Accueil Actu

Crack à Paris: un nouveau plan pour endiguer le fléau

"Accompagner les usagers", renforcer les places d'hébergement, créer un groupe d'enquêteurs: un nouveau plan de lutte contre le crack à Paris, signé lundi notamment par la Ville et la préfecture de police, veut endiguer ce fléau dans le nord-est de la capitale.

Dans ce secteur de Paris, le crack, dérivé fumable de la cocaïne, poursuit ses ravages: six morts "depuis le début de l'année" dans les environs de la "Colline" -- repaire de "crackeurs" situé en bord de périphérique au niveau de porte de la Chapelle --, s'alarme auprès de l'AFP l'adjointe en charge de la santé à la mairie de Paris, Anne Souyris (EELV).

La maire (PS) de Paris Anne Hidalgo avait annoncé en octobre le déblocage avec l'Agence régionale de santé (ARS) d'un million d'euros pour assurer la prise en charge des toxicomanes, en augmentant le nombre de maraudes des associations et le financement de lieux d'hébergement spécifiques.

Pour aller plus loin, un nouveau plan, signé lundi et élargi aux préfectures de police et région et à la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), vise notamment à "favoriser le parcours de soins" des toxicomanes et "renforcer les capacités d'hébergement et d'espaces de repos".

Un "espace de repos en container qui offrira douche, WC et sanitaires" doit notamment être mis en place sur la "Colline".

"Dormir quelques heures, ça espace les prises de fait", explique Mme Souyris.

Le plan prévoit aussi l'ouverture de 60 places de mises à l'abri à l'hôtel et la pérennisation de 80 places d'hébergement, un renforcement des maraudes dans la rue ou les rames de métro, une équipe dédiée à la médiation avec les riverains, ainsi que la "création d'un groupe d'enquêteurs" spécialisés.

En tout, 3 millions d'euros sont mis sur la table en 2019 pour financer la lutte anti-crack. Ce nouveau plan sera déployé jusqu'en 2021.

- Espaces de consommation ? -

Certains élus de l'opposition dénoncent un plan insuffisant: "pas à la hauteur", selon la LR Marie-Claire Carrere-Gee; "tardif" pour la conseillère LREM de Paris Déborah Pawlik. "Quel sera, notamment, le suivi social, psychologique et médical de ces personnes ?", s'interroge cette dernière.

Les associations saluent, elles, ces annonces, à l'instar de Léon Gomberoff, directeur du centre d'accueil d'usagers de drogues "Espoir Goutte d'Or" dans le XVIIIe arrondissement. Il estime que, depuis la mise en oeuvre du premier plan, "on arrive à orienter plus de personnes vers des hébergements" avec "une maraude sept jours sur sept contre uniquement deux fois par semaine auparavant".

Un lien quotidien essentiel pour aborder des personnes souvent en errance, dont la méfiance est exacerbée par les bouffées paranoïaques dues au crack.

"Mais il manque des espaces de consommation", nuance Nathalie Latour, déléguée générale de la Fédération Addiction. "On a tout dans ce plan, sauf l'indispensable".

L'actuelle "salle de consommation à moindre risque" dans le 10e arrondissement, encore surnommée "salle de shoot", "a démontré ses effets apaisants" mais n'est ouverte qu'aux héroïnomanes, pas aux seuls fumeurs de crack, et ne suffit plus, selon elle.

"Nous espérons que ce ne sera pas la dernière salle de consommation et qu'elle fera des petits aussi bien à Paris qu'en proche banlieue", estime Stéphane Bribard, élu du Xe arrondissement.

Attendu depuis des mois, l'arrêté du ministère de la Santé qui autoriserait la création de nouvelles salles et en ouvrirait l'accès aux "crackeurs" tarde à venir.

Pourtant, "c'est dans ce cadre-là qu'on peut créer du lien, qu'on peut éviter d'avoir des lieux comme Stalingrad ou la +Colline+ et qu'on peut permettre aux gens d'éviter de consommer dans des mauvaises conditions et d'aggraver le phénomène de +craving+ (manque, Ndlr)", argue Mme Latour.

Relayée par plusieurs médias, la rumeur d'ouverture d'une nouvelle salle est démentie par la mairie de Paris, même si l'entourage de Mme Hidalgo reconnaît le bilan "très positif" du premier dispositif.

"Il n'en est pas question", martèle auprès de l'AFP Emmanuel Grégoire. Les lieux de repos prévus par le plan "ne sont pas des lieux de consommation mais des lieux d'accueil bienveillants", insiste le premier adjoint.

Toutefois, une "zone de tolérance" pour fumer du crack autour de certains lieux de repos avec une présence plus souple de la police est envisagée, assurent plusieurs sources.

À lire aussi

Sélectionné pour vous