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"Mon jardin sera bientôt une route": visée par un plan d'expropriation, Christiane est choquée mais n'entend pas bouger de chez elle !

C’est une histoire bien triste que nous rapporte Christiane, via le bouton orange Alertez-nous. Cette habitante d’Ottignies, qui réside dans la même maison depuis 60 ans, devra normalement bientôt déménager. En cause : une expropriation due à un projet de nouvelle route, qui effacera sa maison, ainsi que quatre autres, de la carte d’Ottignies.

"Cela fait 60 ans que j'habite ici et on veut m'exproprier, la commune ne nous a pas avertis, mes voisins et moi, c'est un scandale !" C'est très émue, fâchée et choquée que Christiane prend contact avec la rédaction de RTL Info. Elle et ses voisins ont été prévenus il y a quelques semaines que la ville d'Ottignies voulait exproprier leurs demeures.

La raison ? Un projet de route et de tunnel pour mieux desservir un lotissement de bâtiments, qui prendra bientôt place quelques mètres derrière la maison de Christiane. "Je l'ai su par une voisine !", s'insurge-t-elle. "La commune s'est excusée de ne pas nous avoir prévenus plus tôt, mais ça ne change rien au problème".

Un projet d'utilité publique ou privé ?

Pour justifier cette future expropriation, la bourgmestre d'Ottignies, Julie Chantry, parle de "redynamisation". "Ce plan de reconfiguration du centre-ville, c'est positif, ça s'applique dans un objectif de redynamisation. La friche industrielle qui est située derrière la maison de cette dame deviendra un quartier de 400 logements. Pour l'instant, ce quartier est accessible uniquement par un accès, il est donc nécessaire de créer une nouvelle route".

Pour la commune, il n'y a pas d'autre choix. Mais la bourgmestre se veut rassurante. "Le Brabant Wallon a besoin de logements. Le meilleur positionnement pour ce projet, c'est à cet endroit, nous avons envisagé d'autres options, mais il s'avère que c'est la plus adaptée. Cependant, nous mettrons tout en œuvre pour que les personnes ne se sentent pas lésées, on veillera à ce que leurs maisons soient achetées à un prix tout à fait correct".

En effet, l’article 545 du Code civil et l’article L1 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique précisent que l’expropriation doit donner lieu à une "juste et préalable indemnité" envers la personne expropriée. En clair, l'argent doit arriver sur le compte de l'habitant avant de devoir quitter le domicile.

Si le promoteur du projet ne parvient pas à accord avec les habitants des maisons, ce sera à un expert d'estimer le prix de la maison, que le promoteur devra verser à l'habitant, forcé de devoir quitter sa résidence. "La meilleure chose serait que le promoteur arrive à un arrangement avec les habitants. Ce serait l'idéal pour toutes les parties", conclut la bourgmestre.

Francis, voisin de Christiane, pointe, selon lui, le nœud du problème. "Je n'ai rien contre ce futur lotissement, mais est-il vraiment nécessaire de construire une deuxième route d'accès ? Est-ce vraiment un projet d'utilité publique ? Puisqu'il y aura des bâtiments construits et qu'une société est derrière cela, ça ressemble tout de même à de l'utilité privée. Ça doit être une première en Wallonie : une commune qui exproprie ses habitants au profit de la construction d'un lotissement privé".

"Alors que l'on vivait tranquillement, j'habiterai bientôt au milieu d'un carrefour, avec deux routes qui encerclent ma maison. La commune nous a prévenus tardivement", déplore Marouane, un autre voisin solidaire de Christiane. Pour se défendre, les habitants ont commencé à faire circuler une pétition, qui récolte de nombreuses signatures dans la région.

Les habitants peuvent se battre

Mais est-on condamné à quitter son domicile lorsqu'une expropriation menace ? Pour Jehan De Lannoy, avocat spécialisé dans le droit immobilier, ces habitants d'Ottignies doivent faire valoir leurs droits. "La personne qui s'estime victime doit faire toutes les démarches nécessaires. Il faut d'abord se manifester dans le cadre de l'enquête publique préalable à l'arrêté d'expropriation. Ensuite, une citation en justice a lieu, et il est important que la personne soit là, car la loi dit que c'est à cette audience que l'on doit faire valoir ses arguments".

Comme l'a souligné Francis et comme le confirme Me De Lannoy, c'est l'intérêt public qui doit prévaloir lors d'une expropriation. "On ne peut le faire que dans un but d'intérêt public. En cas de contestation, ce sera au juge de paix de décider : et il est possible qu'il estime que ce projet ne soit pas aussi important que le domicile de la personne. De ce fait, il y a une balance des intérêts à faire par le juge".

Pour les habitants, c'est très clair : le combat continue, et ils resteront solidaires de Christiane, bien démunie face à ce qui lui arrive. "Mes parents et mes grands-parents ont vécu ici. C'est toute ma vie, et du jour au lendemain, on veut tout détruire, me mettre dehors. Je n'en dors pas de la nuit depuis plusieurs jours, à chaque fois que je me lève, je pense à cette catastrophe qui nous est tombée dessus…"

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