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Francis doit quitter son logement, sa femme en home et sa fille malade: "Je ne tiens pas à me retrouver à la rue avec ma fille"

Un père de famille de Gembloux éprouve les plus grandes difficultés à retrouver un appartement alors qu’il devra bientôt quitter son logement actuel. Il nous a expliqué comment les problèmes de santé de ses proches ont fini par l'atteindre physiquement, jusqu'à le pousser à la retraite, et lui faire perdre son appartement de fonction.

Francis nous a contactés via notre bouton orange Alertez-nous pour nous raconter l’urgence de sa situation concernant son logement, ainsi que les graves difficultés auxquelles il doit faire face depuis une dizaine d’années. Sa femme, Fabienne, 48 ans, est gravement malade et vit dans une maison de repos depuis 2011. Sa fille, Manon, 15 ans, est aussi touchée par de sérieux problèmes de santé. Leur situation financière est exsangue : Francis et Fabienne ont accumulé les dettes quand ils ont dû meubler leur appartement. "On n'aurait pas dû. On a ramassé une claque", reconnait le père de famille. Depuis plus de dix ans, ils suivent un plan de médiation pour le règlement collectif de leurs dettes. L’addition de ces difficultés a fini par avoir raison de la santé de Francis. Souffrant d’hypertension, ce père de famille de 58 ans a été mis en pension anticipée en décembre 2015, pour inaptitude physique.

Cela faisait 20 ans qu’il travaillait en tant qu’ouvrier à la faculté universitaire de Gembloux. Outre ces responsabilités, il était le concierge de l’université et occupait à ce titre un logement de fonction, gratuit et sans charge. Pour ces deux activités, un seul et même contrat le liait à l’Université de Liège. Sa mise à la retraite anticipée a donc eu pour conséquence la perte de son logement. Le Bureau économique de la Province de Namur (BEP) lui a signifié sa "volonté de récupérer très rapidement le bâtiment". Compte tenu de "ses revenus très faibles et de son impossibilité de trouver un logement à bref délai", la faculté de Gembloux a mis à sa disposition un autre appartement pour une courte durée, peut-on lire sur le bail qui prendra fin le 4 octobre 2016.

Le temps presse pour Francis et sa fille. Depuis janvier, il cherche activement un appartement, mais les rares pistes qu’il a trouvées n’ont pas abouti. La liste d’attente pour obtenir un logement social est longue et son budget très serré ne lui laisse que peu de possibilités. "Y aurait-il une personne assez gentille pour nous aider à trouver un logement dans notre région ?", demande-t-il. Un coup de pouce serait le bienvenu pour cet homme dont la vie familiale a été très affectée par des problèmes de santé ces 15 dernières années.


Sa femme et sa fille atteintes de maladies du système nerveux central

Francis a rencontré sa femme il y a 16 ans, tout à fait par hasard, nous a-t-il raconté. Il marchait dans la rue du Moulin, à Gembloux, quand il a croisé le regard de Fabienne. "Tu n’aurais pas une cigarette pour moi ?", lui demande-t-il. Francis et Fabienne se sont mariés quelques mois plus tard, en novembre 2000. De cette union est née Manon, en janvier 2001. C’est aussi à ce moment-là que les premiers symptômes de la maladie de Fabienne sont apparus. Elle semblait étourdie, "comme si elle avait bu un verre", se souvient son mari. Pourtant Fabienne ne buvait pas du tout d’alcool. Elle a été hospitalisée à l’hôpital Sainte Elisabeth de Namur pendant une semaine. Le diagnostic est tombé : la jeune maman est atteinte de sclérose en plaques.

Cette maladie se caractérise par la perte de myéline, une membrane qui isole les nerfs. Des lésions sur cette gaine perturbent la faculté des nerfs à transmettre l’influx nerveux, ce qui occasionne une multitude de symptômes (troubles moteurs, perte visuelle, troubles de l'équilibre, de la marche... ), très variables d’une personne à l’autre et chez une même personne au fil du temps. Fabienne a dû arrêter son travail de technicienne de surface. A la maison, elle multipliait les chutes. Trois ans après le diagnostic, Fabienne était désormais contrainte de se déplacer en chaise roulante. Ses difficultés à accomplir les tâches de la vie quotidienne sont devenues telles qu’"il aurait fallu une infirmière à domicile 24h sur 24h", explique Francis. "La meilleure solution, c’était la maison de repos." À 43 ans, Fabienne a donc intégré le home La Charmille de Gembloux, en 2011. Elle n’en sort plus aujourd’hui. "Je ne l’ai jamais trompée. Je vais l’accompagner jusqu’au bout", confie Francis.

Manon, leur fille de 15 ans, est aussi atteinte d’une maladie qui touche le système nerveux : la neurofibromatose. Tandis que la sclérose en plaque se distingue par une gaine des nerfs endommagée, cette maladie se caractérise par l’amas de cellules sur les nerfs — des tumeurs bénignes autour des terminaisons nerveuses. Cette affection génétique touche de nombreux organes et se manifeste généralement par des taches brunes sur la peau. Comme beaucoup de personnes atteintes par cette maladie, Manon a des troubles de l’apprentissage. "Elle ne retient pas, a des difficultés et ne sait pas suivre dans une école normale", explique son père. Actuellement, Manon étudie la couture dans une école professionnelle spécialisée de Suarlée (commune de Namur). Elle y bénéficie de l’aide d’un logopède — un thérapeute des troubles liés au langage. "Pour l’instant tout va bien, on touche du bois. Mais ça pourrait arriver dans un an qu’elle soit dans une chaise roulante", confie-t-il. "J’espère jamais", ajoute-t-il aussitôt.


Son hypertension l’empêche de travailler, il est mis à la retraite

La maladie de Manon a causé beaucoup de stress à son père. "Les problèmes de ma fille, les problèmes d’argent... je n’en pouvais plus", confie-t-il. À partir de 2010, Francis est devenu de plus en plus fatigué et a développé de l’hypertension. Son travail d’électricien chauffagiste l’amenait souvent à porter des objets lourds, et exigeait donc une bonne forme physique. Ces dernières années, il était régulièrement en congé de maladie, travaillant de manière épisodique, "deux, trois mois", avant que son médecin ne le mette à nouveau à l’arrêt. "Je n’y arrivais plus. Le dernier médecin conseil a décidé de me pensionner parce que ça n’allait plus", raconte-t-il. La commission des pensions du service public fédéral a entériné cette décision en octobre 2015.


La perte de son logement social le met en grande difficulté

La pension de Francis a pris cours le 1er décembre 2015. Le 3 décembre, il recevait un recommandé lui indiquant qu’il devait, avant le 31 du même mois, quitter l’appartement associé à sa fonction de concierge. "Il était impossible de trouver quelque chose dans un aussi court délai", raconte Francis. L’Université de Liège met à sa disposition un appartement avec un bail pour la période de janvier à octobre 2016. Mais Francis est prié de trouver un autre logement dès que possible. "La maison est vendue, donc il faudrait que je me dépêche de trouver autre chose", explique-t-il. "Si je pouvais partir la semaine prochaine, ça les arrangerait", dit-il.

Francis s’est inscrit sur les listes de la Cité des Couteliers, une société de service public qui gère des logements sociaux situés sur les communes de Gembloux et de Sombreffe. Mais il a peu d’espoir de ce côté : "Il faudra que j’attende, ça peut durer plusieurs années, explique-t-il. J’ai encore appelé la semaine passée. À chaque fois, ils répètent la même chose, ‘Si on ne vous a pas convoqué, c’est qu’on n’a rien pour vous’."


Sa recherche d’appartement, un casse-tête insoluble

Francis épluche les petites annonces, mais son budget limite drastiquement l’offre : ses revenus s’élèvent à 1.130 euros par mois (770 euros de pension et 360 euros du CPAS). En effet, alors qu’il a travaillé depuis l’âge de 14 ans, Francis doit attendre ses 65 ans pour toucher sa pension complète. En vertu de la réglementation en Région wallonne, il est obligé de louer un deux chambres. Francis serait prêt à dormir dans le salon mais la loi l’interdit "lorsque le ménage comprend un ou plusieurs enfants âgés de plus de 6 ans". Or, pour un appartement de deux chambres, les prix montent à "600 ou 700 euros", constate-t-il. Selon ses calculs, la location d’un appartement à 600 euros le laisserait avec un budget de 95 euros par semaine.

Francis avait bien trouvé un appartement à 580 euros, charges comprises, mais l’annonce a été retirée. "Il y aurait des problèmes d’humidité", rapporte-t-il. Mais il soupçonne que sa candidature n’ait pas été retenue parce qu’il a mentionné le CPAS. En effet, il est délicat de ne pas l’évoquer quand, pour le règlement de la caution (généralement 3 mois de loyer), Francis a besoin d’un bail "en blanc" pour prouver au CPAS qu’il a besoin de cet argent. "Il y a des propriétaires qui refusent dès qu’on parle de CPAS", regrette-t-il.

Lors de notre entretien, Francis nous a confié avoir encore passé la nuit à regarder les petites annonces. En vain. "Je ne trouve aucune solution", déplore-t-il. Le bâtiment dans lequel il vit avec sa fille ayant été vendu, il est désormais très inquiet. "Je ne tiens pas à être pris au dépourvu et me retrouver à la rue avec ma fille", s’alarme-t-il. "Je ne cherche pas le luxe, je voudrais juste être tranquille pour la gamine."

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