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"120 gamins mis dehors comme des malpropres" au club de football de Tubize? "Je me bats pour mon fils"

La rumeur court dans le club de Division 2 de football de Tubize, en Brabant wallon. Le club s'apprêterait à se séparer de beaucoup d'enfants inscrits dans ses équipes d'âge. Une information contestée par le club. Si effectivement certains enfants vont devoir continuer leur passion ailleurs, ce n'est pas de gaieté de cœur ni à cause d'une soi-disant volonté élitiste du club depuis l'arrivée de partenaires étrangers. C'est à cause d’un nouveau règlement qui oblige le club à troquer ses équipes évoluant au niveau provincial pour avoir de plus en plus d'équipes au niveau national. Explications.

Christophe (nom d’emprunt), est un père inquiet. Il a contacté la rédaction de RTLinfo.be alarmé par la rumeur qu’il venait d’apprendre: "Mon fils pratique le football et est exclu du club de Tubize parce qu’ils vont arrêter les provinciaux. 120 gamins mis dehors comme des malpropres depuis que des Coréens financent l’AFC Tubize." "Que vont devenir nos gamins qui sont attachés à ce club?", se demandait Christophe via notre page Alertez-nous.


"J'ai vu un gamin en pleurs"

Le père nous a expliqué n’avoir pas encore eu d’explication officielle du club. Mais il a été témoin de scènes. "J’ai vu un gamin dont l’entraineur lui a annoncé qu’il ne serait pas repris l’an prochain. Il était en pleurs. Je n’ai pas pu supporter et je suis parti. Là, je me bats pour que mon fils puisse rester au club." Avec le partenariat conclu à l’aube de cette saison avec l’entreprise sud-coréenne Sportizen -qui a investi dans le club de D2 et y a transféré des joueurs coréens pour l’équipe première-, Christophe a supposé que l’ambition des nouveaux investisseurs était la raison de la mise à l’écart des jeunes joueurs n’ayant pas le niveau des équipes évoluant en nationale.


Les Coréens ne gèrent pas les équipes de jeunes

Une supposition clairement réfutée par Olivier Langendries, le président des Jeunes Sang & Or: "Pas du tout ! Les Coréens n’ont jamais imposé ça. Il y a une séparation entre les pros et les jeunes, pour lesquels nous avons une liberté totale", a-t-il expliqué. Et si certaines équipes de jeunes évoluant dans les séries provinciales vont effectivement disparaitre la saison prochaine, "on est loin d’un nombre de 100 enfants qui devront quitter le club", a-t-il insisté.


Un nouveau réglement vient changer la donne

En réalité, les "responsables" de cette situation sont à chercher du côté de la Pro League (qui chapeaute la D1) et d’une vision à long terme du club. "On était déjà un des seuls clubs de D2 a encore avoir des provinciaux. Depuis de nombreuses années, on réfléchissait donc à réorganiser nos équipes de jeunes. Mais depuis la saison passée, des changements sont intervenus à la Pro League et traduits dans le règlement de l’Union belge qui nous obligent à inscrire de plus en plus d’équipes en nationale", explique M. Langendries. En effet, entre la saison 2013-2014 et cette saison-ci, Tubize a dû ajouter deux équipes de jeunes au niveau national. Une décision prise par la Pro League pour le championnat ELITE 1 (voir encadré), et sur laquelle les décideurs de la Ligue Nationale (qui chapeaute, elle, la D2) se sont alignés. "En assemblée générale, nous avons décidé de calquer les règles des championats ELITE 2 sur ceux des ELITE 1, et ce dans un souci d'uniformité. Il y a déjà des règles différentes entre nous et le football amateur, nous n'allions pas en rajouter entre la D1 et la D2. De plus, je ne doute pas de la compétence du responsable de la formation à la Pro League", explique Jean-Pierre Van Droogenbroeck, le secrétaire de la Ligue Nationale.


Il existait un problème de quantité de joueurs dans deux catégories

Concrètrement, toutes les équipes de D1 et D2 ont donc dû, cette saison-ci, ajouter une équipe de plus en U9 (joueurs âgés de moins de 9 ans) et une de plus en U12. "Il s’agit d’années charnière. On passe d’un football à 5 contre 5 à un football à 8 contre 8 entre les U9 et les U10 ; et de 8 contre 8 à 11 contre 11 entre les U12 et les U13", explique Pierre Cornez, porte-parole de l’Union belge de football. En obligeant les clubs à ajouter une équipe de plus l’année précédant ces changements, "le but était d’éviter que les équipes se retrouvent avec trop peu de joueurs la saison suivante", détaille-t-il. Une volonté confirmée par Kris Van Puyvelde, à l'origine de ce changement. L'ex-entraineur, adjoint et directeur sportif, notamment du Club de Bruges et de l'Olympiakos, est désormais le directeur technique de la Pro League. C'est lui qui coordonne et donne les nouvelles impulsions pour améliorer le niveau des jeunes footballeurs formés dans nos clubs de Division 1 ; et la Division 2 s'aligne donc sur ses décisions.


Tubize se retrouve limité en termes d'infrastructures

Avec deux équipes de plus que prévu à inscrire au niveau national, la saison a été problématique pour l'AFC Tubize, qui avait conservé toutes ses équipes de provinciales. "On commençait à arriver à saturation, tant en nombre d’inscrits qu’en termes d’infrastructures, de terrains disponibles", témoigne le président des Jeunes de Tubize. Cette saison était donc une saison de transition. Le nombre de terrains disponibles n’étant pas extensible, il a fallu sacrifier des équipes. Cela explique que, "dans certaines catégories, on ne sait pas faire autrement" que de voir disparaitre des équipes de provinciale la saison prochaine. Plusieurs enfants vont donc bien devoir quitter le club. "On va conserver environ 400 jeunes. Si on avait dû créer de nouvelles équipes nationales en conservant toutes les provinciales, on serait arrivé à 450", ce qui était trop pour les infrastructures du club.


Voici comment le club tente de limiter les dégâts pour ses jeunes

Mais l’AFC Tubize veut très clairement limiter la casse. "Beaucoup d’enfants qui jouaient en provinciale vont avoir la possibilité de jouer dans les nouvelles équipes inscrites en national. Cela se fait sur base des évaluations" fournies par les entraineurs. S’ils sont assez bons et en fonction des besoins dans les futures équipes, ils seront retenus. D’autant que Tubize "ne va quasiment prendre aucun arrivant pour la saison prochaine. On ne va pas faire de recrutement. Le mot d'ordre est qu’on préfère garder un enfant de chez nous qui est capable d’évoluer au niveau national au détriment d’un enfant venant d’un autre club." De plus, du côté des plus jeunes, puisqu’ils passent par exemple d’un football à 5 contre 5 à un jeu à 8 contre 8, "personne ne va quitter le club".


Tubize n'abandonne pas son rôle social: toujours 2 fois plus de jeunes qu'ailleurs

Pour les enfants recalés, c’est malheureusement à la dure réalité du sport de haut niveau qu’ils vont être confrontés si jeunes. Une sorte de "si tu n'es pas assez bon, tu pars." Mais le club de Tubize refuse de laisser tomber son rôle d’acteur social avec ces gamins et refuse une étiquette de club élitiste. "Si on compare avec d’autres équipes de D2, ils travaillent prafois avec 200 à 250 jeunes pour des villes bien plus grandes que la nôtre", justifie le président des jeunes. Quant aux enfants, "ceux qui jouaient en séries provinciales et qui ne sont pas retenus, on les aide à se recaser dans des clubs de la région", qui évoluent de préférence au niveau provincial également, insiste-t-il. "On prend chaque parent à part et on leur explique la situation en face à face. La plupart comprennent", assure encore Olivier Langendries.

Christophe devrait donc bientôt être invité à cette réunion qui confirmera ou infirmera la rumeur concernant son fils. Et s'il le faut, il se tournera "vers les clubs de Braine-le-Comte ou Rebecq" pour y inscrire son ex petit provincial de Tubize, où il pourra continuer à pratiquer sa passion, mais où "il aura perdu ses amis"...

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