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Signé Giltay: entre l'appel de l'Europe et le risque de l'ennui, quel avenir politique pour Emmanuel Macron?

Le Président de la République française est né le 21 Décembre 1977. Il n’ a que 46 ans, et pourtant il est déjà en fin de carrière. En effet, élu en 2017, puis réélu en 2022, il ne peut plus, compte tenu de la Constitution française, exercer plus deux mandats consécutifs. Il devra quoiqu’il arrive quitter le pouvoir au printemps 2027, il sera alors âgé de 49 ans. C’est jeune pour partir à la retraite quand on est Président, si l’on songe que le général De Gaule accéda à cette fonction à 68 ans, François Mitterrand à 64 ans et le plus jeune de ses prédécesseurs Valery Giscard d‘Estaing à 48 ans. Comment va-t-il occuper ses journées un fois privé des ors de l’Elysée?

Emmanuel Macron a prononcé le 25 avril un long discours programme sur l’avenir de l’Europe dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne. C’était sa manière à lui d’entrer dans la campagne des élections européennes qui se tiendront le 9 juin, et qui s’annoncent difficile pour son camp. Aux derniers sondages son parti Renaissance n’est donné qu’à 17,5 % des voix, alors que le rassemblement national de Marine Le Pen caracole en tête avec 31% %. Durant plus de deux heures le président a développé sa thèse déjà émise en 2017 au même endroit, sur "l’Europe puissance" qui devrait notamment en matière militaire s’affranchir de l’Amérique. Certain y ont vu comme l’élaboration d’une réforme fondamentale qui aboutirait à la création d’une Europe plus centralisée qui se doterait d’un chef unique, par exemple, Emmanuel Macron. 

L’hypothèse est séduisante, mais se heurte aux réalités. Hormis peut-être durant la période où Jacques Delors fut président de la Commission européenne de 1985 à 1995 l’Europe fut rarement incarnée par des personnage politiques de premier plan. Actuellement le pouvoir européen est exercé par Charles Michel ancien Premier ministre belge, Président du conseil, et par Ursula von der Leyen ex ministre allemande de la défense, Présidente de la commission. Mais ni l’une, ni l’autre ne font le poids face aux 27 chefs d’États et de gouvernements, toujours maitres en leurs pays. L’ambition supra nationale, portée dans les années cinquante par les pères de l’Europe, n’est toujours qu’une idée, surtout depuis les élargissements successifs. On se souvient du mot d’humour de l’ancien secrétaire d’État américain Henry Kissinger en 1970, "l’Europe quel numéro de téléphone?"

Europe : qui au bout du fil ?

Il est séduisant d’imaginer, au bout du fil un ancien chef d’État. L’hypothèse avait déjà été avancée en France pour Valéry Giscard d’Estaing, quand il avait en charge la commission chargée de l’élaboration de la Constitution européenne, qui fut, hélas pour lui, rejetée en France par référendum. Pourtant il y a des précédents. L’actuel secrétaire général de l’ONU, Antonio Guttieres, n’est-il pas un ancien Premier ministre portugais? Et la francophonie ne fut-elle pas présidée par Abdou Diouf le successeur de Senghor à la tête du Sénégal. Cela dit une Europe, qui se voudrait les États-Unis d’Europe, ne serait pas l’équivalent d’une organisation internationale. Son Président ne serait pas un porte-parole, un médiateur, un coordinateur, mais un chef doté de pouvoirs importants, notamment militaires. Un schéma impossible à réaliser à court terme, comme disait Margaret Thatcher: "Il faudrait mille ans"

Come back or not come back

Si l’on écarte l’hypothèse d’une présidence européenne forte que reste-t-il comme activité au retraité Macron? Pourrait-il, comme les anciens présidents américains, diriger une fondation consacrée à la paix ou à l’écologie et vivre de lucratives conférences à travers le monde? Ou comme l’ex Chancelier allemand Helmut Schmidt qui co-dirigea le magazine "Die Zeit", s’investir dans les médias? On voit mal le jeune et suractif Macron (il ne dormirait que quatre heures par nuit) se contenter d’un éditorial hebdomadaire, à l’image du camarade Fidel, à la fin de sa vie, qui écrivait dans "Granma", l’organe du parti communiste cubain. Certes les grandes multinationales s’arracheraient à prix d’or cet ancien cadre de la banque Rothschild, pour muscler leurs conseils d’administration.

Son truc c’est le pouvoir, le vrai!

Mais l’argent n’est pas sa motivation première. Son truc c’est le pouvoir, le vrai! Or dans les démocraties occidentales, le responsable politique qui dispose des plus grands pouvoirs personnels, ce n’est pas le Président des États-Unis, mais le Président de la République Française. En 1957 le général de Gaule s’est fait tailler un costume à sa mesure, la Vème République, que ses successeurs ont essayé d’endosser avec plus ou moins de succès.

Macron le retour

La Constitution française, empêche un président d’exercer plus de deux mandats consécutifs. Mais il peut revenir après un purgatoire de cinq ans. Cinq ans après son départ de l’Élysée, Emmanuel Macron n’aura alors que 54 ans. Sur le plan de l’âge l’idée n’est pas folle. Certes, comme dit la vielle sagesse des nations, "On ne peut pas être et avoir été". Les retours sont rarement victorieux, Napoléon l’un des modèles d’Emmanuel Macron a raté le sien en 1815. Cent jours à peine, conclus par un désastre à Waterloo. 

En revanche le générale De Gaulle a réussi le sien. Revenu au pouvoir en pleine guerre d’Algérie, après 13 ans de traversée du désert, il a bâti une République solide, même s’il fut lui aussi chassé après l’échec d‘un référendum. Mais il avait gouverné la France de 1958 à 1969, et quitté la scène à 78 ans… "Pourquoi pas?", se dit Macron. Mais comment faire? Attendre son heure au Touquet avec Brigitte, à pratiquer le char à voile et à déguster les célèbres chocolats du "chat bleu"? Cela ne dure qu’un temps, il n’a pas comme le général à Colombey, de "Mémoires de guerre" à écrire. Laissons notre esprit voguer vers la politique fiction. Imaginons un scénario à la Poutine-Medvedev entre 2008 et 2012. Macron favorisant l’élection d’un fidèle à sa succession, Attal par exemple, qui le prendrait comme Premier ministre… Avant de lui rendre l’Élysée 5 ans plus tard. Impossible? Impossible n’est pas français… Et puis comme on dit en Italien, "Si non è vero, è bene trovato"

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