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Chez Michelin, le coronavirus bouleverse les habitudes à l'heure de la reprise

"C'est ma première leçon de couture!": à l'usine Michelin de La Combaude, à Clermont-Ferrand, une partie des ouvriers se reconvertit dans la fabrication de masques tandis que d'autres ont dû reprendre le travail en s'adaptant aux nouvelles mesures contre le coronavirus.

La salle de réunions est devenue un atelier couture. Penchés sur des tables blanches disposées en rectangle, une vingtaine de salariés découvrent le fonctionnement d'une machine à coudre, la réalisation d'un patron ou encore le pliage d'un masque.

L'objectif de Michelin est de produire à terme 400.000 pièces par semaine à destination du personnel de santé et des salariés du groupe.

Jérôme Berthier est plus habitué à manier les câbles de pneus que le tissu: ce contrôleur de filière s'est tout de suite porté volontaire pour apprendre à fabriquer des masques. D'un geste incertain, il tente de relier l'élastique au masque en actionnant la pédale de sa machine à coudre.

"C'est pas évident au départ mais c'est un coup à prendre! C'est ma première leçon de couture! Nous avons besoin de masques, je trouve ça logique d'être volontaire", explique-t-il, encouragé par sa formatrice, Barbara Konopka, elle-même monitrice de mesures physiques chez Michelin, mais qui pratique la couture à titre personnel.

A l'étage inférieur, une dizaine de salariés déjà opérationnels s'activent sur des tables alignées.

"C'est le démarrage d'une nouvelle activité, nous commençons la fabrication en série, d'abord de manière très manuelle, puis nous allons automatiser tout cela et nous aurons des chaînes de production industrielle partout en Europe et demain partout dans le monde", a assuré à la presse Florent Menegaux, le président de Michelin venu saluer les salariés vendredi.

"L'innovation, c'est la marque de fabrique de Michelin, aujourd'hui cela s'exprime pleinement et le groupe saura surmonter cette crise", a-t-il assuré.

Objectif à La Combaude: 20.000 masques par jour d'ici deux semaines et 150 salariés opérationnels.

- Arrêt inédit -

Après un arrêt inédit de plus de deux semaines - pendant la seconde guerre mondiale, seules certaines usines avaient été stoppées- la production a progressivement repris début avril chez Michelin, malgré les réticences syndicales.

"Le confinement généralisé a provoqué un arrêt assez brutal de toutes nos activités, (...) nous avons profité de cet arrêt pour définir quelles étaient les conditions de sécurité qui nous permettraient de redémarrer", a expliqué M. Menegaux.

"Michelin fabrique des pneumatiques indispensables aux véhicules de sécurité, pompiers, ambulances, véhicules de secours" et "nos activités sont vitales" a-t-il encore justifié.

Trois usines françaises ont redémarré en partie, dont celle de La Combaude qui fabrique des moules pour les pneus. Dans le hall immense où sont entreposés pièces et moules gigantesques, quelques ouvriers s'activent.

Ils sont une cinquantaine à avoir repris le chemin des ateliers, sur un effectif de 600. Uniquement des volontaires. Les syndicats du groupe ont obtenu la garantie que les salariés ne souhaitant pas retourner travailler pourraient rester chez eux.

Des mesures draconiennes ont été mises en place: prise de température à l'entrée du bâtiment, gel hydroalcoolique et masques à disposition dans les ateliers, distance minimale de deux mètres entre chaque ouvrier, désinfection des postes de travail toutes les heures, etc.

Un protocole insuffisant aux yeux de certains syndicats. "Le risque zéro n'existe pas, tous les experts s'accordent à dire que la seule façon de lutter contre ce virus, c'est de rester chez soi", assure Jérôme Lorton (Sud) opposé à la reprise.

Pour lui, toutes les activités de Michelin ne sont pas "d'utilité publique", alors que "tous les sites travaillent à une réouverture".

Mathieu Sol, opérateur, travaille depuis 13 ans chez Michelin. Seul devant une imposante machine d'usinage à cinq axes, il fabrique les pièces qui vont constituer les moules de pneus: "On a repris avec une petite équipe, ça réduit les risques!", assure-t-il.

"Ma machine est isolée donc je ne vois pas grand monde, c'est aussi pour cela que j'ai voulu reprendre, mais j'ai la chance de ne pas avoir d'enfants", reconnaît-il.

Dès lundi, deux nouvelles usines redémarreront en France, a indiqué M. Menegaux, sans toutefois préciser lesquelles.

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