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Zoé, 14 ans, attrape LA GALE: "Une semaine après notre retour en Belgique, c'était la catastrophe!"

Catherine, sa mère, ne décolère pas. Elle est persuadée que sa fille a été infectée dans l'hôtel 4 étoiles à l'hygiène douteuse où elles passaient leurs vacances. La gale est provoquée par un acarien qui creuse des galeries dans la peau. Diagnostiquée tardivement, Zoé a subi un long traitement et garde des traces.

"Je voulais d'abord du soleil". Pour elle et ses deux enfants, Catherine a choisi Agadir, populaire station balnéaire dans le sud du Maroc. Une formule "All-in" dans un grand hôtel quatre étoiles au bord de la mer pendant trois semaines au mois d'août. Cela faisait plus de cinq ans qu'ils n'étaient plus partis en vacances et par conséquent elle était prête à consacrer un budget non négligeable pour s'offrir ce beau séjour, soit près de 5000 euros. Mais les vacances n'ont pas été à la hauteur des attentes qu'elle était en droit d'avoir. Et sa fille Zoé en gardera peut-être des cicatrices à vie, comme un tatouage raté sur sa peau.


"Saleté dans cet hôtel, jamais vu ça"

Les choses ont mal démarré dès l'arrivée à l'hôtel. "On est arrivés à 10h20, on a dû attendre 15h30 et la chambre n'était pas faite. Elle était vraiment dans un état lamentable, le lit n'était pas fait, il y avait même du sang sur une tablette", commence l'habitante de Cerfontaine. On leur trouve une autre chambre. Pas mieux: "Dans la nouvelle, le lit n'était pas fait non plus", se souvient-elle. En fait, assure la mère de 52 ans, au cours des trois semaines de séjour, "on ne nous a pas changé une seule fois le lit". Pourtant, "je mettais les draps par terre", dit-elle. Mais "on les reprenait et on les remettait sur le lit". Le laisser-aller dépassait le seul cadre de la chambre: "La saleté dans cet hôtel, jamais vu ça", s'offusque la quinquagénaire.

S'il n'y avait que ça. Mais il n'y a pas eu que ça.


Un acarien qui creuse des galeries et y pond ses oeufs

Il y a eu ce parasite microscopique, cet acarien au nom latin de Sarcoptes scabiei hominis. Les femelles fécondées de cet invertébré de la classe des arachnides pénètrent dans la couche superficielle de la peau de l'homme, la couche dite cornée et qui est essentiellement constituée de cellules mortes. Dans cette tranche de l'épiderme, la femelle acarien creuse de minuscules galeries et y pond ses oeufs. Ces fins tunnels sont parfois visibles à l'oeil nu à la surface de la peau. On les appelle les sillons scabieux. Et l'endroit où "loge" l'acarien s'appelle la vésicule perlée. L'acarien adulte ne vit pas très longtemps, entre un et deux jours. Il faut y ajouter deux à cinq jours pour la larve d'acarien qui sort de l'oeuf, ce dernier mûrissant dans la peau dix jours avant d'éclore. L'envahissement par cet acarien provoque une réaction immunitaire qui se manifeste essentiellement par des boutons sur une partie plus ou moins importante du corps. C'est LA GALE.


Un diagnostic tardif

Après une dizaine de jours à l'hôtel, Zoé, 14 ans, a "commencé à se gratter un petit peu", raconte sa mère. "J'ai d'abord pensé qu'il s'agissait de son allergie à la crème solaire. Et puis elle a commencé à avoir des éruptions cutanées", poursuit-elle. Les vacances continuent et la propagation des boutons aussi. "Juste avant de rentrer en Belgique, elle avait des boutons dans son dos", se rappelle-t-elle. L'infection s'accélère. "Une semaine après notre retour en Belgique, c'était la catastrophe", raconte Catherine. Le médecin de famille ne diagnostique pas la gale et prescrit un anti-histaminique, relate-t-elle. Mais ça avance encore. "Ses mains étaient remplies de boutons. Mais aussi tout son corps: son dos, sa poitrine, ses épaules, dans son cou", décrit notre interlocutrice.

Mère et fille finissent par consulter un dermatologue. Le verdict est sans appel: gale floride ("floride" signifiant des lésions cutanées qui sont bourgeonnantes et rouges). Le spécialiste observe que l'infection est particulièrement bien installée. "Quand il a vu ça, il a même pris des photos pour ses élèves en disant que c'était incroyable, qu'il n'avait jamais vu ça", prétend Catherine. Sur base de la lecture d'un document de la Région wallonne sur la gale, on peut supposer que Zoé souffre de gale profuse, une complication de la gale provoquée par un diagnostic tardif.


Le traitement: "Ce produit brûle énormément"

Un traitement à base de deux médicaments est prescrit pour Zoé, mais aussi pour sa mère et son frère. Cette infection cutanée est en effet contagieuse, essentiellement par contact direct et dans une moindre mesure via les vêtements et les draps. Lorsque Catherine nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous au début du mois de novembre, elle et sa fille suivaient toujours le traitement. "On applique le produit sur l'entièreté du corps. Ce produit brûle énormément. Je l'ai mis aussi sur mon corps, je marchais comme un robot, tellement j'avais mal partout. Pareil pour ma fille qui pleurait, pleurait. C'est comme si on brûlait la peau avec ce produit-là", décrit-elle. "Après, on prend trois médicaments. Et dix jours après, on se rebadigeonne et on reprend trois médicaments", ajoute-t-elle pour être complète.


Draps et vêtements lavés à 60 degrés à plusieurs reprises

Étant donné le caractère contagieux de la maladie, tous les draps et vêtements ont dû être lavés à 60 degrés au moins, ceci après chaque pris du traitement. À cette température, les adultes et leurs larves périssent en quelques minutes. C'est ce qu'a fait la mère de famille. Les rapports sexuels sont également contre-indiqués durant le traitement. "Afin de ne pas se recontaminer ou de ne pas recontaminer son partenaire sexuel ou son conjoint, il est recommandé d'éviter les rapports sexuels jusqu'à la fin du traitement", peut-on lire sur un site d'informations dermatologiques.

Le traitement a agi. Aujourd'hui restent les stigmates sur la peau de la jeune Zoé. "Ça va un petit mieux, ça lui fait moins chatouille mais elle a des cicatrices partout sur le corps. Comme si elle avait eu la rougeole ou la varicelle et qu'elle s'était grattée, grattée. Ça fait comme des creux dans la peau", décrit sa mère. Heureusement, "la gale va jusqu'au cou mais n'atteint pas le visage", a-t-elle appris et observé avec soulagement.


Des centaines de millions de cas par an dans le monde

La gale, Catherine connaissait mais jamais elle n'aurait pensé être touchée un jour. "Mes parents et mes grands-parents m'en parlaient mais pendant la guerre et qu'on nettoyait même ça avec du soufre. Jamais je n'aurais pensé qu'on l'attraperait aujourd'hui, en vacances", confie-t-elle. Mais la gale n'a pas disparu avec la guerre mondiale.

"Il y a environ 300 millions cas de gale dans le monde chaque année. En Belgique, l’incidence est mal connue car ce n’est pas une maladie à déclaration obligatoire", renseigne l'agence pour une vie de qualité de la région wallonne.


Signalement trop tardif au tour-opérateur

Celle-ci est persuadée que sa fille a contracté l'infection à l'hôtel. Elle estime dès lors qu'elle devrait obtenir une réparation, ne fut-ce que pour les frais occasionnés. "Tout le monde a dû être soigné et ça nous a coûté un pont", dit-elle. Elle a contacté le Tour-Opérateur. Mais trop tard. Elle devait le faire dans les quatre semaines qui suivaient son retour mais l'organisateur de voyage dit n'avoir reçu les remarques pour la première fois que 13 semaines après son retour en Belgique. "Pour nous, il est alors très difficile de contacter le fournisseur et de faire une enquête sur place", a justifié le Tour-opérateur dans un courrier, ajoutant toutefois qu'il tiendrait compte des observations de Catherine lors de la prochaine évaluation avec le fournisseur, en l'occurence l'hôtel d'une grande chaîne internationale.


Entamer une procédure de conciliation?

Il reste à Catherine une option: contacter la commission de Litiges Voyages. Cette association subsidiée par le SPF (Service Public Fédéral) Justice peut entamer une procédure de conciliation entre les deux parties afin de trouver un accord mais encore faut-il que le tour-opérateur accepte une conciliation. Dans ce cas-ci, Catherine souhaite probablement une indemnité financière.

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