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Gabrielle scandalisée par les nouvelles mesures pour les prépensionnés: "C’est une hypocrisie totale! Qui va les engager?"

En découvrant les nouvelles mesures gouvernementales pour les prépensionnés, Gabrielle a eu mal au cœur. Cette habitante d’Ans parle d’hypocrisie et dénonce les difficultés pour les chômeurs âgés de plus de 45 ans de trouver un emploi. Pour appuyer son témoignage, elle se base sur l’expérience de son mari qui cherche activement un job depuis plus d’un an. Sans succès.

C’est un dossier brûlant qui se trouve parmi d’autres sur la table des partenaires sociaux. Les trois syndicats (CSC, FGTB et CGSLB) sont d’accord sur ce point: ils veulent poursuivre les discussions sur la question de la disponibilité des prépensionnés. En vertu des nouvelles mesures prises par le gouvernement Michel, les travailleurs prépensionnés doivent, depuis le 1er janvier, être disponibles sur le marché du travail, et ce jusqu’à l’âge de 65 ans. Ils se retrouvent donc soumis aux mêmes obligations que tous les demandeurs d’emploi: rechercher activement un job avec contrôle de l’Onem, remettre une carte de pointage de chômage, s’inscrire dans une cellule pour l’emploi et pas question de séjourner à l’étranger plus de quatre semaines par an. De nouvelles dispositions qui irritent les organisations syndicales. La FGTB parle de harcèlement et la CSC de mesure stigmatisante.

La semaine dernière, le front commun syndical a d’ailleurs organisé à Charleroi une assemblée des affiliés visés par cette mesure. Plus de 1.500 manifestants se sont alors rassemblés avant de défiler dans les rues pour manifester leur colère et leur inquiétude. Des délégués ont souligné le caractère illogique et irréaliste de cette mesure, qui voudrait ramener au travail des prépensionnés, alors que les jeunes eux-mêmes trouvent difficilement un emploi.


"Un gros coup de gueule"

Une opinion que partage clairement Gabrielle, une habitante d’Ans, en région liégeoise, qui nous a contactés via notre page Alertez-nous pour "crier un gros coup de gueule". Vu l’expérience douloureuse de son mari, elle comprend tout à fait le désarroi de ces personnes touchées par cette mesure, et pointe du doigt la difficulté de trouver un emploi pour les plus de 45 ans."C’est une hypocrisie totale. Comment un travailleur de 59 ans, prépensionné d’ArcelorMittal il y a plusieurs années, peut-il revenir aujourd’hui sur le marché du travail ? Quand je vois mon mari qui tente de trouver un job depuis un an en postulant tous les jours et qui n’a toujours pas obtenu une seule entrevue, c’est impossible. Il va se retrouver dans la même situation que lui", déplore Gabrielle.


"Le souci, ce n’est pas ses capacités, c’est son âge"

Pourtant, son époux âgé de 48 ans a une carrière professionnelle bien remplie qui lui a permis d’acquérir de l’expérience et de développer des compétences spécifiques. "Rafael a travaillé pendant 27 ans pour la même boîte. Il était gérant commercial d’un grossiste et d’un magasin d’équipements sanitaires", indique sa femme. En 2010, il a tout quitté pour lancer une société avec un ami.

Malheureusement, cette aventure s’est vite terminée en raison d’une mésentente avec la compagne de son associé. Mais le Liégeois a vite rebondi. Il a trouvé un nouveau job en tant que délégué commercial. Avant d’être licencié deux ans plus tard à cause de la baisse du chiffre d’affaires de la société. Il s’est alors retrouvé pour la première fois de sa vie au chômage. En tant que demandeur d’emploi, il a suivi et réussi une formation du Forem en énergie renouvelable."Et après plus d’un an au chômage, il a été engagé comme gérant par une PME. Tout se passait très bien jusque fin 2013, lorsque le patron l’a viré pour mettre sa fille à sa place. Depuis lors, il cherche du boulot tous les jours", assure Gabrielle.

Malheureusement, toutes ces candidatures envoyées n’ont donné aucun résultat pour le moment."A chaque fois qu’il postule, il reçoit la même réponse négative. L’employeur assure que son profil ne correspond pas car il ne possède pas les qualités requises. Et on ne lui laisse même pas l’occasion de se vendre lors d’une interview. Mais, cela nous paraît clair. Le souci, ce n’est pas ses capacités, c’est son âge. S’il avait dix ans de moins, ce serait plus facile", s’offusque cette mère de famille.


Le Forem pointé du doigt: "Ils ne servent strictement à rien"

Elle remet également en cause l’efficacité du Forem, le service régional pour l’emploi en Wallonie."Laissez-moi rire, ils ne servent strictement à rien, pas une seule proposition depuis plus d'un an", soutient-elle, avant d’ajouter que cela fait quatre mois que son époux attend d’être intégré dans une formation pratique en tant que chauffeur poids lourd."Le Forem l’a dissuadé de le faire en lui disant que l’attente était très longue et depuis lors, plus de nouvelles", assure Gabrielle.

L’office régional confirme que cette formation est fort demandée aussi bien en Wallonie qu’à Bruxelles ou en Flandre. Les candidats sont dès lors très nombreux. "Plusieurs mois d’attente, ce n’est pas surprenant pour cette formation très prisée car le parc de camions n’est malheureusement pas extensible. Et cette formation prend aussi du temps. Elle dure plusieurs mois", indique Simon Trappeniers, du service communication du Forem. Par contre, il conteste l’absence de réactivité de la part de ses collègues."Une réponse est donnée dans les deux mois maximum. Et si l’on constate que la période d’attente pour une formation peut être longue, on ne dissuade pas un demandeur d’emploi, mais on tente de le réorienter vers une autre formation, en fonction de ses compétences. On cherche ensemble la solution qui donnera le plus de résultats à court terme", soutient Simon Trappeniers.

En ce qui concerne la difficulté de trouver un job pour les plus de 45 ans, il reconnaît également la galère vécue par ces chômeurs, souvent expérimentés, même s’il n’existe évidemment pas de restriction d’âge dans une offre d’emploi. "Au-delà de l’expérience, ils peuvent faire-valoir une série d’avantages pour les employeurs, comme le plan Activa de base pour les chômeurs de longue durée", conseille Mr Trappeniers. Concrètement, si vous êtes dans les conditions requises, en vous engageant, votre futur patron pourra ainsi bénéficier par trimestre d’une réduction ONSS de 400 à 1.000 euros, selon votre âge et votre durée d’inscription au chômage.


"Cela fout la m... dans votre ménage"

En tout cas, ces aides mises en place par les autorités n’ont visiblement pas pu permettre à Rafael de décrocher un nouveau job. Et cet homme ambitieux commence sérieusement à perdre sa motivation et sa joie de vivre. "Il se sent dévalorisé et inutile. Je suis triste pour lui. Et cette situation ruine notre vie de famille. Cela fout la m... dans votre ménage", regrette Gabrielle. Par ailleurs, la situation financière du couple s’est aussi détériorée puisque Rafael ne touche actuellement plus que 800 euros comme allocation de chômage. "Heureusement que je travaille et que j’ai un bon salaire car nous sommes cinq à la maison. J’arrive à payer les factures, mais nous devons quand même nous serrer la ceinture. Avant, on partait en week-end et on mangeait au restaurant grâce à nos deux salaires", regrette la Liégeoise.

Aujourd’hui, Gabrielle n’arrive pas à entrevoir leur avenir de façon positive. "Je suis fâchée contre la société et la vie. Je me demande ce que l’on va faire avec les chômeurs âgés de plus de 45 ans. Qui va les engager ? Si vous n’avez pas de piston, je ne vois pas d’avenir pour eux. On les jette avec leur expérience car ils sont trop vieux pour l’emploi et trop jeunes pour la prépension", déplore-t-elle.

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