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La friterie de Caius à Nivelles pourrait disparaitre suite à un défaut de permis d'urbanisme: "J'ai créé un petit coin de paradis dans ce monde si triste"

Les règles sont les règles. Même si Caius a aménagé une jolie terrasse en bois sur un petit terrain en location dans le zoning de Nivelles où il a posé sa remorque/friterie, il est en infraction avec plusieurs points du code de l'urbanisme. Il espère trouver une solution, mais une procédure suit déjà son cours.

Caius est ce qu'on peut appeler 'un personnage'. Ce Roumain à l'air très jovial est arrivé en Belgique il y a environ 6 ans. Travailleur, il a rapidement acheté une camionnette de friterie et s'est installé dans le zoning de Nivelles.

En octobre dernier, on lui a volé son outil de travail, qui restait stationné la nuit, "car c'est dangereux de déplacer de l'huile à 200 degrés", nous a expliqué Caius, après avoir contacté la rédaction de RTL info via le bouton orange Alertez-nous.

"J'ai donc acheté une remorque, que j'ai mise sur un terrain privé. Je paie un loyer pour cela".

Il y a quelques mois, pour parer aux intempéries qui ont complètement détrempé son terrain, Caius a posé quelques palettes industrielles en bois, pour que sa clientèle garde les pieds au sec. De fil en aiguille, et d'aménagements en aménagements, c'est devenu une terrasse relativement grande.

Problème: tout cela a été fait sans permis d'urbanisme. Sans surprise, ce fut le début des ennuis pour Caius.


"Je me nourris du bonheur des gens"

Caius n'a pas sans langue en poche. "Je ne tutoie personne, même pas Dieu", nous a-t-il expliqué d'emblée, lors de notre visite, une coupe de Cava à la main "car c'est aujourd'hui mon anniversaire, j'ai 42 ans".

Le Roumain a le contact facile. "Je crois que les gens aiment bien venir ici, en tout cas je fais tout pour que ça se passe bien". Toujours le sourire aux lèvres, Caius accueille tous les jours de la semaine une clientèle de travailleurs avant tout, dans le zoning de Nivelles Sud. "Surtout les camionneurs de l'entreprise d'en-face", précise-t-il.

Et tout s'est toujours très bien passé. "Il y a souvent de l'ambiance ici, j'aime voir les gens et les rendre heureux, je me nourris de leur bonheur", insiste-t-il. "Si les gens n'ont pas de liquide (il n'y a pas de terminal Bancontact, NDLR), c'est pas grave, je leur fais confiance, ils repasseront plus tard, je le sais".


Des simples palettes et puis... une terrasse fleurie

Suite aux intempéries des mois de mai et de juin dernier, le terrain que loue Caius a été en partie détrempé. Difficile d'accueillir correctement les clients dans ces conditions.

"J'ai décidé de mettre des palettes à terre", dans un premier temps. Ensuite, "pour le visuel de l'endroit, j'ai créé une terrasse, que j'ai entourée des toutes sortes des fleurs. J'ai créé un petit coin de paradis dans ce monde si triste".

En effet, entre les entrepôts et les bâtiments d'un certain âge de cette partie du zoning de Nivelles, la terrasse en bois fleurie de Caius égaye quelque peu le paysage. Les clients prennent désormais le temps de s'asseoir et, on peut le supposer, consomment davantage.

Mais ça ne plait pas à tout le monde.


"Une plainte a été déposée"

Bernard Lauwers est échevin à la ville de Nivelles. Parmi ses compétences, il y a les foires et marchés, et donc les marchands ambulants. C'est dans cette catégorie que Caius devrait rentrer, raison pour laquelle c'est Monsieur Lauwers qui a répondu à nos questions.

En réalité, il y a déjà une procédure en cours contre Caius, a-t-on appris. "Une plainte qui a été déposée". La commune, accompagnée d'agents de police, a été constaté les infractions de la friterie de Caius.

"Il y a donc un procès-verbal qui a été dressé, suivant l'article 154 du code de l'urbanisme", nous a expliqué l'échevin. Comme le veut la procédure, "une copie a été envoyée au procureur du roi et à la Région wallonne", compétente en matière d'urbanisme.

Visiblement, même avant d'avoir placé sa terrasse, Caius était en infraction car "il ne peut tout simplement pas se trouver là".


Plusieurs infractions

En effet, en parcourant rapidement le code de l'urbanisme wallon (article 84), on apprend d'abord que "nul ne peut sans un permis d'urbanisme préalable (...) utiliser habituellement un terrain pour le placement d'une installation mobile". Caius devait donc faire la demande pour stationner sa remorque/friterie.

On apprend également que "nul ne peut sans un permis d'urbanisme préalable (...) placer une installation, même en matériaux non durables, qui est incorporée au sol, (et qui est) destinée à rester en place alors même qu’elle peut être démontée ou déplacée". A nouveau, pour sa terrasse, Caius avait besoin d'un nouveau permis d'urbanisme.

Au niveau des sanctions (article 154), il y a des amendes à la clé, et même de la prison (en théorie). Et ce, pour Caius comme pour le propriétaire du terrain. Probablement que cela se limitera au démontage de la terrasse, à la transformation de l'installation fixe de Caius en installation mobile (il devra bouger sa remorque tous les soirs), et à un PV.  


Une pétition signée par les habitués

Caius se rend bien compte qu'il a été un peu trop vite, et qu'il aurait dû demander une autorisation avant d'installer sa remorque (même s'il s'agit d'un terrain privé, on ne fait pas ce qu'on veut en matière d'urbanisme), ou d'aménager une telle terrasse. "Mais les lois ont été faites par et pour les humains, il doit y avoir une solution".

Le fritier, qui rêve d'avoir son propre bar, nous a confié qu'il avait dû emprunter 30.000€ pour la remorque et le mobilier. Et qu'en plus, il doit subvenir au besoin d'une famille. "Moi, j'ai une femme magnifique, qui a deux enfants, et je m'occupe de tout le monde, je n'envoie pas l'argent en Roumanie", tient à préciser Caius.

"Je sais qu'il y a une procédure en cours. J'ai été voir la commune plusieurs fois pour trouver une solution, mais on n'en a pas trouvée avec le bourgmestre et l'échevin. J'ai même fait signer une pétition à mes clients pour montrer que j'avais du soutien, mais ils s'en foutent".


La seule solution: devenir un ambulant...

Caius ne cesse de le répéter: "Je veux juste faire mon travail. Tout ce qu'on m'a proposé, c'est de mettre ma remorque dans le champ à côté, et de l'évacuer tous les soirs". Il serait alors un des marchands ambulants qui paient une redevance à la Ville, sous la responsabilité de l'échevin.

"Mais je suis bien ici, moi, j'ai aménagé tout ça pour les clients, je ne veux pas aller me remettre dans le champ à côté, vous savez ce que c'est de déplacer des litres d'huiles à 180 degrés ? C'est très dangereux".

C'est en effet la seule solution proposée par la commune. "Il faut qu'il demande une autorisation en tant que marchand ambulant, qu'il mette sa remorque (quelques heures par jour) dans les zones prévues à cet effet dans le zoning, et qu'il paie une redevance, comme les autres marchands", a confirmé Bernard Lauwers, qui reconnait cependant que "c'est très beau, tout ce qu'il a construit". L'installation de Caius est actuellement perçue, selon l'échevin, "comme de la concurrence déloyale" par les autres marchands ambulants, et a fortiori par les autres snacks du zoning.

Dans les jours et semaines à venir, Caius s'attend à un courrier ou à la visite des autorités. Il espère toujours trouver une (autre) solution à son épineux problème avec la commune. 

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