleur et on s’est dégagé de l’hôpital pour devenir une asbl nationale. Elle a des contacts avec différents centres de brûlés en Belgique."


Quelles sont les causes de brûlures les plus fréquentes ?

"Chez les enfants, la tranche d’âge c’est entre 1 et 4 ans, et surtout entre 1 et 2 ans. L’enfant découvre son environnement, il se met debout. Les blessures les plus fréquentes sont les brûlures par liquide chaud, notamment le thé, la soupe, le bain trop chaud, des brûlures par contact avec un radiateur électrique, ou les plaques d’un four par exemple. Pour les adolescents, les causes sont tout autre. Ça peut être une tentative de suicide, une explosion de gaz, des accidents de camping, de scooter, un feu de forêt ou dans un festival. La durée moyenne d’un traitement pour un brûlé va dépendre de la surface et de la profondeur de ses brûlures. S’il a une blessure au 3ème degré, il va falloir opérer et greffer. On a des enfants qui ont dû rester hospitalisés 1 an. Une cicatrice reste active plus ou moins 1 an, et l’enfant on le suit toute sa croissance. "


Comment réagit l’enfant psychologiquement entre le premier jour et la rémission ?

"C’est extraordinaire de voir comment l’enfant est très positif. L’enfant a envie d’avancer, de retourner à l’école, de revoir ses copains. L’enfant n’est pas arrêté par les cicatrices qu’il va avoir. Le plus périlleux c’est avec les parents qui ont un sentiment de culpabilité. Pour aider les adolescents, on organise  des week-ends de survie par exemple. Dans ces camps de vacances, les cicatrices n’ont plus d’importance, ils vont à la piscine, ils sortent. Ils forment un chouette groupe et parfois des couples se forment."

Jouets pour les enfants, camps de vacances, financements, matériels de soins, prévention, l’ASBL Pinocchio intervient sur les tous les terrains. Familles et enfants sont ravis, c’est le cas de Soukhaina, 17 ans et demi, brûlée aux mains et au visage à deux ans.


A quel âge avez-vous été brûlée et quelles ont été les circonstances de vos brûlures ?

"Une bombonne de gaz a explosé dans la cuisine. Vu qu’une plaque chauffait, ça s’est très vite embrasé et toute la maison a flambé. On était cinq, mes parents et mes frères. Nous avons tous été brûlés et mon frère a également participé aux camps Pinocchio avec moi."


Comment s’est passé le processus du moment où vous avez été pris en charge à l’hôpital jusqu’à la rémission ?

"J’habitais au Maroc à l’époque, on m’a directement pris en charge dans un hôpital sur place mais les soins n’étaient pas assez développés car le pays n’a pas beaucoup de moyens financiers. Si j’étais restée, je serais sans doute morte car mes brûlures étaient mal traitées. Avec une amie, mes parents ont contacté le droit des enfants, ils ont des relations et ils ont pu nous rapatrier en Belgique. Mes soins y ont commencé à l’âge de 4 ou 5 ans. Les médecins belges nous ont dit que la cicatrisation n’était pas bonne, les doigts du milieu se collaient. Je ne me souviens pas très bien mais j’ai des images de moi dans l’ambulance quand j’étais toute petite, ça marque ce genre de chose même quand on est encore un bébé.

J’ai passé beaucoup de temps à l’hôpital militaire. Le regard des autres a parfois pesé, quand je quittais le milieu que je connaissais ça devenait compliqué. Tout le monde me connaissait à l’école par exemple donc ça allait, mais quand j’étais dans un lieu inconnu, les gens se tournait sans gêne. C’était moins difficile à l’adolescence car les autres adolescents grandissent, ils sont plus éduqués, ils savent comment se comporter. Après ça reste un âge difficile pour tout le monde, on est mal dans sa peau, c’est toujours très dur de voir ses cicatrices, il y a peut-être moyen de réparer ça avec des chirurgies esthétiques. Je compte faire médecine et je sais que c’est très difficile de récupérer son physique originel. Mais à l’heure d’aujourd’hui, un chirurgien me dira que j’ai un beau résultat. Aujourd’hui, j’ai des soucis de pigmentation et une différence de teinte entre ma peau et la greffe, mais le maquillage ça aide !" (rire)


Vous continuez toujours d’aller aux camps de vacances, après toutes ces années ?

"Pinocchio, c’est comme ma deuxième famille depuis que je suis en primaire. Il n’y a pas de critiques, de regards, on est entre nous. En grandissant, j’ai continué à aimer l’ambiance. J’ai beaucoup d’amis, et je les revois en dehors de Pinocchio. Chaque année je sais que je vais passer un super moment. On fait beaucoup d’activités et c’est ça qui fait la différence avec un camp classique. On a été campé près de Liège, dans les Ardennes, du côté de Verbier, on bouge beaucoup."

À la une

Sélectionné pour vous