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Un Vietnamien soupçonné d'avoir participé à un enlèvement digne de la Guerre froide à Berlin, sur ordre du régime communiste de Hanoï, a rejeté toute responsabilité à l'ouverture de son procès mardi et affirmé être un "bouc émissaire".
L'accusé identifié comme Long N. H., un homme de 47 ans possédant également la nationalité tchèque, comparaît jusqu'au 17 mai devant un tribunal de Berlin pour "avoir participé à une opération des services secrets vietnamiens qui a conduit à l'enlèvement" de deux Vietnamiens, selon l'accusation.
Cheveux courts et muni d'une oreillette lui traduisant les débats, il s'est assis dans un box sécurisé et n'a pas souhaité dans l'immédiat s'exprimer.
Son avocat, Stephan Bonnell, s'en est chargé. Il a d'emblée minimisé le rôle de son client dans cette affaire, affirmant "qu'il ne savait rien" de ce qui allait réellement se passer.
Me Bonell a balayé les accusations du parquet, selon lequel Long N. H. a loué les véhicules ayant servi à l'enlèvement: certes, on lui a demandé de les louer, mais c'était pour de pures "raisons touristiques", a fait valoir le conseil.
- 'Raisons touristiques' -
Selon lui, Long N. H. n'est dans cette affaire qu'un simple "bouc émissaire".
Trinh Xuan Thanh, 52 ans, ancien membre du parti communiste vietnamien et ex-dirigeant d'une filiale d'une entreprise pétrolière publique vietnamienne, avait été enlevé avec sa maîtresse le 23 juillet 2017 en plein jour dans un célèbre parc berlinois.
Accusé par Hanoï d'avoir détourné 120 millions d'euros, M. Thanh était alors en fuite et cherchait asile en Allemagne.
Les conditions rocambolesques de son enlèvement sont dignes d'un roman d'espionnage de la Guerre froide. Alors qu'il se promenait avec sa maîtresse, "ils ont été jetés dans une fourgonnette en plein jour et conduits contre leur volonté au Vietnam", a indiqué à l'audience le procureur Lienhardt Weiss.
Le parquet affirme que le commando a agi "à l'initiative de services gouvernementaux vietnamiens".
Hanoï soutient au contraire que Trin Xuan Thanh est revenu de son plein gré. Il a été condamné en début d'année par la justice de son pays à deux peines de prison à vie pour détournement de fonds.
M. Thanh est l'un des nombreux fonctionnaires, banquiers ou hommes d'affaires vietnamiens condamnés ces dernières années dans le cadre d'une vaste opération contre la corruption lancée par les autorités communistes de Hanoï. Des procédures qui ont aussi en toile de fond des luttes politiques entre réformistes et tenants d'une ligne pro-Pékin.
L'enlèvement à Berlin a provoqué une crise diplomatique entre l'Allemagne et le Vietnam. Berlin a dénoncé une "violation scandaleuse" de sa souveraineté et le ministre des Affaires étrangères de l'époque, Sigmar Gabriel, avait fustigé des méthodes dignes des "films noirs sur la Guerre Froide".
En représailles, Berlin a expulsé deux diplomates et plusieurs fois convoqué l'ambassadeur vietnamien.
- Vie discrète -
La justice allemande a, en outre, ouvert une enquête contre le général Duong Minh Hung, l'un des responsables des renseignements vietnamiens, soupçonné d'avoir coordonné l'enlèvement depuis un hôtel berlinois avant de rentrer dans son pays, selon le quotidien Süddeutsche Zeitung.
Le journal affirme également que "la moitié de l'ambassade" du Vietnam à Berlin "a semble-t-il été impliquée" dans l'enlèvement, la femme de l'attaché militaire se chargeant notamment de réserver les billets retour pour les agents.
Unique membre présumé du groupe à avoir été interpellé, Long N. H. est seul sur le banc des accusés.
Il avait été arrêté le 12 août 2017 en République tchèque où il tenait à Prague un bureau de change, puis remis aux autorités allemandes.
Selon l'accusation, il a loué à Prague la fourgonnette qui a servi à l'enlèvement et a conduit le véhicule à Berlin.
Les enquêteurs ont pu analyser le contenu du téléphone de M. Thanh, abandonné sur les lieux de l'enlèvement.
Ce dernier s'est produit alors que la maîtresse de M. Thanh venait d'arriver de Paris pour retrouver son amant à Berlin, où il menait depuis mi-2016 une vie discrète, avec femme et enfants.