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Mémoire défaillante, perte du goût et de l'odorat: comme tant d'autres, la vie de Martine ne sera plus jamais pareille après son accident de la route

Partie en aquaplanage sur une route de la province du Luxembourg il y a un peu moins d'un an, Martine a subi un bouleversement de sa vie après un grave accident de la route. Aujourd'hui, elle a perdu l'usage de certains sens, souffre d'une mémoire à court-terme perturbée et ne peut ni travailler ni encore moins conduire. Mais si elle nous a contactés, c'est d'abord pour que la route soit aménagée pour que d'autres ne connaissent pas le même sort.

Le 12 décembre 2014, la vie de Martine a basculé sur la route N845, au cours d'une journée pluvieuse. Au volant de sa Citroën Xsara, l'habitante de Bertrix (province du Luxembourg) conduisait son fils de 19 ans à l’école, et son beau-frère à la gare de Libramont, quand elle a été surprise par une étendue d'eau. "J’ai vu un mirage sur la route, comme un miroir. Mais il n’avait pas gelé. J’ai freiné fort avant d’arriver dessus et, ensuite, j’ai glissé vers la droite avant de braquer vers la gauche. Je suis passée de l’autre côté de la route et, je me souviens d'être arrivée dans un champ" raconte Martine Duplicy. Voilà ce dont elle se rappelle. Car après, "j’ai un trou noir", dit-elle. Ce sont les autres occupants du véhicule qui lui exposeront la suite, bien plus tard. En effet, au contraire de Martine, les deux passagers s'en sont sortis heureusement beaucoup mieux. Derrière, le beau-frère n'avait rien et se trouvait juste sous le choc. Quant au fils, Nathan, il n'était que légèrement blessé. Un an plus tard, il se souvient et nous répète l'histoire: "On est arrivés dans une flaque d’eau de 10 à 15 mètres de long. Ma maman a perdu le contrôle de la voiture et, on s’est vite retrouvé dans le champ à gauche. On a fait un vol plané et on a atterri dans les arbres." 

"On a fini notre course sur de fins arbres. Les airbags s'étaient déclenchés. Il y avait de la fumée qui sortait du capot. Mon fils a cru que j’étais morte car il m’a vue la tête pleine de sang. Je ne bougeais plus, il m’a appelée plusieurs fois mais je ne répondais pas." peut nous rapporter Martine.

Après le choc et face à l'inconscience de sa mère, Nathan a immédiatement appéle les secours: "J’ai essayé de défoncer la porte car, elle était calée. J’ai ensuite regardé l’état de ma maman qui était ensanglantée. Après j’ai appelé les pompiers et la police est également arrivée sur place." Les policiers de la zone "Semois et Lesse" arrivent sur les lieux du sinistre. Ils découvrent une voiture semi-perchée dans des arbres au sein de la pâture.


Chaos

Transportée aux urgences de l’hôpital de Libramont, Martine a été placée six jours dans un coma artificiel après un passage aux soins intensifs. "Je ne me souviens de rien à part avoir été de l’autre côté de la vie. J’avais une grosse fracture à l’arrière du crâne."

L’accident a provoqué un traumatisme crânien et des lésions cérébrales qui ont eu pour conséquence une perte partielle de la mémoire de Martine. "Elle a gardé depuis lors des séquelles au niveau de la mémoire à court terme", nous confirme Nathan, son fils.

Trois semaines après la sortie de route, Martine rentrait chez elle, mais dans un état fragile. "Ce n’était pas facile. On vivait à trois, avec mon petit frère de 16 ans. Elle ne savait pas faire à manger et avait des problèmes pour s’organiser", se souvient Nathan.

"J’ai véritablement retrouvé mes esprits plusieurs mois plus tard"

Plusieurs mois ont été nécessaires pour que Martine remonte vraiment à la surface. "J’ai véritablement retrouvé mes esprits plusieurs mois tard et, j’ai pu alors me rendre compte que j’avais eu un accident. Quand je relis mon dossier et que je vois inscrit "accident grave", je n’y crois pas" décrit-elle. La vie est encore loin d'avoir retrouvé le cours d'avant. Et ne le retrouvera sans doute jamais. Martine ne pourra plus ni goûter ni sentir. Elle a perdu ces deux sens. "J’adorais les champignons des bois, j’adorais le gibier et je ne les sens plus, tout comme l’odeur du sanglier ou du cerf. J’adorais l’odeur des bois et je ne peux plus en profiter", regrette-t-elle

Pas question non plus pour cette éducatrice au centre de classes de forêt de Wellin de retrouver le travail. Encore moins de reprendre le volant. Elle devra passé un examen auprès du Centre d’aptitude à la conduite et à l’adaptation des véhicules (CARA) qui évaluera si la diminution de ses capacités fonctionnelles lui permet encore de conduire un véhicule motorisé.

Désormais Martine doit apprendre à vivre avec ses handicaps. Notamment, celui de la mémoire. Pour cela, elle a récemment envoyé une demande auprès de l’hôpital de Libramont afin de pouvoir bénéficier d’un traitement, de deux à trois jours par semaine, pour exercer sa mémoire.


"L’aider à mieux gérer sa mémoire au quotidien"

La neuropsychologue, Alison Simon explique que la prise en charge d’un patient présentant les mêmes symptômes "vise à l’aider à mieux gérer sa mémoire au quotidien, en lui permettant de stocker plus d’informations." Concrètement, le patient va apprendre à travailler autrement afin qu’il puisse transformer, "une information verbale en image et essayer de la retenir.  Nous essayons de lui faire faire des liens entre des informations pour les retenir plus facilement grâce à des exercices répétitifs."


"Je sais que d’autres personnes vont subir l’irréversible"

Cérébro-lésée, Martine est repassée sur les lieux de l’accident quelques mois plus tard en compagnie d’une amie et a aperçu de nouveaux panneaux signalant des risques d’aquaplaning. "J’avais une protection juridique, mais, la Région wallonne ne veut pas reconnaître ses torts dans l’accident par manque de preuves.  J’ai cherché des témoins ou des victimes qui ont eu le même accident que moi. J’en ai trouvé deux, dont un policier qui a vécu la même situation en perdant le contrôle de son véhicule qui a terminé sa course dans le même champ. Il faudrait aménager la route à cet endroit-là, mais, il n’y a aucune démarche. J'ai peur car nous nous approchons du mois de décembre et je sais que d'autres personnes vont subir l’irréversible. Que puis-je faire ?" nous a-t-elle écrit via notre page Alertez-nous.



Des travaux prévus au printemps prochain

Selon, Laurence Zanchetta, porte-parole routes et infrastructures du SPW, "ce n’est pas une zone répertoriée à haut risque. Mais, à un kilomètre de l’endroit photographié (NDLR: Martine nous a envoyé une photo du lieu de l'accident), il y a un tournant qui pose problème. Des gens dérapent quand la chaussée est un peu mouillée. La courbure de la route va être refaite et devrait permettre ne plus avoir ce genre d’accidents." Ces travaux de mise en place d’un nouveau revêtement devraient débuter au printemps prochain, a annoncé l’ingénieur en charge de ce chantier.

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