Accueil Actu

Trente ans après sa disparition, Marc retrouve la dépouille de sa soeur: "Elle avait 30 ans, elle était partie voir le football..."

Il y a trente ans, la soeur de Marc a disparu. Sa disparition a été signalée. Des avis de recherche ont été publiés, sans donner le moindre résultat. Il y a quelques semaines, grace à l'évolution des technologies, la soeur de Marc a été retrouvée. Elle a été enterrée sous X il y a de nombreuses années.

"Pour nous, depuis le début, elle était morte. Je ne peux pas vous expliquer mais on savait que c’était notre sœur cette fille. On le savait depuis le début". Trente-et-un ans après la disparition de Nelly Lauwers, la voix de son frère Marc trahit encore une légère émotion. Malgré les années. Pendant plus de trente ans, il n’a jamais été certain de ce qui était arrivé à sa sœur. Jusqu’à ce coup de téléphone, au mois d’août dernier. Il a contacté notre rédaction via le bouton orange Alertez-nous pour raconter son histoire.

Juin 1986. Il fait beau. La Belgique est sur un petit nuage. La population est portée par une ferveur initiée de l’autre côté de l’océan. Au Mexique, les Diables Rouges de Guy Thys font trembler les plus grands et au pays, les Belges vibrent. Ce soir-là, Nelly va suivre le match sur la Grand’Place de Bruxelles. Elle ne reviendra pas.

"Elle avait 30 ans, elle est partie voir le football, se souvient Marc. Et après, on n’a plus eu de nouvelles. On trouvait ça bizarre, on savait que ce n’était pas normal qu’elle ne soit pas rentrée". Les parents de Marc vont à la police et signalent la disparition de Nelly. Un avis de recherche est publié dans le journal. Sans succès. Plusieurs semaines plus tard, un nouvel article dans le journal attire l’attention de la famille. "C’était un petit article comme quoi ils avaient trouvé un cadavre inconnu à Molenbeek. Dans l’article, il y avait une description. On a tout de suite pensé à Nelly. Mes sœurs ont été voir la police mais ils nous ont dit que non, ce n’était pas elle". D’après Marc, ses parents se sont rendus à plusieurs reprises voir la police. Sans que cela ne permette d’obtenir des informations sur Nelly.




"Il n'y a pas eu un jour où on n'a pas pensé à elle"

Les années passent, sans que la douleur ne cicatrise complètement. "Franchement, on a souffert. Il n’y a pas eu un jour où on n’a pas pensé à elle" confie Marc. Sans savoir, c’est plus difficile de faire son deuil mais au fond, la fratrie savait. "Entre frères et sœurs, on en a parlé. On a toujours su que c’était elle". Pendant plusieurs années, les Lauwers n’ont plus de nouvelles de la police. Les autorités contactent une des sœurs de Marc il y a une dizaine d’années mais "on lui a juste demandé si Nelly était toujours disparue. Elle a répondu oui, puis plus rien" poursuit notre témoin. Mais cet été, l’enquête a connu un coup d’accélérateur.


Des chaussettes de tennis blanches

A la fin du mois d’août, la sœur de Marc reçoit un nouveau coup de téléphone de la police. Elle est convoquée. "Nous y sommes allés à plusieurs, détaille Marc. Ils nous ont expliqué qu’ils avaient retravaillé sur notre dossier et nous ont demandé quelques détails supplémentaires sur Nelly. Quand nous étions enfants, on rigolait parce que Nelly portait toujours des chaussettes de tennis blanches. Et là le policier me dit que oui, la personne retrouvée portait en effet des chaussettes de tennis, blanches".

Marc et ses sœurs se soumettent alors à un test ADN. "Une semaine après, on a eu un rendez-vous avec une juge et une assistante sociale. Ils nous ont dit que le test ADN était positif à 99,9%". Pour Marc et ses sœurs, c’est (enfin) la confirmation de ce qu’ils ont toujours su. Cette personne retrouvée décédée à Molenbeek, c’était Nelly.


Les parents sont morts "dans le chagrin" sans savoir

Marc et ses sœurs savent enfin ce qui est arrivé à leur sœur. Mais si le soulagement est là, il cohabite avec une certaine colère. "Ce n’est quand même pas normal qu’il ait fallu 31 ans pour découvrir que c’était ma sœur, argumente Marc. Nos parents sont morts dans le chagrin, ils n’ont jamais su ce qui était arrivé à leur fille. D’après moi le dossier de Nelly a été mis en attente mais le policier m’a dit que non".

En fait, ce sont plutôt l’évolution des technologies et l’augmentation des effectifs au sein de la cellule spécialisée de la police qui peuvent expliquer la soudaine résolution de "l’affaire Nelly".

Mais l’histoire ne s’arrête pas (encore) là pour Marc et ses sœurs. S’ils connaissent désormais le destin de Nelly, ils n’ont pas encore récupéré sa dépouille.


"Cela risque de prendre encore un peu de temps"

"La juge est venue avec nous jusqu’au cimetière d’Evere, raconte Marc. C’est là que Nelly a été enterrée, sous X. Il n’y a rien. Elle est juste enterrée comme ça dans l’herbe. Il n’y a pas une plaque, pas une pierre. On voudrait l’enterrer dignement et lui rendre son nom mais pour ça, on doit encore passer en justice".

La dépouille de Nelly repose depuis des années dans le cimetière d’Evere. C’est la procédure. Quand l’identité d’une victime reste inconnue, son corps est enterré sous X. C’est-à-dire qu’un acte de décès a été établi. Et c’est pour cela que Marc et ses sœurs doivent repasser, aujourd’hui, devant un tribunal.

"Un acte de décès, c’est un acte d’état civil, précise Patrick Wautelet, professeur de droit privé à l’Université de Liège. Or un acte d’état civil doit être basé sur la vérité et il faut respecter certaines règles quand il s’agit de le modifier". S’il s’agit d’une erreur matérielle, la commune prend contact directement avec le parquet et l’acte peut être modifié après l’avis du procureur du Roi. "Mais ça c’est si on parle de petite erreur, d’une faute d’orthographe dans le nom de famille ou d’une coquille dans la date de naissance. Dans le cas qui nous occupe, ce n’est vraisemblablement pas une erreur matérielle » ajoute Patrick Wautelet. La rectification d’un acte d’état civil doit alors se faire devant le tribunal de la famille. "C’est une procédure tout à fait classique dont l’issue est à peu près certaine. Par contre, cela risque de prendre un peu de temps, car ce n’est pas un dossier prioritaire" conclut l’avocat.

À la une

Sélectionné pour vous