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Renaud et Nirina brisent les clichés sur la natation synchronisée: "Le plus dur, c'est de sourire et de faire semblant que c'est facile"

Pour beaucoup, la natation synchronisée se résume à quelques clichés mêlant chlore, strass, maquillage prononcé, chorégraphies un peu kitsch et jolies filles. Pourtant, cette discipline parfois ignorée ou même méprisée fait appel à de grandes aptitudes physiques de la part des femmes… et des hommes qui l'exercent. Nirina et Renaud, un des seuls hommes en Belgique à pratiquer ce sport - s’entraînent dur pour leur prochaine compétition internationale cet été.

Fanny Bouvry nous a contactés via le bouton orange Alertez-Nous afin de faire découvrir au public la natation synchronisée telle qu’elle la connait. Pour elle, ce sport est devenu une passion qui l'habite depuis de nombreuses années et qu'elle souhaite partager au plus grand nombre. Elle est la co-fondatrice du BRASS (Brussels Aquatic Synchro Swimming), le seul club de natation synchronisée de Bruxelles, où s'entraînent Nirina et Renaud.


"Ça peut paraître joli et plein de paillettes, mais c’est vraiment un sport très complet"

Entraîneuse depuis plus de 20 ans, Fanny a pratiqué la natation synchronisée pendant les trois quarts de sa vie. "J’ai commencé toute petite, à 10 ans. J’en avais marre des longueurs mais j'adorais nager. Pour débuter la natation synchronisée, il faut d’abord être une bonne nageuse ! Ça peut paraître joli et plein de paillettes, mais c’est vraiment un sport très complet, qui demande un bon niveau de natation."

La Belgique ne possède pas encore d’équipe nationale qui pourrait représenter le pays aux Jeux Olympiques, mais dans les deux fédérations, flamande et francophone, des équipes tentent de parvenir aux championnats d’Europe.

1.400 pratiquants en Belgique

Créé il y a deux ans par Fanny et son amie Laurence, le BRASS compte aujourd’hui 130 membres de 7 à plus de 50 ans. "Il n’y avait pas de club sur Bruxelles, alors on s’est dit qu’on allait le créer", explique-t-elle. "Il y a plus ou moins 1.400 pratiquants en Belgique, répartis dans une trentaine de clubs. On fait partie des meilleurs", souligne Fanny avec fierté.

Si son club peut être représenté à un haut niveau, c’est entre-autre grâce à un duo qui s’entraîne depuis de nombreuses semaines pour participer aux compétitions. Et une fois n’est pas coutume, ce duo est mixte.
La natation synchronisée s'ouvre aux hommes

Car depuis peu, les compétitions internationales de natation synchronisée ne sont plus exclusivement réservées aux filles. Les hommes ont officiellement fait leur entrée en 2014. Une nouvelle épreuve de duo mixte a alors été introduite lors des championnats du monde de natation 2015 en Russie.

Avec sa partenaire Nirina Lepage, Renaud Barral, l’un des seuls hommes de Belgique à pratiquer la nage synchronisée, prouve aux plus réticents que cette discipline n’est pas seulement réservée aux filles… Mais Renaud, 29 ans, n’a pas attendu l’avis officiel de la Fédération Internationale pour développer sa passion. Au niveau national, chaque pays a toujours pu faire comme il le voulait et la Belgique n’a jamais refusé à un garçon de pratiquer cette discipline.

"Ça a été un coup de foudre"

"Quand j’étais petit, dans une piscine avec ma sœur, on s'est amusé à faire un remake d’une scène de Titanic", raconte Renaud. "On a fait ça sous les yeux de ma mère, qui a alors inscrit ma sœur dans un club de natation synchronisée. Mais moi aussi, j’étais intéressé ! J’ai donc commencé et j’ai tout de suite accroché… ça a été un coup de foudre", se souvient-il. "J’adorais l’eau, j’adorais nager, je fais quelque chose qui me plait, dans un environnement qui me plait."


"J’ai commencé la nage synchronisée en 2000, j’avais 12 ans et j’ai continué durant toute mon adolescence", raconte-t-il. Après un break de deux ans, le nageur a repris les entraînements en 2008. Depuis, il ne s’est plus arrêté et se lance cette année dans le duo mixte.


"J’ai eu de la chance qu’on m’accepte"

Même si les garçons étaient largement minoritaires dans son club, Renaud n’a pas le souvenir d’avoir été mal accueilli. "Un autre garçon faisait déjà de la compétition dans le club. J’ai eu de la chance qu’on m’accepte. Même s'il a fallu un temps d’adaptation, je ne peux pas dire que j’ai été mal accueilli. Mais il y a peut-être des choses que je n’ai pas vues ou pas réalisées. J’étais assez insouciant à cet âge-là, j’étais presque niais, dans mon monde".

Hors de l’eau, Renaud est employé administratif. De son côté, son binôme Nirina est avocate.


"J’aime le côté artistique de cette discipline"

La jeune fille a freiné la compétition en arrivant à l’université mais désormais, elle s’y est remise sérieusement. "J’ai commencé à 7 ans, j’avais déjà fait de la natation. C’est une amie qui m’a proposée de l’accompagner", raconte la jeune fille. "J’aime le côté artistique de cette discipline, c’est comme la danse, mais c'est différent et plus original."

"On ne peut pas toucher le fond!"

"Lorsqu’on fait une chorégraphie, on ne peut pas toucher le fond... Même quand on pousse une fille vers le haut !", précise l’entraîneuse Fanny. " Pour rester droit, il faut faire des mouvements de rétropédalage comme dans le water-polo".

"C’est aussi un sport qui demande un vrai esprit d’équipe", ajoute-t-elle. "Un ballet à huit, c’est comme une équipe de foot, chacun dépend l’un de l’autre. Et si un membre est absent, qu’il s’est moins entraîné, chacun le ressent."


"Au départ, on a toujours l’impression qu’on arrivera à rien"

De l’entrainement, il en faut pour parvenir à un résultat. "On n’avance pas très vite", reconnait Fanny. "Au départ, on a toujours l’impression qu’on n'arrivera à rien."

La maman de 40 ans a d'ailleurs tenté de transmettre sa passion à sa fille, mais ce sport ne correspond pas à toutes les personnalités. "Elle a commencé la nage synchronisée à 9 ans, puis elle a abandonné. Malheureusement, elle n’avait pas la patience nécessaire. Il faut énormément d’heures d’entrainement, minimum 4 heures par semaine, avant de pouvoir observer le résultat de son travail."

"C'est un sport violent, les commotions et les fractures, ne sont pas rares"

"Le sourire, les paillettes, le maquillage, c'est présent, mais c’est une façade", explique Renaud. "C’est un sport très difficile, de longue haleine, qui demande beaucoup d’investissement, des heures d'entraînements d’un coup. Ce n’est pas comme d’autres sports où en une heure l’entrainement, c'est bouclé. Ce n’est jamais fini, ce n’est jamais prêt !"

"Même s’il n'en a pas l’air comme ça, c’est un sport très violent. C’est un sport où on se blesse, de plus en plus acrobatique. Il suffit que la fille se ramasse mal et tombe sur une autre, ça arrive souvent. Les commotions et les fractures, ce n’est pas rare."

Renaud et Nirina répètent la chorégraphie plusieurs fois hors de la piscine

Lors des entraînements, Renaud et Nirina répètent une à deux fois chaque chorégraphie à sec, sur le bord de la piscine. Ensuite, le duo fait des longueurs dans l'eau durant une heure. C'est le sort qui décidera de la suite du programme! Renaud tend à Nirina plusieurs papiers face cachée. La nageuse pioche et lit le programme du jour: nage en apnée, sur le dos, un bras tendu hors de l'eau, les deux bras tendus vers le ciel...  C'est seulement après ces longueurs que le duo répète sa chorégraphie en musique dans l'eau, sous les yeux des nageuses qui s'entraînent pour une chorégraphie en groupe. 

Renaud et Nirina n'ont pas d'entraîneur pour les observer à chaque répétition, ils utilisent donc une tablette pour se filmer et se corriger.



Une chorégraphie avec des éléments imposés et une chorégraphie libre

Comme pour le patinage artistique, en compétition, les duos réalisent une chorégraphie avec des éléments imposés ainsi qu’une chorégraphie libre. Chacune compte pour la moitié des points de la cote finale. "Nos chorégraphies ont été créées par un entraîneur chorégraphe", explique Renaud. Mais le duo y a mis son grain de sel. "Au fur et à mesure des entraînements, on a remarqué des choses qui n’allaient pas", ajoute Nirina. "On a donc fait quelques modifications, et on a aussi sélectionné la musique".

La nageuse a déjà fait de la compétition en groupe et en duo exclusivement féminin. Pour elle, nager avec un homme comporte de nombreux avantages. "C’est vraiment différent. Quand on nage un duo avec une fille, on essaye essentiellement de faire un jeu de miroir, de faire exactement le même mouvement. Mais dans un duo mixte, on tente de créer un jeu de couple plus intéressant, on fait certains mouvements pour se répondre, un peu comme patinage artistique".


"Il faut vraiment bien s’entendre avec son partenaire"

Le courant passe plutôt bien entre Nirina et Renaud, ce qui est un gros avantage pour une chorégraphie en duo. "Que cela soit avec une femme ou un homme, il faut vraiment bien s’entendre avec son partenaire, sinon cela se ressent très fort dans la chorégraphie, beaucoup plus qu'en groupe", souligne Nirina.

Les entraînements s’enchaînent pour le duo, mais Nirina est loin de voir cela comme une contrainte. "Avant de partir pour les entraînements, je sais que je vais passer un bon moment !"

Nirina et Renaud ont besoin d'un coup de pouce!

En août, Nirina et Renaud s'envoleront à Budapest pour participer aux championnats du monde de natation synchronisée, le point final de cette saison riche en émotion. Le duo a d'ailleurs besoin d'un petit coup de pouce pour sa préparation finale. Une récolte a été lancée afin de permettre à Nirina et Renaud de partir l'esprit tranquille. 

"Nous ne sommes pas du tout suivis par les fédérations internationales. En catégorie master, on paye tout nous-mêmes !", explique Nirina. "On doit financer notre voyage, notre logement, les transports, mais aussi la location de la piscine pour nous entraîner en Belgique!"


Le compte à rebours est lancé

En juin, le duo a récolté l'or à Paris ! Mais rien n'est gagné pour Budapest. "C'est une plus grosse compétition, on ne sait pas trop à quoi s'attendre ni quel niveau auront les autres nageurs!" 

Nirina et Renaud ne baissent donc pas les bras. Le compte à rebours est lancé et d'ici le mois d'août, pas question de chômer, les longueurs et les répétitions vont s'enchaîner!

Pour suivre leur parcours rendez-vous sur la page Facebook de leur club de natation synchronisée.

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