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Karin, au chômage depuis 8 ans, se plaint du retard de ses allocations: "Je suis dégoûtée de la situation en Belgique"

Cette habitante de Rhode-Saint-Genèse, 56 ans, ne trouve pas de boulot. Et un crédit sur le dos qu'elle doit rembourser "avant le 13 de chaque mois". Alors, quand ses allocations de chômage tardent à arriver sur son compte en banque, le stress et la colère l'envahissent.

"Je suis vraiment au pied du mur". Karin, 56 ans, est au chômage depuis 8 ans. Le jeudi 5 mars, cette habitante de Rhode-Saint-Genèse (périphérie de Bruxelles) nous a contactés via la page Alertez-nous non sans une certaine inquiétude: "Mes allocations ne sont toujours pas arrivées. Les paiements sont effectués entre le 1er et le 5 de chaque mois d'ordinaire." Elle ne pouvait pas être la cause de ce retard, elle qui avait remis sa carte de contrôle au bureau du syndicat CSC (qui se charge du paiement de ses allocations) dans les temps: "J'ai été au bureau de Hal le vendredi 27 février pour rentrer ma carte de contrôle. Je l'ai remise au guichet parce que j'avais besoin de vignettes, je m'en souviens."


Un crédit qui l'angoisse

Quatre jours plus tard, le lundi 9 mars, elle se rend au bureau de la CSC de Hal pour avoir des explications: "La personne de la CSC se serait bien faufilée sous son bureau tant elle ne savait pas quoi me répondre. Elle m’a timidement répondu que le paiement avait été effectué que vendredi." Finalement, le paiement est parvenu à Karin le lendemain, mardi 10 mars. "J’ai un crédit à rembourser. On menace de mettre fin aux recouvrements si je ne peux pas le faire avant le 13 de chaque mois", peste la chômeuse de longue durée qui touche 43,65 euros par jour ouvrable. "En février, j'ai perçu la somme de 1047 euros". Un chômage qui n'a pas subi de dégressivité en 8 ans, selon la concernée. Elle entre dans l'une des conditions de non-dégressivité. L'une d'elles est d'être âgée d'au moins 50 ans et être au chômage depuis 1 an, ainsi que percevoir également un complément d'ancienneté (pour bénéficier de ce complément, il faut 20 ans de passé professionnel comme salarié, voir toutes les autres conditions).


Un "cocktail est explosif"

Au chômage depuis 2006, Karin, se dit victime de malchance tout au long de sa carrière. "J’ai travaillé dans trois entreprises différentes et j’ai chaque fois été licenciée. J’apprenais peu de temps après, à chaque fois, que les entreprises faisaient faillite."

L’habitante de Rhode-Saint-Genèse trouve dans son âge et son sexe une explication à sa situation. "A plus de 50 ans, c’est impossible de retrouver un emploi. En plus, pour une femme. Je n’ai quasiment pas fait d’étude (NDLR: le parcours scolaire de Karin s’est arrêté en 3e secondaire), ça complique encore ma situation." Un avis que ne partage pas forcément Arnaud Le Grelle, directeur de Federgon (la fédération des partenaires de l’Emploi) pour la Wallonie et Bruxelles. Pour lui, il ne faut jamais baisser les bras, même avec le profil que présente Karin: "Le marché de l’emploi ne sanctionne jamais définitivement quelqu’un." Il reconnait tout de même que le cas de Karin est problématique: "Plus la durée de chômage est longue et plus la qualification est faible, plus le cocktail est explosif."


Son rêve, photographe de presse

Karin dit ne plus calculer les courriers envoyés pour rechercher un job. "Les employeurs ne prennent même pas la peine de me répondre. Neuf fois sur dix, je ne reçois pas de réponse." Pour autant, elle ne perd pas espoir: "J’ai fait il y a quelques années des cours de photographie. Éventuellement, je pourrai travailler comme photographe. Si ça pouvait être photographe de presse, ce serait un rêve."


Un retour progressif

Alors, que faire ? Karin a-t-elle encore une chance de retrouver un emploi ? "Une réorientation ou une qualification est toujours possible même à 56 ans", enchaîne le représentant de Federgon. En revanche, et ça vaut pour tous les âges, il ne faut pas croire qu’un CDI est à portée de main quand on sort d'une longue période d'inactivité: "On va procéder par palier, par étape. On va passer par des stages, des intérims, un CDD avant d’obtenir un CDI. Il faut s’armer de patience surtout quand on sort d’une longue période de chômage." Et d’insister sur l’entourage de ces personnes-là: "Plus le temps passé au chômage s’allonge, plus il y a un risque désocialisation, d’isolement. Il faut que ces personnes soient encouragées, notamment par leur organisme d’intérêt public comme Actiris ou le Forem."


Femmes de ménage, non merci

La Rhodienne pointe justement du doigt le VDAB (l’équivalent d’Actiris ou du Forem en Flandre) dans sa recherche d’emploi. Elle se dit peu suivie et les offres d'emploi soumises ne lui correspondent jamais: "On me propose des postes de femmes de ménages ou de commis de cuisine, ça ne correspond pas à mon profil." En Belgique, selon les chiffres officiels publiés par le SPF Emploi (datés de 2013), le taux de chômage des personnes âgées entre 55 et 64 ans, la tranche de Karin, est de 5,4%. En Wallonie, ce chiffre monte à 6,4%. A titre de comparaison, la tranche '20-29' ans est touchée à hauteur de 15,7%.  



Direction l'Angleterre?

Karin évoque un départ tant la politique menée en Belgique la "dégoûte": "La politique en Belgique ne ressemble vraiment plus à rien. Le gouvernement ne dirige même plus le pays. Il se remplit les poches et on ne se soucie même plus des citoyens. J'envisage très sérieusement de quitter le pays." Et la destination est toute trouvée: "Mon compagnon est anglais. Il est artiste-peintre et tient une galerie d’art. L’Angleterre ? Pourquoi pas..."

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