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Athlétisme: Marcell Jacobs veut "maintenir le standard" de Tokyo

Marcell Jacobs, l'inattendu champion olympique du 100 mètres l'été dernier, confie à l'AFP son ambition de "maintenir le standard" atteint à Tokyo, lors de cette nouvelle saison où le sprinteur italien de 27 ans se sait attendu, notamment par ses rivaux américains.

Aux Mondiaux d'Eugene aux Etats-Unis, l'été prochain, il compte bien "donner du fil a retordre" à leur chef de file, Christian Coleman, absent à Tokyo pour infraction au règlement antidopage.

Question: Comment vont les jambes et la tête après deux meetings en salle?

Réponse: "Mentalement, je suis bien, je voudrais courir tous les deux jours. Physiquement, on est en train de retrouver la forme. La première course (de la série sur 60 mètres à Berlin le 4 février) avait été moyenne car il y avait un peu de tension après six mois sans compétition. Mais dès la deuxième, je me suis amusé."

Q: Quelle importance accordez-vous à la saison en salle?

R: "Le 60 mètres me permet de sortir de ma zone de confort, dans la mesure où ma force (sur 100 m, ndlr), c'est à partir des 40, 50 mètres. Je dois donc beaucoup travailler sur les 30, 40 premiers mètres pour progresser. Je voudrais m'approcher le plus possible du record européen (Dwain Chambers en 6 sec 42, cinq centièmes plus rapide que le meilleur chrono de Jacobs), mais le 60 m, ce n'est pas simple, tu ne peux rien rater. Mon objectif, c'est surtout d'essayer de gagner tout ce qui est possible pour maintenir le standard établi à Tokyo."

Q: Un regret d'avoir clos la saison dernière aussitôt après vos deux médailles d'or (sur 100 m et relais 4x100 m)?

R: "La compétition m'a beaucoup manqué, cette adrénaline de défier les adversaires. Mais après les Jeux, j'étais épuisé, pas seulement au niveau physique, mais aussi mental. J'avais commencé la saison en salle, ce que la moitié des athlètes ne font pas, elle avait été longue. Je voulais éviter de me faire mal. Il fallait se reposer car cette nouvelle saison va aussi être importante avec deux Mondiaux (en salle en mars, en plein air en juillet)."

Q: Depuis Tokyo, vous êtes régulièrement interrogé sur des soupçons de dopage. Comprenez-vous ces doutes, notamment exprimés par les médias britanniques, au regard des affaires ayant touché le sprint dans le passé?

R: "Arrivé à un certain point, continuer à parler de ces choses est assez triste de leur part. S'ils ne réussissent pas à s'expliquer qu'un autre que le favori ait gagné, ce n'est pas ma faute. Ce n'est pas correct à partir du moment où ils n'ont aucun type de preuve. Qu'il y ait eu des cas dans le passé, on le sait tous, mais cela ne veut pas dire qu'il doive y en avoir à l'avenir."

Q: Comment s'explique ce gain de près de deux dixièmes dans vos performances en quelques mois (de 9 sec 95 en mai à 9 sec 80 en août)?

R: "En réalité, déjà en 2018, c'était possible de courir sous les 10 secondes. Mais je faisais encore le saut en longueur. Je courais en 10 sec 08, avec une technique qui n'était pas parfaite. En 2019, j'ai réalisé 10 sec 03 quand je faisais encore la longueur. Là encore, j'aurais pu descendre à 9 sec 94, 9 sec 95 si j'avais soigné davantage la technique et tout ce que j'ai travaillé ensuite, quand j'ai arrêté la longueur. Il faut aussi rappeler que j'ai toujours eu des problèmes physiques, je ne courais jamais sans tracas physique. L'an dernier a été la première saison où j'ai pu courir sans ces soucis. Ce saut n'a donc pas été si soudain, cela fait déjà quelque temps qu'il aurait dû être fait."

Q: Vous allez être à présent l'un des athlètes les plus surveillés, cela nécessite-t-il une attention particulière?

R: "Il faut être attentif à beaucoup de choses, mais ma vie n'a pas changé tant que ça. Sur le terrain d'entraînement le matin, à la maison avec la famille l'après-midi. Beaucoup de choses ont changé, on me reconnaît, il y a des invitations, mais je vais toujours sur le même terrain, avec les mêmes personnes, j'emmène toujours les enfants à l'école..."

Q: Vous avez déjà évoqué l'aide décisive de votre coach mental, en quoi vous a-t-elle aidé?

R: "On avait construit un puzzle parfait - physiquement et techniquement j'étais bien - mais il manquait une pièce. Il y avait cette peur d'affronter les courses et les adversaires. Je me focalisais trop sur les autres, pas assez sur moi. Le travail fait a été un travail personnel, pas seulement sur la préparation des courses. Je me suis confronté à des choses dont je ne voulais pas entendre parler."

Q: Elle vous a notamment aidé dans votre histoire personnelle avec votre père, resté aux Etats-Unis quand votre mère est revenue en Italie juste après votre naissance (il a repris contact avec son père, ndlr)?

R: "Il y avait un blocage. Je savais que j'avais un père, mais je ne voulais rien en savoir. J'avais construit un mur et elle m'a aidé à l'abattre. Ce n'est pas tant le fait de se parler tous les jours ou de se dire certains choses, mais le fait qu'il n'ait plus ce mur, cela a été un travail fondamental."

Q: A Liévin, jeudi, vous allez retrouver Ronnie Baker, cinquième sur 100 m à Tokyo. Est-ce le début de votre grand défi aux athlètes américains, Christian Coleman en tête, absent aux JO?

R: "Oui, jeudi ce sera le premier vrai défi contre les meilleurs américains, et contre l'un des meilleurs sur 60 mètres. Ce sera un beau combat et une belle stimulation pour moi d'essayer de rester le plus près possible sur la première partie de la course. Coleman? Il sera favori sur 60 mètres, mais je pense pouvoir lui donner du fil à retordre sur 100 mètres lors des Mondiaux en plein air."

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