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F1: pour Michèle Mouton, "pas assez de filles qui commencent"

"On n'a pas assez de filles qui commencent" la compétition automobile, estime Michèle Mouton?, ex-pilote de rallye et présidente de la Commission Femmes dans le sport automobile de la Fédération internationale de l'automobile (FIA), selon qui "si on avait la même base que les hommes, on aurait depuis longtemps des femmes au sommet".

Q: Votre expérience de femme pilote a-t-elle été différente de celle d'un homme?

R: "Je ne crois pas. Quand on commence un sport, c'est la même approche pour tous. Au contraire, je pense être une des rares dans ce milieu entre 1975 et 1986 à n'avoir jamais eu à solliciter un sponsor. Mon père a été le premier pendant un an, puis les autres sont venus. J'ai toujours couru facilement. La différence, quand vous étiez une femme et que vous commenciez à faire des résultats, c'est que ça se remarquait davantage. Quand j'ai commencé à gagner, on a dit que je n'étais pas conforme car je conduisais une voiture de série sportive. Il a fallu attendre le Championnat du monde pour que mon moteur soit vérifié conforme. A partir de là, les rumeurs se sont tues. J'étais une femme qui conduisait comme les autres et vite. Je n'ai plus jamais eu de problème."

Q: Comment la situation des femmes dans le sport automobile a-t-elle évolué depuis?

R: "A mon époque, il y avait beaucoup plus de femmes en rallye. Ça ne surprenait pas plus que ça. Mon premier rallye, par exemple, était exclusivement féminin, on était une vingtaine ou une trentaine de voitures. Aujourd'hui, ça serait impossible. Il y a des femmes dans toutes les catégories, ce qui n'était pas le cas avant, mais il n'y en a pas énormément. Elles pourraient progresser si elles avaient plus de budget, mais souvent, quand elles font quelque chose de bien, elles n'arrivent pas à réunir les sommes pour accéder à la Formule supérieure. Mais les garçons ont les mêmes difficultés. Pour avoir une chance de continuer, même un très bon pilote doit amener une valise avec pas mal de billets. Le sport automobile coûte trop cher! La différence, c'est qu'il y a beaucoup plus de garçons au départ. Comparé à la base de la pyramide, il y a combien d'hommes au sommet? Entre 20 et 25 pilotes en F1. Il faudrait une base beaucoup plus large pour avoir des femmes à ce niveau."

Q: Les mentalités ont-elles changé sur les circuits?

R: "Avec une pointe d'humour, j'ai toujours dit qu'un homme qui se ferait battre par une femme et qui accepterait ça facilement ne serait pas vraiment un homme... Mais je crois que les mentalités ont évolué. Les jeunes filles disent qu'elles sont plus facilement acceptées et respectées à tous les niveaux. Il y a moins de problèmes de rivalité, peut-être encore en karting mais pas dans les Formules supérieures. Sur un circuit, en peloton, c'est facile de sortir quelqu'un et les filles étaient assez visées à l'époque. Ça a beaucoup changé apparemment. Aujourd'hui, c'est normal de voir des filles qui gagnent."

Q: Les femmes ne doivent-elles pas encore faire plus leurs preuves?

R: "Peut-être qu'une fille, comme il n'y en a pas beaucoup, va être obligée de prouver davantage. Mais quand vous regardez le palmarès de Leena Gade (première femme ingénieure de course à remporter les 24 Heures du Mans en 2011 avec Audi, ndlr), il n'y a rien à redire. Et si on leur demande de prouver un peu plus, est-ce vraiment gênant? Quand on est bon, le prouver n'est pas un problème. On se met parfois des barrières comme des excuses."

Q: Que reste-il à faire pour les femmes dans le sport automobile?

R: "On n'a pas assez de filles qui commencent. Si on avait la même base que les hommes, je pense qu'on aurait depuis longtemps des femmes au sommet. Il faut encourager plus de femmes à s'impliquer dans notre sport à tous les niveaux pour avoir plus de filles qui viennent à la compétition. C'est le problème que la commission Women in Motorsport de la FIA essaye de traiter. Avoir, par exemple, des femmes à la tête d'écuries de F1 alors qu'il n'y a pas de femmes pilotes, c'est très positif."

Q: Comment les attirer?

R: "Il faut commencer dès le plus jeune âge, en faisant voir aux filles ce qu'est le sport automobile, avec des programmes comme +F1 in school+ (F1 à l'école, ndlr), ce que fait l'ancienne pilote Susie Wolff (à destination des écolières britanniques, ndlr) avec +Dare to be different+ ou, à partir de 2018, le +FIA European Young Women Programme+ (un programme de karting destiné aux jeunes filles, ndlr)."

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